29/07/2012

« Où pourrions-nous acheter du pain
pour qu'ils aient à manger ? »


Dimanche 29 juillet 2012

Chers amis, bonjour !

E
 n ce dimanche 29 juillet, j’ai décidé de partager avec vous la parole délivrée par le RP Alain MOUNIER, prêtre Jésuite  exerçant dans le Diocèse de LYON.  Au cœur de l’été, il a bien voulu pallier l’absence de l’équipe pastorale « titulaire » prise dans de multiples autres occupations, ou simplement partie de reposer pour reprendre des forces. Tiens ! Cela fait penser à l’Évangile de dimanche dernier.
Une cérémonie dominicale en l'église ND de la Paix qui a été riche et dense de la prédication du RP Alain MOUNIER, et des intentions de prières préparées par l’équipe paroissiale de préparation liturgique. L’office de ce matin a débuté avec ce texte de SERVEL publié dans la revue « Propositions d’animations », une introduction à l’Eucharistie.


« Comme l’enfant reçoit le pain, comme l’oiseau l’espace avec le grain :
Donne-nous, Seigneur, d’accueillir ta Parole !
Comme l’ami reçoit l’ami, comme la nuit reçoit l’aurore et le soleil :
Donne-nous, Seigneur, d’accueillir ta Parole !
Comme le soleil reçoit semence, comme la sève monte aux branches et porte fruit :
Donne-nous, Seigneur, d’accueillir ta Parole ! »



Voici les trois textes que la liturgie nous propose de méditer en ce dimanche. Ils sont suivis de l’homélie du RP Alain MOUNIER que je remercie vivement pour la simplicité avec laquelle il a daigné comblé ma demande de publier sa prédication sur mon blog.


PREMIERE LECTURE - Deuxième Livre des Rois, 4, 42 - 44
42 Il y avait alors une famine dans le pays. Sur la récolte nouvelle,
quelqu'un offrit à Elisée, l'homme de Dieu,
vingt pains d'orge et du grain frais dans un sac.
Elisée dit alors :
« Donne-le à tous ces gens pour qu'ils mangent. »
43 Son serviteur répondit :
« Comment donner cela à cent personnes ? »
Elisée reprit:
« Donne-le à tous ces gens pour qu'ils mangent,
car ainsi parle le SEIGNEUR :
On mangera et il en restera. »
44 Alors il les servit, ils mangèrent,
et il en resta, selon la parole du SEIGNEUR.

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PSAUME 144 (145), 10-11, 15-16, 17-18
10 Que tes oeuvres, SEIGNEUR, te rendent grâce
et que tes fidèles te bénissent !
11 Ils diront la gloire de ton règne,
ils parleront de tes exploits.

15 Les yeux sur toi, tous ils espèrent :
tu leur donnes la nourriture au temps voulu ;
16 Tu ouvres ta main ;
tu rassasies avec bonté tout ce qui vit.

17 Le SEIGNEUR est juste en toutes ses voies,
fidèle en tout ce qu'il fait.
18 Il est proche de ceux qui l'invoquent,
de tous ceux qui l'invoquent en vérité.

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DEUXIEME LECTURE - Ephésiens 4, 1 - 6
Frères,
1 moi qui suis en prison à cause du Seigneur,
je vous encourage à suivre fidèlement
l'appel que vous avez reçu de Dieu :
2 ayez beaucoup d'humilité, de douceur et de patience,
supportez-vous les uns les autres avec amour ;
3 ayez à coeur de garder l'unité dans l'Esprit
par le lien de la paix.
4 Comme votre vocation vous a tous appelés
à une seule espérance,
de même, il n'y a qu'un seul Corps et un seul Esprit.
5 Il n'y a qu'un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême,
6 un seul Dieu et Père de tous,
qui règne au-dessus de tous,
par tous, et en tous.
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EVANGILE - Jean 6, 1 - 15
1 Après cela, Jésus passa de l'autre côté du lac de Tibériade
(appelé aussi mer de Galilée).
2 Une grande foule le suivait,
parce qu'elle avait vu les signes qu'il accomplissait
en guérissant les malades.
3 Jésus gagna la montagne, et là, il s'assit avec ses disciples.
4 C'était un peu avant la Pâque, qui est la grande fête des Juifs.
5 Jésus leva les yeux et vit qu'une foule nombreuse venait à lui.
Il dit à Philippe :
« Où pourrions-nous acheter du pain pour qu'ils aient à manger ? »
6 Il disait cela pour le mettre à l'épreuve,
car lui-même savait bien ce qu'il allait faire.
7 Philippe lui répondit :
« Le salaire de deux cents journées ne suffirait pas
pour que chacun ait un petit morceau de pain. »
8 Un de ses disciples, André, le frère de Simon-Pierre, lui dit :
9 « Il y a là un jeune garçon qui a cinq pains d'orge
et deux poissons,
mais qu'est-ce que cela pour tant de monde ! »
10 Jésus dit : « Faites-les asseoir. »
Il y avait beaucoup d'herbe à cet endroit.
Ils s'assirent donc, au nombre d'environ cinq mille hommes.
11 Alors Jésus prit les pains,
et, après avoir rendu grâce,
les leur distribua ;
il leur donna aussi du poisson, autant qu'ils en voulaient.
12 Quand ils eurent mangé à leur faim,
il dit à ses disciples :
« Ramassez les morceaux qui restent,
pour que rien ne soit perdu. »
13 Ils les ramassèrent, et ils remplirent douze paniers
avec les morceaux qui restaient des cinq pains d'orge
après le repas.
14 A la vue du signe que Jésus avait accompli,
les gens disaient :
« C'est vraiment lui le grand Prophète,
celui qui vient dans le monde. »
15 Mais Jésus savait
qu'ils étaient sur le point de venir le prendre de force
et faire de lui leur roi ;
alors de nouveau il se retira, tout seul, dans la montagne.




HOMÉLIE DU RP ALAIN MOUNIER

Le texte d’aujourd’hui nous est bien connu. Spontanément nous en retenons l’attention que le Seigneur dans sa compassion porte à une population qui a faim et sa volonté de mettre ce qu’il est auservice de cette population. Sans qu’on sache comment — l’évangile ne décrit rien — le constat est fait que les pains ont été multiplies. Cette approche qui occupe notre mémoire n’est pas fausse; cependant, il faut en expliquer un peu le contenu, surtout parce que cet événement est considéré comme très important par les rédacteurs des évangiles puisqu’on le trouve dans les quatre évangiles; et même chez Matthieu et Marc, deux fois. La lecture que nous avons faite est la rédaction de St Jean. Saint Jean pour lequel nous savons que si la narration des événements a de l’importance, le sens de ces événements est plus important encore. Le texte d’aujourd’hui n’échappe pas à cette règle et s’inscrit tout à fait dans le sens de notre foi en Jésus-Christ à la fois homme et Dieu.
Le propre de ce texte est de raconter un événement matériel, verifiable, et d’avoir un sens profond; d’être à la foi concret et prophétique, charnel et spirituel. Si bien que ce texte nous parle sous ses trois aspects : le récit, le message, la signification symbolique.

Nous pouvons donc évoquer ‘événement et cela déjà n’est poas rien, ce doit être l’occasion de ce que les auteurs spirituels, les mystiques appellent une contemplation.
La scène: une foule fatiguée après une journée passée à écouter la Parole du Christ, une foule séduite, semble-t-il, par les guérisons qui ont eu lieu et qui veut le suivre, suffisamment séduite pour en oublier qu’elle a peut-être faim et n’a pas de quoi manger. On voit parfois de ces foules prêtes à subir des conditions inconfortables pour voir ou entendre leur star, leur idole. Dans le texte de Saint Jean, les disciples ne soulèvent pas les premiers, le problème. C’est le Christ qui est attentif, prend et va poser la question de leur repas. Questionnés, les disciples font état d’une situation devant laquelle ils sont impuissants.  Sans comprendre, comme à Cana, quand Marie dit aux disciples  “faites ce qu’il va vous dire”, à partir du peu qu’ils avaient (les pains ne viennent pas directement du ciel, mais sont multipliés à partir de ce don’t ils disposainet), le Christ se met donc à servir des pains dont le stock ne s’épuise.

L’Évangile dit : "Quand ils eurent mangé à leur faim, le Christ demande qu'on ramasse les restes, et il y eut de qui en remplir douze paniers", preuve de la surabondance de l'œuvre de Dieu. Reprise de ce que nous avait annoncé la première lecture: "Il les servit, ils mangèrent et il en resta".
Voilà pour les faits… Qu'en est-il des implications, du message? D'abord que le Christ est attentif aux besoins de ceux qui le suivent, mais que devant ces besoins les disciples traduisent leur désarroi, leur impuissance au point qu'ils n'osent rien. Et nous pouvons nous poser la question: sommes-nous attentifs aux besoins des autres? Ne nous abritons-nous pas derrière notre désarroi, pour ne pas agir chaque fois que nous nous sentons dépassés? N'affichons-nous pas trop vite notre absence de moyens, alors qu'ici les Christ avec peu fait beaucoup? Ne sommes-nous pas parfois enclins à ne pas nous engager parce que nous pensons ne pas avoir les moyens? Enfin, mesurons-nous l'importance de ce repas? Une foule qui a été touchée par les miracles du Christ concernant quelques individus guéris se retrouve autour d'une table et se trouve concernée dans son ensemble, établissant au-delà de la foule une communauté d'hommes et de femmes. Sommes-nous soucieux sur nos lieux de travail, de loisirs, en famille, de créer au-delà de la juxtaposition des personnes une solidarité, une communauté?

Après ce qu'on peut appeler le côté matériel, charnel de ce texte, il y a derrière, dessous, entre les lignes ou si l'on préfère au-delà du texte une portée spirituelle d'une autre nature, une portée qu'on dirait — pour employer un grand mot —  "symbolique" ou encore prophétique; et cette portée, loin de nous éloigner du message va nous y ramener. Saint Jean dans la rédaction de son évangile est coutumier de ce type d'expression. Qu'est-ce qui nous met sur la voie?
Le premier : "c'était peu avant la Pâque, qui est la grande fête des Juifs". Peu avant la Pâque… Quand Jésus a-t-il pris son dernier repas avec les disciples avant la crucifixion? Juste avant Pâques. Le deuxième élément qui nous oriente dans la compréhension profonde du texte est : "Jésus prit les pains et, après avoir rendu grâce, les leur distribua". Les autres évangélistes ajoutent "qu'il rompît le pain". Nous reconnaissons là les paroles dites par le Christ le Jeudi Saint, lors du dernier repas pris avec ses disciples, lorsqu'il ajoutait : " faites ceci en mémoire de moi".

Si nous entendons le message direct de l'histoire qui nous est racontée, nous pouvons nous demander : d'abord, sommes-nous, comme le Christ, attentifs aux besoins des autres et conscients que nous avons toujours les moyens, ceux-ci fussent-ils modestes, de nous mobiliser à leur service? Savons-nous aussi nous situer dans cette foule? et avons-nous faim du pain que Dieu nous propose, à savoir sa Parole et son pain donné ici à la messe, son pain eucharistique? Sommes-nous à côté des disciples témoins de cette distribution de pain? Ou mieux, allons-nous en communiant au pain qu'est son corps, comme nous dit Saint Paul: "revêtir le Christ", et alors pouvoir dire: " ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi", et donc agir comme lui? Et alors comme lui, distribuer la pain, qu'il s'agisse de la Parole de Dieu et de l'annonce de sa mort et de sa résurrection? Et donner du pain peut revêtir de nombreuses formes: c'est, en famille, faire attention à celui qui pendant l'été est seul pi malade; c'est, au travail, avoir une attitude de solidarité à l'égard de celui qui est menacé d'un licenciement; c'est, entre voisins, donner de sa présence à telle personne âgée malade; c'est, à l'égard d'une voisine qui travaille pendant les vacances et qui a du mal à faire garder ses enfants, proposer ses services. Voilà, à partir de ce qu'on l'on est ou de ce que l'on a, de multiples manières de donner du pain à ceux qui sont pour nous non seulement des hommes que le Christ nous recommande d'aimer, mais d'autres Christ à honorer.

Oui, nous venons ici, fatigués par la semaine écoulée et ayant faim de forces nouvelles pour la semaine qui vient au service des autres. Forts de la grâce du Christ, c'est avec lui et pour lui que nous allons vers la rencontre et l'aide de tous ceux qui ont faim.


28/07/2012

« Venez à l'écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu. »


Dimanche 22 juillet

 Chers amis, bonjour !

Dans les textes du dimanche 22 juillet 2012, l’image du Pasteur est mise en avant comme le symbole de celui qui a la charge de mener le troupeau “des âmes” à bon port et ce, en dépit des obstacles rencontrés sur le chemin, des tribulations subies tout au long du périple, de cet exode qui a commencé sous Moïse et qui se poursuit sous l’éclairage des nombreux apôtres que Dieu a appelés au sein même de son peuple.



PREMIERE LECTURE - Jérémie 23, 1 - 6
1 Parole du SEIGNEUR.
Misérables bergers, qui laissent périr et se disperser
les brebis de mon pâturage !
2 C'est pourquoi - ainsi parle le SEIGNEUR, le Dieu d'Israël
contre les pasteurs qui conduisent mon peuple - :
à cause de vous, mes brebis se sont égarées et dispersées,
et vous ne vous êtes pas occupés d'elles.
Eh bien ! Moi je vais m'occuper de vous,
à cause de vos méfaits,
déclare le SEIGNEUR.
3 Puis je rassemblerai moi-même le reste de mes brebis
de tous les pays où je les ai dispersées.
Je les ramènerai dans leurs pâturages,
elles seront fécondes et se multiplieront.
4 Je leur donnerai des pasteurs
qui les conduiront ;
elles ne seront plus apeurées et accablées,
et aucune ne sera perdue, déclare le SEIGNEUR.
5 Voici venir des jours, déclare le SEIGNEUR,
où je donnerai à David un Germe juste :
il régnera en vrai roi, il agira avec intelligence,
il exercera dans le pays le droit et la justice.
6 Sous son règne, le royaume de Juda sera sauvé,
et Israël habitera sur sa terre en sécurité.
Voici le nom qu'on lui donnera :
« Le SEIGNEUR est notre justice. »
« Des pommes d’or sur des ciselures d’argent, telle est la parole dite à propos. Un anneau d’or ou un joyau d’or fin, telle une sage réprimande à l’oreille attentive » (Proverbes 25, 11) toute une théorie herméneutique : derrière le sens littéral (le premier sens), la réalité métaphysique. Ainsi la métaphore, l’allégorie ou la parabole sont-ils des modes d’expression ou d’enseignement. Les métaphores sont nécessaires pour tenter d’expliquer tant soit peu rationnellement nos expériences quotidiennes, car elles ont le pouvoir de définir la réalité : une métaphore peut parfois générer une nouvelle compréhension et approfondir une notion ou une situation en changeant les relations, entre le figurant et le figuré. Dans la première lecture, Jérémie parle de mauvais bergers qui ne savent pas protéger leurs troupeaux, laissant se disperser toutes leurs brebis et les abandonnant au péril ou aux agressions des méchants. De même, le prophète utilisera d’autres  termes pour signifier la relation d’affection que Dieu entretient avec le peuple d’Israël en dépit de ses infidélités à son égard : « ma vigne (= mon temple), mon héritage (= mon peuple), mon héritage de délices (= Jérusalem), etc. Ainsi que l’explicite H. HOCHNER : « De nombreux bergers ont détruit ma vigne, foulé mon héritage, réduit mon héritage délicieux en désert de désolation ». Les nombreux bergers sont les nombreux rois des peuples païens, venus avec leurs troupeaux, quils ont fait paître dans ma vigne, et quils ont endommagée (voir Jr 6, 3) Les ennemis ont détruit et ruiné le pays, qui est devenu désert et abandonné. Le prophète, dans cette métaphore de la vigne ravagée, utilise par trois fois des termes de destruction. Ce que les troupeaux nont pas détruit par la dent, la été par le piétinement, pour aboutir à tout réduire en désolation ; les champs de mes délices, ma vigne et mon héritage. Le vigneron a son vignoble ravagé, vandalisé, par des bergers étrangers avec leurs troupeaux dévastateurs : cest le châtiment infligé pour les fautes commises. Celui qui a permis ce désastre nest que le vigneron lui même, qui nhésite pas à abandonner sa vigne et à ne plus sen occuper. »


Le texte du RP Thomas ROSICA revisite avec une grande simplicité cette métaphore du berger qui sera reprise par Jésus lui-même qui se déclarera le Bon Berger du peuple d’Israël… et de l’humanité tout entière.

 

Le bon berger amène paix et unité

par le père Thomas ROSICA, c.s.b.

Qu’avons-nous vu et entendu à-propos de la résurrection au cours des dernières semaines? Nous avons vu la nouvelle création, la marche au désert, l’arche traversant les eaux, de verts pâturages, le jardin d’un amoureux, le temple céleste, la ville qui attend depuis longtemps notre retour: la Nouvelle Jérusalem. Vivre en ressuscité signifie alors d’être baptisés et re-créés en Jésus, venir à la table, survivre le déluge, entendre la voix du berger, être le bien-aimé de Dieu, être l’héritier du trône, prêtre du temple et citoyen de la cité céleste.
En ce quatrième dimanche de pâques, nous retrouvons le Bon Berger qui connaît intimement son troupeau. Jésus s’appuie sur l’une de ses métaphores préférées pour nous faire comprendre que nous pouvons avoir confiance en lui.
S’occuper d’un troupeau était l’un des éléments importants de l’économie palestinienne au temps de la bible. Dans l’ancien testament, Dieu est appelé le Berger d’Israël qui va devant le troupeau, le guide (Ps 22, 3), le mène vers la nourriture et l’eau (Ps 22, 2), le protège et porte ses petits (Is 40, 11). Imprégnant ainsi la piété des croyants, la métaphore démontre que tout le peuple est sous la protection de Dieu. Le Nouveau Testament ne juge pas les bergers autrement : ils connaissent leurs brebis (Jn 10,3), cherchent celle qui s’est égarée (Lc 15, 4ss.), et sont prêts à risquer leur vie pour leur troupeau (Jn 10, 11-12).
Le berger est donc une figure pour représenter Dieu lui-même (Lc 15, 4ss). Jésus connaissait des bergers et éprouvait de la sympathie à leur égard. Le Nouveau Testament ne qualifie jamais Dieu de berger et c’est seulement dans la parabole de la brebis perdue que l’auteur établit la comparaison (Lc 15, 4ss et Mt 18, 12ss). Dieu, comme l’heureux berger de la parabole, se réjouit du pardon et du rétablissement du pécheur. Le choix de l’image du berger reflète clairement le contraste entre l’amour de Jésus pour les pécheurs et le mépris des Pharisiens envers ces derniers. Nous pouvons dire en fait que le récit des disciples d’Emmaüs d’après Luc que nous avons lu la semaine dernière est un aspect de la mission de Jésus qui se continue : la poursuite des disciples entêtés était déjà préfigurée dans la parabole du berger qui va à la recherche de la brebis perdue jusqu’à ce qu’il la retrouve et la ramène au troupeau (15, 3-7).
La métaphore du bon berger est l’une des métaphores les plus belles et les plus fortes de toute la bible : notre Dieu et son Fils sont les bergers qui se soucient de nous, nous connaissent et nous aiment, même dans nos entêtements, nos manques d’écoute et nos doutes. Les anthropologues nous disent que les bergers ont traversé les âges. Ils ont, en fait, établi un pont entre l’ère de la chasse et l’ère de l’agriculture, ou l’ère agraire. C’est pour cette raison que les bergers apparaissent dans les mythes anciens et les récits, comme symbole de l’unité divine entre les éléments opposés.
Les anciens païens ont effleuré là quelque chose que les chrétiens ont réalisé pleinement : Jésus Christ est le grand réconciliateur. C’est Lui le Bon berger qui vient au cœur de chaque grand conflit pour y établir l’unité et la paix. L’expression de l’évangile de Jean qualifiant Jésus de ‘Bon Berger’ nous invite à porter un regard attentif sur la racine grecque du mot que nous avons traduit par ‘bon’. En fait, l’expression du Nouveau Testament en grec qualifie le berger est beau et noble. Sa noblesse et sa beauté extérieures reflètent une réalité intérieure de beauté et de noblesse.
Aujourd’hui, que Jésus notre Bon Berger nous guide vers ces pâturages de paix et de joie. Lorsque nous suivons le Seigneur Ressuscité et écoutons sa voix, la bonté et la bienveillance nous suivrons et nous pourrons ainsi vivre à jamais dans sa demeure.



 
PSAUME 22 (23), 1-6
1 Le Seigneur est mon berger:
je ne manque de rien.
2 Sur des prés d'herbe fraîche,
il me fait reposer.
Il me mène vers les eaux tranquilles
3 et me fait revivre;
il me conduit par le juste chemin
pour l'honneur de son nom.
4 Si je traverse les ravins de la mort,
je ne crains aucun mal,
car tu es avec moi,
ton bâton me guide et me rassure.
5 Tu prépares la table pour moi
devant mes ennemis;
tu répands le parfum sur ma tête,
ma coupe est débordante.
6 Grâce et bonheur m'accompagnent
tous les jours de ma vie;
j'habiterai la maison du Seigneur
pour la durée de mes jours.
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DEUXIEME LECTURE - Ephésiens 2, 13 - 18
Frères,
13 Vous qui autrefois étiez loin du Dieu de l'Alliance,
vous êtes devenus proches par le sang du Christ.
14 C'est lui, le Christ, qui est notre paix :
des deux, Israël et les païens, il a fait un seul peuple ;
par sa chair crucifiée,
il a fait tomber ce qui les séparait, le mur de la haine,
15 en supprimant les prescriptions juridiques de la loi de Moïse.
Il voulait ainsi rassembler les uns et les autres en faisant la paix,
et créer en lui un seul Homme nouveau.
16 Les uns comme les autres, réunis en un seul corps,
il voulait les réconcilier avec Dieu par la croix :
en sa personne, il a tué la haine.
17 Il est venu annoncer la bonne nouvelle de la paix,
la paix pour vous qui étiez loin,
la paix pour ceux qui étaient proches.
18 Par lui, en effet, les uns et les autres,
nous avons accès auprès du Père,
dans un seul Esprit.
Paul, apôtre de la reconciliation des Juifs et des païens entre eux et avec Dieu. Nous savons tous que c’est l’un des axes fondamentaux de son apostolat : en effet, il consiédère comme une réalité déjà acquise chez les Juifs comme chez les Païens la résurrection et le triomphe céleste des chrétiens, c’est-à-dire de ceux qui ont été unis au Christ par le baptême de l’Esprit. Ce projet, selon lui, s’inscrit dans une tradition qui a été initiée depuis les temps anciens. Ainsi, les alliances successives que Dieu a conclues avec Abraham, Isaac, Jacob, Moïse, David et bien d’autres encore contenaient déjà la promesse du salut messianique. Le Christ, premier-né d’entre les morts, a réconcilié par la croix tous les peuples des croyants. Réunis en un seul corps, il nous élève au rang d’enfants de Dieu et nous donne en héritage  la paix, sa paix.
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"Reposez-vous un peu" … Ces mots nous indiquent combien Jésus était soucieux de la santé physique et morale de ses disciples. Il les connaissait si bien pour leur proposer de se poser un peu, à l'écart de la foule pour reprendre des forces. Pour la plupart, les disciples sont des gens plutôt solides, costauds, des travailleurs durs à l'ouvrage: on ne se hasarde pas en pleine mer, on ne remonte pas un filet rempli des poissons dans une barque ballotée par la tempête si l'on n'a pas de courage à toute épreuve. Pourtant, Jésus leur demande de se poser.
Très souvent, dans nos propres vies, nous ne prenons pas assez le temps de faire des pauses pour nous ressourcer physiquement et spirituellement pour nous être plus forts et reprendre nos occupations. Il ne s'agit pas simplement de vacances instituées, comme c'est la période actuellement; il est question de ces moments de retraite pour se lire de l'intérieur et chercher de Dieu le sens et la lumière pour continuer la route. Mais soyons lucides: il ne s'agit pas de se couper du monde, au contraire ! De toutes les façons, le monde est toujours là qui nous réveillera sans cesse de ses sollicitations multiples et variées. Ou que ses faims sont toujours là qui attendent de notre générosité et de notre humanité. Jésus lui-même en a fait l'expérience dans l'extrait de l'Évangile ci-après.


ÉVANGILE - Marc 6, 30 - 34
Après leur première mission,
30 les apôtres se réunissent auprès de Jésus,
et lui rapportent tout ce qu'ils ont fait et enseigné.
31 Il leur dit:
« Venez à l'écart dans un endroit désert,
et reposez-vous un peu. »
De fait, les arrivants et les partants étaient si nombreux
qu'on n'avait même pas le temps de manger.
32 Ils partirent donc dans la barque, pour un endroit désert, à l'écart.
33 Les gens les virent s'éloigner et beaucoup les reconnurent.
Alors, à pied, de toutes les villes,
ils coururent là-bas et arrivèrent avant eux.
34 En débarquant, Jésus vit une grande foule.
Il fut saisi de pitié envers eux
parce qu'ils étaient comme des brebis sans berger.
Alors, il se mit à les instruire longuement.
 




Pour prolonger la compréhension de cet extrait de l’Évangile de Marc, je vous propose ce texte de Bernadette ESCAFFRE paru dans la Revue Cahier Évangile n° 145 en Septembre 2008 (p. 47-49) qui est une méditation du texte pendant de Jean.

La métaphore du berger et des brebis est fréquente dans la Bible. Dieu est présenté comme le berger qui a conduit son troupeau à travers le désert (Ps 77,21 ; 78,52) qui prend soin de chaque personne (Ps 23). Les prophètes vont critiquer les responsables du peuple qui ne s’occupent pas des brebis, mais les exploitent (Ez 34).
L’espérance des temps messianiques est associée avec la venue d’un berger fidèle à Dieu. Les paroles de Jésus se base sur cette espérance, et le don de la vie de la part du pasteur rappelle David qui risquait sa vie pour sauver les brebis (1S 17,34-35).

On peut proposer une division du texte différente de celle du Lectionnaire. Le discours de Jésus est formé d’une première partie (v. 1-6) qui parle en général du troupeau, du brigand et du portier. Cette partie se termine au v. 6 sur l’incompréhension de l’auditoire. Ensuite s’enchaînent deux sections en " je " : dans la première, Jésus se présente comme la porte (v. 7-10), et dans la deuxième, comme le berger (v. 11-18).
1) Le discours de Jésus commence de façon négative : celui qui ne passe pas par la porte est " un voleur et un bandit ". La pensée avance par opposition : celui qui entre par la porte est alors identifié comme le berger des brebis. Puis Jésus précise la relation personnelle qui les unit : les brebis écoutent, le berger les connaît " chacune par son nom ". Il marche devant elles et elles le suivent. Le berger n’est pas un négociant d’animaux.
2) Pour parler de la bergerie, Jean utilise le mot " cour " (grec " aulê "). Dans la Septante, traduction grecque de la Bible, ce terme désigne la cour du Temple (1R 6,36, etc.) et celle de la Tente de la réunion du désert (Ex 27,9, etc.). Un rapport s’établit donc avec le lieu même où Jésus se trouve avec ses auditeurs. Au-delà de l’image bucolique, on aurait donc l’image du Temple, et Jésus se présenterait non seulement comme le berger des " brebis ", mais aussi comme le gardien et protecteur des fidèles et comme la porte qui donne accès au Temple. Sa dénonciation des voleurs et brigands s’adresserait ainsi aux responsables religieux.
3) Devant l’incompréhension des auditeurs (v. 6), Jésus reprend son discours pour l’expliciter par les métaphores de la porte (v. 7) et du bon berger (v. 11), qui ne peuvent s’appliquer à personne d’autre que lui-même.
4) Jésus qualifie de voleurs ceux qui sont intervenus avant lui. Cette affirmation ne vise pas Abraham, Moïse, David, Isaïe, etc. Aussitôt, il précise que celui qui passe par lui sera sauvé, aura la vie et même " en abondance ". Ici, il révèle donc que lui seul peut conduire à la vie de la même manière qu’ailleurs il se dévoile comme le Fils qui transmet ce qu’il a reçu du Père. Tout autre personne qui se présenterait comme la porte d’accès à Dieu, à la place de Jésus, ne peut être qu’un " voleur ".
5) Le berger ne reçoit pas le qualificatif de " vrai " comme c’est le cas pour la lumière (Jn 1,9), le pain (6,32) ou la vigne (15,1), mais celui de " bon " (grec " kalos "). Cet adjectif signifie qu’il remplit pleinement son rôle : celui de garder les brebis en vie et de les défendre de tous les dangers. Le " bon " berger n’est pas un gardien rémunéré avec pour objectif de rendre en bon état une marchandise ; il a une relation personnelle avec chaque brebis. Il les connaît, elles le connaissent. Il y a entre elles et lui la même relation qu’entre lui et son Père.


24/07/2012

« Dans le Christ, vous aussi, vous avez écouté la parole de vérité,
la bonne nouvelle de votre salut »


Dimanche 15 juillet


Chers amis, bonjour !


Ce dimanche 15 juillet, la liturgie nous proposé trois textes qui prolongent la thématique du prophète, de l’envoyé de Dieu investi d’une mission particulière : celle d’annoncer la Parole de Dieu à ses frères, de les «inquiéter» lorsqu’ils se laissent aller dans le train-train quotidien, dans la facilité et la commodité du plaisir et de l’insouciance. Or tous ces prophètes ont ceci de commun qu’ils ont été appelés, choisis par le Seigneur lui-même. Oui, c’est Dieu qui choisit, qui fait le premier pas…



• Première Lecture - Amos 7, 12 - 15
12 Amazias, prêtre de Béthel, dit au prophète Amos :
« Va-t-en d'ici avec tes visions,
enfuis-toi au pays de Juda ;
c'est là-bas que tu pourras gagner ta vie
en faisant ton métier de prophète.
13 Mais ici, à Béthel, arrête de prophétiser ;
car c'est un sanctuaire royal,
un temple du royaume. »
14 Amos répondit à Amazias :
« Je n'étais pas prophète
ni fils de prophète ;
j'étais bouvier, et je soignais les figuiers.
15 Mais le SEIGNEUR m'a saisi quand j'étais derrière le troupeau,
et c'est lui qui m'a dit :
Va, tu seras prophète pour mon peuple Israël. »

• Contexte d’émergence de la vocation prophétique d’Amos
Dans le groupe de prophètes dits postérieurs dans lequel on compte Isaïe, Jérémie et Ézeéchiel, Amos fait partie d’un sous-groupe de douze prophètes avec Osée, Michée, Sophonie, Nahum, Habaquq, Aggée, Zacharie, Malachie, Abdias, Joël et Jonas. Amos était un simple berger totalement étranger au cercle des prophètes. Or Yahvé le prit (le saisit derrière son troupeau) et l’envoya prophétiser à Israël, essentiellement à Béthel (littéralement «la maison de Dieu») dans le sanctuaire schismatique. Son ministère fut très bref puisque rapidement il fut expulsé d’Israël. Il regagna alors ses terres natales. Bethel est situé dans le Royaume du Nord qui, sous le règne de Jéroboam, s’enrichit, se développe et s’étend considérablement. Or l’opulence des uns côtoie la misère de la grande majorité et les apparats des rites religieux cachent difficilement l’hypocrisie et l’insincérité des membres d’une société corrompue. Il condamne Israël au nom de Dieu et annonce le châtiment de ce dernier pour tous ceux qui  ne s’engagent pas dans une justice morale et une foi véritable, et comme du roc, solide contre toute épreuve. Ses paroles sont dures, rudes ; elles annoncent l’imminence du «Jour de Yahvé» (c’est la première fois que cette expression apparaît),  un jour non pas de lumière mais de ténèbres, un jour de châtiment qui viendra de la main armée d’un peuple voisin. Mais Amos ne ferme pas l’horizon du message de Yahvé qui est une parole d’espérance pour tous ceux qui se convertissent. Car rien n’est perdu définitivement aux yeux de Yahvé tout-puissant et tout miséricordieux.
• L’extrait de ce dimanche
Dans l’extrait de cette troisième vision d’Amos, Amasias (le prêtre de Béthel) qui considère Amos comme un petit prophète de carrière (c’est-à-dire qui vivote de ses divinations) et qui, de surcroît, médit sur le roi Jéroboam (car voici ce que rapporte Amasias au roi : Amos dit que «Jéroboam périra par l’épée, et Israël sera reléguée en exil loin de son pays»). Tel est le motif (en réalité le prétexte) de l’éloignement d’Amos. Amos n’est pas un prophète «professionnel» ni le continuateur d’une activité exercée en famille ; il a été choisi par Dieu et reçoit donc sa légitimité de sa seule puissance et non de la volonté des hommes.
Du « Jour de Yahvé » : Amos exhorte les enfants d’Israël à se convertir vers Yavhé non pas en changeant de personnalité du tout au tout, mais orientant différemment leurs cœurs, en les tournant vers lui avant que survienne le «Jour de Yahvé». A ce propos, si pour Israël, ce «Jour de Yahvé» a toujours annoncé une intervention forcément favorable de Dieu à son égard (car il est confiant en sa prérogative de peuple choisi), pour Amos ce jour est un jour de colère de Dieu contre Israël endurci dans son péché. Telle est la conception prophétique de ce Jour. Pendant l’exil, il deviendra Jour d’espérance, le début de la restauration d’Israël, le Jour du jugement qui assurera le triomphe des justes et la ruine des pécheurs.

 
• Psaume 84 (85), 9-10, 11-12, 13-14
9 J'écoute : que dira le SEIGNEUR Dieu ?
Ce qu'il dit, c'est la paix pour son peuple.
10 Son salut est proche de ceux qui le craignent,
et la gloire habitera notre terre.

11 Amour et vérité se rencontrent,
justice et paix s'embrassent ;
12 la vérité germera de la terre
et du ciel se penchera la justice.

13 Le SEIGNEUR donnera ses bienfaits,
et notre terre donnera son fruit.
14 La justice marchera devant lui,
et ses pas traceront le chemin.
Jamais le psalmiste n’aura été aussi anthropomorphique à propos de Dieu. En effet, dans ce psaume écrit après le retour de l’exil, le Seigneur est présenté comme un homme, comme quelqu’un qui a plein d’idées et qui peut en changer à loisir. Les attributs divins sont personnifiés et mis en évidence : amour et vérité, justice et paix. En quelque sorte, dans ce psaume sont décrites celles des vertus auxquelles les enfants d’Israël tourné le dos… Aux rapatriés qui rentrent d’exil, cette prière promet la paix messianique jadis annoncée par Isaïe et Zacharie.  «La vérité germera de la terre et du ciel se penchera la justice» : ici encore on peut voir en filigrane l’image de la Vierge qui, telle une terre fertile, portera en elle la plus sainte des semences, le Fils de Dieu qu’elle enfantera… celui-là même qui déclarera être « la vie, le chemin et la vérité », et (cela va de soi) la paix. Cette paix participe de la Gloire de Yahvé qui avait quitté le Temple et la Ville sainte et qui revient dans le Temple restauré. Et c’est cette même paix que plus tard Jésus nous laissera comme le plus précieux héritage : « Je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix ».

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• Deuxième Lecture - Ephésiens 1, 3 - 14
3 Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ.
Dans les cieux, il nous a comblés
de sa bénédiction spirituelle en Jésus-Christ.
4 En lui, il nous a choisis avant la création du monde,
pour que nous soyons, dans l'amour,
saints et irréprochables sous son regard.
5 Il nous a d'avance destinés
à devenir pour lui des fils par Jésus Christ :
voilà ce qu'il a voulu dans sa bienveillance
6 à la louange de sa gloire,
de cette grâce dont il nous a comblés en son Fils bien-aimé,
7 qui nous obtient par son sang la rédemption,
le pardon de nos fautes.
Elle est inépuisable, la grâce
8 par laquelle Dieu nous a remplis de sagesse et d'intelligence
9 en nous dévoilant le mystère de sa volonté,
de ce qu'il prévoyait dans le Christ
pour le moment où les temps seraient accomplis ;
dans sa bienveillance,
10 il projetait de saisir l'univers entier
ce qui est au ciel et ce qui est sur la terre,
en réunissant tout sous un seul chef, le Christ.
11 En lui,
Dieu nous a d'avance destinés à devenir son peuple ;
car lui, qui réalise tout ce qu'il a décidé,
12 il a voulu que nous soyons
ceux qui d'avance avaient espéré dans le Christ
à la louange de sa gloire.
13 Dans le Christ, vous aussi, vous avez écouté la parole de vérité,
la bonne nouvelle de votre salut ;
en lui, devenus croyants,
vous avez reçu la marque de l'Esprit Saint.
Et l'Esprit que Dieu avait promis,
14 c'est la première avance qu'il nous a faite
sur l'héritage dont nous prendrons possession,
au jour de la délivrance finale,
à la louange de sa gloire.
D
ans ce merveilleux texte, Paul décrit comme dans une fresque le projet de Dieu pour les hommes ; il expose et partage avec ses frères le socle fondateur de sa foi, ce qu’on peut appeler « le mystère du salut et de l’Église ». Du ciel s’originent les bénédictions spirituelles, et c’est au ciel qu’elles se réaliseront pour les hommes élevés au rang de « fils de Dieu » et, par la grâce de l’Esprit, rendus dignes de prendre part à la gloire du Christ auprès de son Père. Ces bénédictions sont au nombre de six :
1.L’appel des élus à la vie béatifique déjà commencée à travers l’union mystique des fidèles au Christ glorieux, c’est-à-dire l’amour réciproque de Dieu pour le fidèle et de ce dernier pour Dieu.
2.La filiation divine dont le Christ est la source et le modèle et qui nous donne de mériter sa grâce, c’est-à-dire ses dons sanctifiants. La liberté de Dieu à nous dispenser sa grâce n’a pas d’autre finalité que sa plus grande gloire. Qu’il nous souvienne : pendant la prière eucharistique, nous proclamons « À toi le règne, à toi la puissance et la gloire pour les siècles des siècles ». En effet, Dieu alpha et Oméga est l’origine et la finalité de toute glorification.
3.L’œuvre historique de la rédemption par la sainte croix du Christ Sauveur.
4.La révélation du Mystère, ce « secret » plein de sagesse, longtemps caché en Dieu et aujourd’hui révélé aux hommes : le plan du salut dans son étape suprême qui est la restauration de l’univers tout en entier dans le Christ comme son seul chef.
5.L’élection d’Israël, la « part de Dieu » comme témoin, dans le monde, de l’attente messianique.
6.L’appel des païens à partager le salut autrefois réservé à Israël. Ce partage se réalise par le don de l’Esprit qui ouvre à l’intelligence de ce qui était jusqu’ici impénétrable. Cette connaissance deviendra, à la Parousie, véritable et totale, glorieuse et définitive, pour ceux qui l’auront accueilli corps et sang dans la communion eucharistique et Parole vivante en leurs cœurs.


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• Évangile - Marc 6, 7 - 13
7 Jésus appelle les Douze,
et pour la première fois il les envoie deux par deux.
Il leur donnait pouvoir sur les esprits mauvais,
8 et il leur prescrivit de ne rien emporter pour la route,
si ce n'est un bâton ;
de n'avoir ni pain, ni sac,
ni pièces de monnaie dans leur ceinture.
9 « Mettez des sandales,
ne prenez pas de tunique de rechange. »
10 Il leur disait encore :
« Quand vous avez trouvé l'hospitalité dans une maison,
restez-y jusqu'à votre départ.
11 Si, dans une localité,
on refuse de vous accueillir et de vous écouter,
partez en secouant la poussière de vos pieds :
ce sera pour eux un témoignage. »
12 Ils partirent, et proclamèrent qu'il fallait se convertir.
13 Ils chassaient beaucoup de démons,
faisaient des onctions d'huile à de nombreux malades,
et les guérissaient.


L
’envoi en mission : un moment crucial du parcours de formation des douze. Jésus les « lâche » dans le monde avec tous les risques possibles de rejet, de raillerie, d’agression, de stigmatisation… Pourtant c’est aussi une opportunité pour tester par eux-mêmes l’effet de l’enseignement du Maître sur les populations qu’ils vont rencontrer ; une chance pour vivre en binôme, c’est-à-dire « deux par deux », cette expérience d’ambassadeur de Jésus, d’être en quelque sorte des prophètes, des éclaireurs des temps nouveaux. Jésus leur donne le pouvoir de chasser les démons et de guérir les malades, et les envoie avec des recommandations particulières :
-  N’emporter que le strict nécessaire : pas de pain, ni de sac, ni de pièces de monnaie dans la ceinture ; justes des sandales, mais pas de tunique de rechange. Une seule chose est tolérée, à savoir « un bâton » (de pèlerin »). Cette tradition sera perpétuée à travers les siècles lors de certains pèlerinages comme à Saint Jacques de Compostelle.
- Ne pas se formaliser d’un accueil éventuellement médiocre : passer son chemin en secouant ses sandales en signe de réprobation à l’encontre des habitants de maisons inhospitalières.
-  Ne pas se laisser impressionner par des paroles méchantes et ne pas répondre à la persécution par l’invective mais plutôt afficher sérénité et détermination dans la foi.

Toutes ces recommandations nous sont adressées aussi à nous autres apôtres et missionnaires des temps modernes. De nos jours, les agressions, les persécutions, les tribulations sont nombreuses sur ceux qui prennent leur bâton de pèlerin pour aller porter la Bonne Nouvelle sur leurs lieux de travail, dans la rue auprès de gens laissés pour compte, sur les espaces publics, partout où des hommes et des femmes se trouvent pris dans des questionnements lourds sur le sens de leur existence, de la mort, de la misère, de la haine des uns pour les autres, des discriminations de toutes natures… mais aussi sur les espaces de liberté (les médias, l‘école…), là où se forment et se nourrissent les opinions. Oui, partout dans ces espaces, Jésus nous missionne chaque jour pour témoigner de son Amour miséricordieux. Porter la Parole de Jésus est aujourd’hui un pari de plus en plus osé. Des jeunes s’engagent, d’autres s’esquivent, arguant que c’est un propos inadapté aux défis de notre temps, un « opium » (comme disait Marx). Or si l’annonce de la Parole de Jésus est l’objet d’attaques et de mépris de la part de certains, c’est bien parce que cette Parole contient un message révolutionnaire aujourd’hui, demain et toujours : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. Celui qui croit en lui échappe au Jugement, celui qui ne veut pas croire est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. Et le Jugement, le voici : quand la lumière est venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises. En effet, tout homme qui fait le mal déteste la lumière : il ne vient pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne lui soient reprochées ; mais celui qui agit selon la vérité vient à la lumière, afin que ses œuvres soient reconnues comme des œuvres de Dieu. » (Jn 3, 16-21)