21/10/2009

«Va, ta foi t'a sauvé»…

Bonjour !

Evangile de jésus-Christ selon saint Marc 10, 46b-52


46 Jésus et ses disciples arrivent à Jéricho. Et tandis que Jésus sortait de Jéricho avec ses disciples et une foule nombreuse, un mendiant aveugle, Bartimée, le fils de Timée, était assis au bord de la route.

47 Apprenant que c'était Jésus de Nazareth, il se mit à crier: «Jésus, fils de David, aie pitié de moi!»

48 Beaucoup de gens l'interpelaient vivement pour le faire taire, mais il criait de plus belle: «Fils de David, aie pitié de moi!»

49 Jésus s'arrête et dit: «Appelez-le.» On appelle donc l'aveugle, et on lui dit: «Confiance, lève-toi; il t'appelle.»

50 L'aveugle jeta son manteau, bondit et courut vers Jésus.

51 Jésus lui dit: «Que veux-tu que je fasse pour toi ? — Rabbouni, que je voie.»

52 Et Jésus lui dit: «Va, ta foi t'a sauvé.» Aussitôt l'homme se mit à voir, et il suivait Jésus sur la route.


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Pour mémoire, dans les textes des dimanches précédents, Jésus ne cesse d’annoncer par petites touches sa passion à ses disciples qui, visiblement, ne comprennent rien à son langage. Ils ne peuvent accepter que celui qu’ils considèrent comme le Roi d’Israël, celui dont ils ont vu les miracles s’avoue vaincu, et surtout de la pire des manières. Et Jésus de leur préciser avec insistante encore : «Voici, nous montons à Jérusalem, et le Fils de l'homme sera livré aux principaux sacrificateurs et aux scribes. Ils le condamneront à mort, et ils le livreront aux païens, qui se moqueront de lui, cracheront sur lui, le battront de verges, et le feront mourir; et, trois jours après, il ressuscitera» (Mc 10, 33-34). Jésus monte vers Jérusalem, la Ville Sainte bâtie sur les hauteurs (géographiquement, il descend vers Jérusalem); et c’est à la sortie de Jéricho, toujours suivi d’une grande foule, que se produit cette scène incroyable. De quoi s’agit-il ?

Un aveugle, c’est-à-dire une personne rejetée par la société et qui, du fait de son infirmité, ne pouvait travailler pour subvenir à ses besoins ni à ceux de sa famille, est contrainte de mendier. Elle n’a pas d’autre choix que de s’exposer au regard des passants dont certains faisaient tout de même montre de générosité à son égard. Or notre aveugle apprend que Jésus de Nazareth passe à côté de lui. Alors, il crie de toutes ses forces pour se faire entendre. Marc nous glisse un petit détail qui vaut son peson d’or: «Beaucoup de gens l'interpelaient vivement pour le faire taire, mais il criait de plus belle: «Fils de David, aie pitié de moi!» (48) Vous vous souvenez de la guérison de la fille de Jaïr (Lc 8, 41-56) ? Ce miracle fut précédé d’un autre, la guérison de la femme hémorroïsse, celle qui, malgré la foule qui se pressait autour de Jésus et malgré le cordon de sécurité que formaient les disciples pour isoler leur Maître, toucha la frange de la tunique de Jésus: «Qui m’a touché ?», avait demandé Jésus, «Quelqu'un m'a touché, car j'ai connu qu'une force était sortie de moi»… la femme, prise d’effroi s’était avancée et, se jetant à ses pieds, avait expliqué devant tout le peuple pourquoi elle l'avait touché, et comment elle avait été guérie à l'instant (8, 48). Jésus lui dit: «Ma fille, ta foi t'a sauvée. Va en paix». Mais nous savons aussi qu’à ce moment-là, Jésus lui-même intimait l’ordre à ses disciples et à toutes les personnes qui bénéficiaient de ses miracles de ne pas en dire un mot, parce qu’il estimait que ceux qui l’écoutaient enseigner n’étaient pas encore prêts pour comprendre la vérité de sa Parole.

Dans cet extrait de Marc, le même cordon de sécurité tente d’isoler Jésus de la foule, avec de bonnes intentions, certes ! mais parce qu’en réalité les disciples ne veulent pas que l’on embête leur Maître, ou plutôt qu’on détourne son attention de leurs attentes (la place de chacun dans le futur gouvernement de Palestine)… Encore une fois, c’est Jésus qui se rend attentif à la détresse d’un homme relégué au banc de la société, un aveugle dont la seule espérance est de guérir de sa cécité. Jésus lui demande: «Que veux-tu que je fasse pour toi ? » Et lui de répondre: «Rabbouni, que je voie» (51). Et Jésus lui dit: «Va, ta foi t'a sauvé». Aussitôt l'homme se met à voir, et il suivait Jésus sur la route (52). Nous savons aussi qu’à un autre moment Jésus guérit plusieurs personnes de leurs infirmités, mais qu’une seule d’entre elles l’en remercia. A cette personne, Jésus dit la même chose : «Va, ta foi t'a sauvé». Toutes ont été guéries, certes ! mais une seule a été sauvée. Car nous pouvons guérir de nos infirmités et maladies, sans pour autant être sauvés. C’est Dieu qui sauve par pure grâce, mais c’est notre foi qui nous y dispose lorsque nous l'accueillons dans notre vie et que nous proclamons, à l’instar de l’aveugle: «Seigneur, tu es le messie, le Fils de Dieu». Il est à noter que cette fois-ci Jésus n’interdit à personne de parler du miracle qu’il vient d’accomplir. Pour la première fois, il prend conscience de son identité de Messie et accepte qu’elle soit révélée. Le parallèle n’est pas insignifiant entre cette vue recouvrée et cette identité dévoilée au monde. Il n’est pas insignifiant non plus de rapprocher cet épisode de la prophétie de Jérémie que nous avons lue dans la première lecture de ce dimanche: «Le Seigneur sauve son peuple, le reste d'Israël... Il y a même parmi eux l'aveugle et le boiteux». (Jr 31)… ou celles, nombreuses, d’Isaïe dans les chapitres 29 à 46. C’est son dernier miracle au cours de la montée à Jérusalem et il sait désormais ce qui arrivera: la passion, la mort sur la croix et la résurrection.

Mais revenons un instant au miracle lui-même. Comme pour tout miracle, l’évangéliste ne se contente pas de relater les faits comme dans un reportage; en réalité, il les interprète, et c’est jusque dans les moindres détails qu’il nous suggère d’aller trouver le sens profond de ce qu’il décrit. Ici, il est question de la guérison d’un aveugle. Or nous devons noter que ce denier miracle intervient dans un contexte d’aveuglement général. Tout le monde est aveugle aux paroles de Jésus, y compris ses propres disciples. Ceux-ci reçoivent une véritable leçon de foi car c’est de la bouche d’un aveugle de chair que sort le cri de reconnaissance de la messianité de Jésus: «Jésus, fils de David, aie pitié de moi». A cet aveugle qui a accouru de toutes ses forces, Jésus accorde plus et mieux que la vue corporelle : la foi. Et Marc de préciser: «… Aussitôt l'homme se mit à voir, et il suivait Jésus sur la route». Mais qu’est-ce donc que la foi sinon suivre Jésus vers la croix et l’illumination pascale? Que demander à Dieu dans nos aveuglements de tous genres sinon cette foi qui illumine nos cœurs, cette foi qui permet de voir non pas des miracles extraordinaires, mais des choses simples de la vie de tous les jours, ces traces qui sont autant de signes de sa présence active au milieu de nous. Et quelle vivifiante humilité que celle par laquelle nous demandons, dans chaque prière pénitentielle: "Seigneur, prends pitié!"… Quelle belle prière également que celle par laquelle nous lui disons: «ouvre mes yeux, Seigneur, aux merveilles de ton amour!».


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