21/07/2012

"Qui regarde vers lui resplendira !"


Chers amis, bonjour !

Le week end du 8 juillet 2012, j’étais en Isère pour une rencontre spirituelle avec des frères et sœurs de la Communauté africaine de Grenoble. Des moments de fraternité intense et d’échanges d’expériences. Et le dimanche, je me suis rendu tout à fait par hasard à la Cathédrale de Grenoble car je recherchais une église pour prier. Grande fut ma surprise en descendant du tramway de croiser des jeunes habillés d’un tee-shirt bleu arborant bien évidence cette bonne parole : « Dieu est Amour ». Très vite j’ai compris en lisant les différents prospectus qu’ils me tendaient qu’ils s’étaient engagés pour la semaine de la Bonne Nouvelle en Isère. Ce courage de se montrer et d’afficher sa foi m’a profondément touché et m’a alerté sur le risque que court notre Église de s’éteindre, ou plutôt de vivre sa foi en sourdine sous le faux (et si commode) prétexte que nous sommes dans une société laïque qui ne tolère pas des manifestations si vivantes de ses croyances religieuses.
Ce tee-shirt était pour moi comme une signature et un signe à la foi. Signature d’un engagement visible aux autres sans les agresser, et signe d’une prise de conscience qui ré-émerge et s’affirme de plus en plus chez les jeunes, c’est-à-dire ceux qui dès aujourd’hui sont en charge de faire vivre cette Église. J’ai vraiment passé un moment agréable pendant la célébration eucharistique rythmée par des chants vifs et mélodieux que chantait toute l’assistance… une véritable communion nourrie par une homélie qui avait le mérite de mettre en regard les textes liturgiques du jour de notre vie personnelle et collective.
C’est au sortir de cette célébration que j’ai pris ces quelques photos particulièrement avec le Père vicaire de l’évêché de Grenoble qui avait célébré la messe avec six autres prêtres.

 À l'entrée de la cathédrale une banderole sur laquelle était écrite cette parole : « Qui regarde vers lui resplendira ! »

Ici, à la sorte de la messe, en compagnie du RP Vicaire de l'archevêché de Grenoble

Devant le parvis de la cathédrale, un moment d'échange entre chrétiens.
On reconnaît les jeunes missionnaires de la Semaine de la Bonne Nouvelle

 _____________________________________________________________________


 Voici mes méditations sur les trois lectures que la liturgie nous a proposées ce dimanche 8 juillet. Elles parlent toutes de la persévérance de celles et ceux qui s'engagent dans toute mission d'évangélisation en dépit des embûches, des calomnies et tribulations de toutes sortes. Ézéchiel est choisi par le Seigneur Dieu pour rappeler aux enfants d'Israël qu'il ne les abandonne pas jusque dans leur exil. Paul magnifie la "grâce du Seigneur" qui habite celui qui reconnaît en toute humilité sa messianité et œuvre sous sa gouverne. Jésus lui-même, qui ne sera pas reconnu par les habitants de son propre village natal, Nazareth, ne se découragera pas dans sa mission principale d'enseignement et d'annonce de sa Bonne Nouvelle.


Première Lecture - Ézéchiel 2, 2 - 5
2 L'Esprit vint en moi,
il me fit mettre debout,
et j'entendis le Seigneur qui me parlait ainsi :
3 « Fils d'homme je t'envoie vers les fils d'Israël,
vers ce peuple de rebelles qui s'est révolté contre moi.
Jusqu'à ce jour, eux et leurs pères
se sont soulevés contre moi,
4 et les fils ont le visage dur,
et le cœur obstiné.
C'est à eux que je t'envoie, et tu leur diras :
Ainsi parle le Seigneur Dieu...
5 Alors, qu'ils écoutent ou qu'ils refusent,
- car c'est une engeance de rebelles, -
ils sauront qu'il y a un prophète au milieu d'eux. »


On est surpris par la dureté des paroles du Seigneur à propos de son peuple. Il le traite de « d’engeance de rebelles » aux « cœurs obstinés » qui arborent un « visage dur ». Mais en réalité, il faut se replacer dans le contexte de cette manifestation de l’Esprit de Dieu à celui qu’il choisit comme son messager auprès des enfants d’Israël en exil à Babylone.
Ce texte, qui est un court extrait de la deuxième « vision » d’Ézéchiel, celle du Livre, vient à la suite de celle du « char de Yavhé » dont le sens général peut être résumé ainsi : Yavhé n’est pas un Dieu immobile, planté en un seul lieu, Jérusalem. Le Dieu d’Israël est un Dieu dont la toute puissance réside dans sa mobilité spirituelle, cette force par laquelle il suit ses fidèles jusque dans leur exil. Exil géographique, comme c’est le cas ici. Exil intérieur lorsqu’une personne perd ses repères et a du mal à se retrouver et à avancer. Exil social également, toutes les fois que des pauvres, des faibles - veuves, orphelins, mendiants, étrangers, etc. – sont l’objet de discriminations, de violences et d’exclusion. Dans tous ces cas de figure, le Seigneur Dieu est présent pour secourir et réconforter… il se fait proche car il est un Dieu aimant.
Cette seconde vision s’intercale au milieu de la première qui se continue plus loin (3, 12). En réalité, cette vision du livre est probablement la première d’Ézéchiel, celle de sa vraie vocation de prophète. Notons l’expression « fils d’homme » que le Seigneur Dieu emploie pour interpeler son prophète. Propre à Ézéchiel, elle souligne la distance entre Dieu et l’homme. A contrario, plus tard chez Daniel, cette même expression deviendra un titre messianique que reprendra à son compte Jésus lui-même.
Il faut croire que certains enfants d’Israël pensaient avoir laissé Yavhé à Jérusalem, et qu’une fois si loin de son Temple ils pouvaient se laisser aller à leurs faiblesses, dont  l’idolâtrie. Jamais prophète n’aura reçu comme mission explicite d’aller parler à ses frères, de leur rapporter les paroles mêmes de Yavhé : « Fils d’homme, toutes les paroles que je te dirai, garde-les dans ton cœur, écoute de toutes tes oreilles, et va-t’en vers les exilés, vers tes compatriotes, pour leur parler. Tu leur diras : “Ainsi parle le Seigneur Yavhé“, qu’ils écoutent ou qu’ils n’écoutent pas » (3, 10-11).
Le prophète rappellera sans cesse les trahisons, les infidélités du peuple d’Israël depuis des temps anciens. Pourtant, en dépit de tout cela, le Seigneur Dieu leur a toujours maintenu sa fidélité et sa miséricorde parce qu’il avait un grand dessein pour Israël, un projet universel d’amour et de paix pour tous les hommes de la terre.

Et lorsqu’ils reviennent sur la terre des ancêtres, les exilés ne sont pas naturellement accueillis à bras ouverts. En effet, ceux qui avaient  pris le risque de rester se sont établis, implantés aux côtés des envahisseurs, des conquérants. Or ils avaient tout de même la protection de Cyrus, le nouveau maître qui avait conquis Babylone et avait décidé de les renvoyer chez eux, à Jérusalem avec l’ordre de rebâtir leurs maisons et leur Temple. Cela survient au moment de la reconstruction du Temple détruit par Nabuchodonosor. A la tête du groupe rentrant de l’exil, un certain Zorobabel dont très rapidement ceux qui étaient restés décrivent le caractère excessif et trop exigeant (quant aux garanties qu’il réclamait pour leur participation aux travaux de reconstruction). Un élément perturbateur à la tête des revenants ? Cela n’augure pas de jours paisibles… Alors, les fondations à peines posées, la construction du Temple est suspendue sine die. Elle ne reprendra effectivement que vers 518, soit vingt après leur retour à Jérusalem.


 
Psaume 122 (123), 1-2. 3-4
1 Vers toi j'ai les yeux levés,
vers toi qui es au ciel.
2 Comme les yeux de l'esclave
vers la main de son maître.

Comme les yeux de la servante
vers la main de sa maîtresse,
nos yeux, levés vers le SEIGNEUR notre Dieu,
attendent sa pitié.

3 Pitié pour nous, SEIGNEUR, pitié pour nous :
notre âme est rassasiée de mépris.
4 C'en est trop, nous sommes rassasiés
du mépris des orgueilleux.


C’est dans ce contexte d’incertitude, de méfiance à leur égard que les exilés entonnent ce psaume dans lequel ils se souviennent de leur esclavage en terres lointaines et de la fidélité de Dieu durant cette épreuve. Par ce chant, ils expriment leur adoration et leur confiance totale en Dieu leur salut.
Ainsi, les expressions « lever les yeux (…) au ciel » est souvent utilisée dans divers psaumes pour manifester leur fidélité au Dieu Tout-Puissant qui les avait sortis d’Égypte pour les mener jusqu’à la Terre promise. Cette reconstruction du Temple est aussi le signe de la constance de l’engagement du peuple d’Israël à la gloire de son Dieu en dépit des tribulations, des humiliations et du mépris des autres peuples. Le Seigneur prend pitié car lui seul tend la main qui sauve, qui soutient et qui console.



Deuxième Lecture - Deuxième Lettre de Paul aux Corinthiens 12, 7 - 10
Frères,
7 les révélations que j'ai reçues
sont tellement exceptionnelles
que, pour m'empêcher de me surestimer,
j'ai dans ma chair une écharde,
un envoyé de Satan qui est là pour me gifler,
pour m'empêcher de me surestimer.
8 Par trois fois,
j'ai prié le Seigneur de l'écarter de moi.
9 Mais il m'a déclaré :
"Ma grâce te suffit :
ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse."
Je n'hésiterai donc pas à mettre mon orgueil dans mes faiblesses,
afin que la puissance du Christ habite en moi.
10 C'est pourquoi j'accepte de grand cœur pour le Christ
les faiblesses, les insultes, les contraintes,
les persécutions et les situations angoissantes.
Car, lorsque je suis faible,


« Ma grâce te suffit : ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse ». Ce mot du Christ donnera à Paul cette foi presque insolente dont il témoignera devant les prêtres et l’assemblée dans un moment crucial d sa mission : « Qui nous séparera du Christ ? La tristesse ? L’angoisse ? La persécution ? La faim ? Le dénuement ? Le danger ? Le glaive ?… Oui, Paul est viscéralement convaincu que le Christ est avec lui et que son Esprit Saint l’inspire et le guide dans toutes ses entreprises. Lui aussi vit une sorte d’exil au milieu des siens qu’il essaie d’évangéliser. A Paul le persécuteur des chrétiens, les grecs rappellent ses atrocités… et lui-même s’en culpabilise sans cesse. Et pourtant, c’est le Christ qui l’a choisi pour être son apôtre, lui le bandit des grands chemins. Ni Ézéchiel ni Paul  ne cherchent à s’enorgueillir des révélations reçues du Seigneur car elles sont des moments privilégiés qui sont pour eux sources de vitalité, de réconfort. Finalement, notre faiblesse ne doit pas être une entrave mais un puissant levier pour la continuation de notre mission d’évangéliser. Le seul indicateur qui compte (pour parler le langage de « gestionnaires »), c’est la grâce dont le Seigneur nous comble et nous entoure en toute simplicité, en toute humilité.


 
Évangile - Marc 6, 1 - 6
Jésus est parti pour son pays,
et ses disciples le suivent.
2 Le jour du sabbat,
il se mit à enseigner dans la synagogue.
Les nombreux auditeurs, frappés d'étonnement, disaient :
« D'où cela lui vient-il ?
Quelle est cette sagesse qui lui a été donnée,
et ces grands miracles qui se réalisent par ses mains ?
3 N'est-il pas le charpentier, le fils de Marie,
et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon ?
Ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ? »
Et ils étaient profondément choqués à cause de lui.
4 Jésus leur disait :
« Un prophète n'est méprisé que dans son pays,
sa famille et sa propre maison. »
5 Et là il ne pouvait accomplir aucun miracle ;
il guérit seulement quelques malades
en leur imposant les mains.
6 Il s'étonna de leur manque de foi.
Alors il parcourait les villages d'alentour en enseignant.


Rares sont les prophètes qui ont été accueillis à leur juste renommée chez eux, telle est souvent le revers de la médaille du succès. Car Jésus connaît beaucoup de succès dans les autres contrées qu’il visite : des foules innombrables se pressent autour de lui pour obtenir une guérison souvent spectaculaire (un aveugle qui voit, un boiteux ou un paralytique qui marche, un sourd qui entend, un mort qui revit, etc.). Là, il revient chez lui, dans son village et les habitants de Nazareth sont aveugles, impuissants à faire le saut de la foi ; et même si certains sont subjugués par la sagesse de son enseignement, la plupart voient toujours en Jésus le villageois qu’ils ont vu grandir : « N'est-il pas le charpentier, le fils de Marie, et le frère de Jacques, de José, de Jude et de Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ? » Comme Ézéchiel, il n’est pas écouté par les siens. Jésus sent leur manque de foi, y compris de ceux qu’il guérit de leur maladie en leur imposant les mains. Mais il est précisé qu’il ne fait aucun miracle.
Incapables de reconnaître en lui le Messie de Dieu, les Nazaréens ne franchissent pas les barrières qui les empêchent de placer Dieu au centre de leur vie de tous les jours. Personne ne se détache des caractéristiques humaines de Jésus pour saisir sa divinité comme si le divin devait toujours être époustouflant, extraordinaire… comme si le divin était du seul ressort de personnes bien nées. Car Jésus est  d’origine sociale trop modeste pour imaginer un seul instant que Dieu puisse se manifester à travers une si banale apparence. Les Nazaréens passent à côté de l’essentiel : eux qui ont vu naître et grandir ce Jésus dont Jean le Baptiste disait qu’il est le Messie même ont les yeux fermés à la lumière de la foi. Mais cela ne décourage pas Jésus qui continue son ministère en annonçant sa Bonne Nouvelle dans les villages d’alentour.
Les disciples qui accompagnent Jésus assistent à cet accueil distant et presque froid des Nazaréens à leur ressortissant. Ils comprennent alors qu’eux aussi vivront de telles situations lorsqu’ils seront en mission, partout où l’Esprit et les événements les guideront. Rejetés, contestés, minimisés… ils le seront souvent ; mais cela ne les empêchera pas d’annoncer la Parole de Celui en qui ils ont placé leur foi, car « sa grâce seule leur suffit ».

Aucun commentaire: