30/04/2008

Et moi, je suis avec vous tous les jours
jusqu'à la fin du monde…

Evangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu (Mt 28, 16-20)

28
16i Au temps de Pâques, les onze disciples s’en allèrent en Galilée, à la montagne où Jésus leur avait ordonné de se rendre.
17 Quand ils le virent, ils se prosternèrent, mais certains eurent des doutes.
18 Jésus s'approcha d'eux et leur adressa ces paroles : « Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur la terre.
19 Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ;
20 et apprenez-leur à garder tous les commandements que je vous ai donnés. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde. »
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Quelques repères pour notre méditation

«Vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie et jusqu’aux extrémités de la terre … Après ces paroles, ils le virent s’élever et disparaître à leurs yeux dans une nuée…»

Chacun de nous a encore en mémoire les images de l’Ascension du Seigneur reçues dans notre tendre enfance au catéchisme. Elles sont nombreuses les œuvres picturales qui montrent Jésus disparaissant au milieu d’une nuée, emporté comme par aspiration dans l’azur du ciel, escorté par une cohorte d’angelots jouflus… Quelque romantiques que soient ces souvenirs, il faut pourtant se convaincre que les données de la foi sont d’un autre ordre, car l’Ascension du Christ n’est pas un fait matériel perceptible par notre sensiblité spatio-temporelle. Elle est fondamentalement liée à la résurrection par laquelle le Fils bien-aimé rejoint la vie qu’il avait auprès du Père avant son incarnation et sa mission de rédemption. Le Christ est glorifié par sa victoire sur la mort. L’ascension, c’est pour ainsi dire le couronnement, lélévation, la distinction suprême du Christ pour son œuvre de salut.

Dans le texte, cette Ascension est décrite avec des effets de langage chargés de sens :
- la nuée : elle évoque, dans la bible, la présence de Dieu au milieu de son peuple (pour mémoire, Dieu parle à Moïse au Mont Sonaï à travers la nuée — C’est cette même nuée qui guide le peuple d’Israël dans sa marche dans le désert) ;
- la montagne de Galilée : dans la Bible, la montagne est le lieu par excellence où l’homme, au bout d’une longue quête et d’un effort soutenu, rencontre enfin son Dieu (C’est au Mont Horeb que Moïse rencontre Dieu et reçoit de Lui mission de libérer ses frères) ;
- la Galilée, «terre des nations» : plus que sa localisation géographique, elle suggère la dimension universelle de l'événement. «De toutes les nations faites des disciples. Baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Et moi je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps…».

Désormais, Jésus-Christ mort et ressuscité est au-dessus de tout : sa glorification est universelle, c’est-à-dire qu’elle englobe le ciel et la terre, les morts et les vivants… pour l’éternité. Lorsque dans le Credo nous affirmons «Il est monté au ciel, il est assis à la droite du Père…», nous signifions par là le mouvement par lequel il redéfinit sa présence au milieu de nous. Par son départ, en effet, Jésus reste présent au milieu des siens, il s’agit d’une autre présence, d’une présence nouvelle.
En réalité, l’ascension est moins un départ qu’un effacement, d’un passage de relai ou de témoin. Il passe la main à ses disciples à qui il donne une feuille de route très explicite : «Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit». L’effacement du Christ sur terre marque donc le commencement de la vie de l’Eglise. Désormais, chaque chrétien, habité par l’Esprit du Christ, doit témoigner de son message. Chaque chrétien, avec ses frères en Eglise, devient corps du Christ, c’est-à-dire présence du Christ au monde, à notre monde. Fini le temps de l’enfance de la foi, fini le temps du tâtonnement… Voici venu le temps de la maturité chrétienne dont l’Esprit Saint est l’artisan et le garant.

«Je suis avec vous jousqu’à la fin des temps…» L’ascension du Seigneur, aussi paradoxal que cela puisse paraître, est une source de joie. Parti, le Christ est là «au cœur de nos vies». Ce nouveau mode de présence, nous n’avons pas à l’inventer puisque Jésus lui-même nous l’a révélé : par sa parole, par la prière, par les sacrements, lieux et signes vivants de sa présence eucharistique, par exemple.

L’ascension, fête d’espérance, du renouveau, de l’accomplissement… c’est à nous de la vivre désormais dans notre vie renouvelée en Christ.


Crédit photo
http://hccl.byu.edu/faculty/HuntsmanE/Rel212eh/236%20Ascension%20of%20Jesus.JPG


De toutes les nations faites des disciples…

Voici les trois premières lectures que l’Eglise nous propose de méditer en ce jour de l’Ascension de notre Seigneur.

Livre des Actes des Apôtres (Ac 1, 1-11)

1
01 Mon cher Théophile, dans mon premier livre j'ai parlé de tout ce que Jésus a fait et enseigné depuis le commencement,
02 jusqu'au jour où il fut enlevé au ciel après avoir, dans l'Esprit Saint, donné ses instructions aux Apôtres qu'il avait choisis.
03 C'est à eux qu'il s'était montré vivant après sa Passion : il leur en avait donné bien des preuves, puisque, pendant quarante jours, il leur était apparu, et leur avait parlé du royaume de Dieu.
04 Au cours d'un repas qu'il prenait avec eux, il leur donna l'ordre de ne pas quitter Jérusalem, mais d'y attendre ce que le Père avait promis. Il leur disait : «C'est la promesse que vous avez entendue de ma bouche.
05 Jean a baptisé avec de l'eau ; mais vous, c'est dans l'Esprit Saint que vous serez baptisés d'ici quelques jours.»
06 Réunis autour de lui, les Apôtres lui demandaient : «Seigneur, est-ce maintenant que tu vas rétablir la royauté en Israël ?»
07 Jésus leur répondit : «Il ne vous appartient pas de connaître les délais et les dates que le Père a fixés dans sa liberté souveraine.
08 Mais vous allez recevoir une force, celle du Saint-Esprit, qui viendra sur vous. Alors vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'aux extrémités de la terre.»
09 Après ces paroles, ils le virent s'élever et disparaître à leurs yeux dans une nuée.
10 Et comme ils fixaient encore le ciel où Jésus s'en allait, voici que deux hommes en vêtements blancs se tenaient devant eux et disaient :
11 «Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Jésus, qui a été enlevé du milieu de vous, reviendra de la même manière que vous l'avez vu s'en aller vers le ciel.»
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Psaume (46, 2-3, 6-7, 8-9)

02Tous les peuples, battez des mains,
acclamez Dieu par vos cris de joie !
03 Car le Seigneur est le Très-Haut, le redoutable,
le grand roi sur toute la terre,

06 Dieu s'élève parmi les ovations,
le Seigneur, aux éclats du cor.
07 Sonnez pour notre Dieu, sonnez,
sonnez pour notre roi, sonnez !

08 Car Dieu est le roi de la terre :
que vos musiques l'annoncent !
09 Il règne, Dieu, sur les païens,
Dieu est assis sur son trône sacré.
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Lettre de saint Paul Apôtre aux Ephésiens (Ep 1, 17-23)

1
17i Frères, que le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père dans sa gloire, vous donne un esprit de sagesse pour le découvrir et le connaître vraiment.
18 Qu'il ouvre votre cœur à sa lumière, pour vous faire comprendre l'espérance que donne son appel, la gloire sans prix de l'héritage que vous partagez avec les fidèles,
19 et la puissance infinie qu'il déploie pour nous, les croyants. C'est la force même, le pouvoir, la vigueur, 20 qu'il a mis en œuvre dans le Christ quand il l'a ressuscité d'entre les morts et qu'il l'a fait asseoir à sa droite dans les cieux.
21 Il l'a établi au-dessus de toutes les puissances et de tous les êtres qui nous dominent, quel que soit leur nom, aussi bien dans le monde présent que dans le monde à venir.
22 Il lui a tout soumis et, le plaçant plus haut que tout, il a fait de lui la tête de l'Église
23 qui est son corps, et l'Église est l'accomplissement total du Christ, lui que Dieu comble totalement de sa plénitude.
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Quelques repères pour notre méditation :

«L’Ascension du Christ n’est pas un voyage dans l’espace, vers les astres les plus lointains ; car, au fond, les astres sont eux aussi faits d’éléments physiques comme la terre. L’Ascension du Christ signifie qu’Il n’appartient plus au monde de la corruption et de la mort qui conditionne notre vie. Elle signifie qu’Il appartient totalement à Dieu. Lui - le Fils éternel - a conduit notre condition humaine aux côtés de Dieu, il a apporté avec lui la chair et le sang sous une forme transfigurée. L’homme trouve une place en Dieu ; à travers le Christ l’être humain a été conduit jusqu’à l’intérieur de la vie même de Dieu.» (Pape Benoît XVI, lors de la prise de possession de sa Chaire au Latran, le 9 mai 2005 à ROME).

• On peut relever dans le premier texte ci-après que, jusqu’à la fin, les apôtres sont encore perplexes ; face aux propos de Jésus («… c’est dans l’Esprit que vous serez baptisés…»), ils veulent être rassurés quant au rétablissement de la royauté en Israël, alors que Lui leur parle du Royaume des Cieux où il sera glorifié par son Père et réciproquement dans la communion de l’Esprit Saint, royaume où nous serons tous glorifiés avec lui. Ce même Esprit Saint qu’il leur promet sans concession. Et lorsque les deux anges interpellent les apôtres, c’est bien pour les appeler à croire en la promesse de Jésus, c'est pour leur signifier que par leurs propres forces (morales ou intellectuelles) ils ne pourront ni saisir ni comprendre la densité et la puissance de la royauté du Christ et du projet divin qu’ils ont désormais la charge de relayer en Eglise et à travers le monde.
«Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Jésus, qui a été enlevé du milieu de vous, reviendra de la même manière que vous l'avez vu s'en aller vers le ciel.» La Galilée est l’espace de la manifestation de Jésus ressuscité dans la gloire, c’est désormais le symbole de l’universalité de la mission des apôtres. Ceux-ci sont sonnés, ils regardent le ciel tout ébahis, mais contrairement aux anges qui accompagnent le Christ dans son ascension, ils n’ont pas encore une connaissance parfaite de la grandeur du Maître et des dons que son Esprit infusera en eux. C’est l’Esprit Saint, en effet, qui éclaire et illumine l’intelligence humaine dans la connaissance des «choses divines». L’apôtre Paul fait justement le lien entre le Christ élevé au-dessus de toutes les créatures du ciel et de la terre, et l’Eglise son accomplissement total. L’appel à la louange et à l’exultation du Seigneur Dieu dans le psaume 46 confirme sa grandeur manifestée par la hauteur de sa puissance et la majesté de sa domination.


24/04/2008

« Si quelqu'un m'aime, mon Père l'aimera
et nous irons demeurer auprès de lui. » (Jn 14, 23)

Nous voici au sixième dimanche de Pâques…

B
onjour !
On ne peut s’empêcher de relever une contradiction, ou plutôt une tension entre le viveau de maîtrise technologique auquel est parvenue l’humanité depuis une cinquantaine d’années — des progrès gigantesques, des domanies aussi divers que la médecine, les nouvelles technologies de l’information et de la commuication, la conquête de l’espace, l’exploration du vivant avec le décodage du génome humain, l'intelligence de l'infiniment grand et de l'infiniment petit, etc. — et le fait qu’à l’orée du troisième millénaire des populations entières souffrent de pandémies de toutes sortes (grippe, sida, malnutrition, paludisme, etc.), de pauvreté, d’exclusion sociale, économique et politique. Même les populations des pays dits « développés » ne sont pas épargnées par des maux caractéristiques de leurs modes de vie : surconsommation alimentaire et énergétique, financiarisation de la vie économique et sociale (tout s’achète!), métro-boulot-dodo, pouvoir d’achat… avec des conséquences immédiatement visibles : chômage, angoisse, stress, explosion des maladiees professionnelles… et radicalisation de l’individualisme. Oui ! le tableau n’est pas noirci à dessein, c’est la réalité. Tout se passe comme si l’homme était en train de perdre tous ses repères sociaux et moraux, et il n’est pas jusqu’à la religion qui ne soit concernée par ces renversements.

Et nous autres chrétiens, qui vivons bien au cœur de ce monde, quelle est notre attitude ? Quel sens donnons-nous à ces bouleversements et comment comptons-nous œuvrer à faire triompher le message du Christ ?

La seconde lecture (Première lettre de saint Pierre Apôtre (1P 3, 15-18) et le passage de l’Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean (Jn 14, 15-21) qui nous sont proposés par l’Eglise en ce sixième dimanche de Pâques, textes que j’ai voulu présenter ensemble ci-après, nous donnent les clés, la feuille de route pour notre agir et vivre ensemble après le départ du Christ : «rendre compte de sa foi et de son espérance», car le Seigneur lui-même nous rassure : je pars, mais «je ne vous laisserai pas orphelins».
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Jean-Paul II : le Pape de l'évangélisation. "N'ayez pas peur!",
aimait-il répéter (souvent aux jeunes). L'engagement missionnaire
était, pour lui, soutenu et nourri par les grâces de l'Espit-Saint

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Première lettre de saint Pierre Apôtre (1P 3, 15-18)

3

15 C'est le Seigneur, le Christ, que vous devez reconnaître dans vos coeurs comme le seul saint. Vous devez toujours être prêts à vous expliquer devant tous ceux qui vous demandent de rendre compte de l'espérance qui est en vous ;
16 mais faites-le avec douceur et respect. Ayez une conscience droite, pour faire honte à vos adversaires au moment même où ils calomnient la vie droite que vous menez dans le Christ.
17 Car il vaudrait mieux souffrir pour avoir fait le bien, si c'était la volonté de Dieu, plutôt que pour avoir fait le mal.
18 C'est ainsi que le Christ est mort pour les péchés, une fois pour toutes ; lui, le juste, il est mort pour les coupables afin de vous introduire devant Dieu. Dans sa chair, il a été mis à mort ; dans l'esprit, il a été rendu à la vie.
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E
vangile de Jésus-Christ selon saint Jean (Jn 14, 15-21)

14
15i À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « Si vous m’aimez, vous resterez fidèles à mes commandements.
16 Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous :
17 c'est l'Esprit de vérité. Le monde est incapable de le recevoir, parce qu'il ne le voit pas et ne le connaît pas ; mais vous, vous le connaissez,
18 parce qu'il demeure auprès de vous, et qu'il est en vous. Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous.
19 D'ici peu de temps, le monde ne me verra plus, mais vous, vous me verrez vivant, et vous vivrez aussi.
20 En ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous.
21 Celui qui a reçu mes commandements et y reste fidèle, c'est celui-là qui m'aime ; et celui qui m'aime sera aimé de mon Père ; moi aussi je l'aimerai, et je me manifesterai à lui. »
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Quelques repères pour notre méditation

Nous savons tous la souffrance que vit un orphelin : il perd ses racines, les premiers repères biologiques, psychologiques et sociaux de son cœur : plus de père ou de mère, c’est-à-dire plus de guide. Or Jésus donnent une assurance, une certitude aux apôtres : vous souffrirez, certes !, vous serez persécutés… mais ces tribulations seront pour vous une grâce parce que vous aurez fait le bien en restant fidèles à mes commandements et en proclamant ma parole : mais oui ! «vous me verrez vivant et vous vivrez aussi !». Vous me verrez, pourrait-on dire en chair et en esprit, lors de mes apparitions et avec les yeux de la foi.

Il est fondamental de se convaincre d’une chose : la résurrection du Christ a totalement transformé l’ordre du matériel et du spirituel ; avec Christ ressuscité, c’est le triomphe de la vie sur la mort, de l’espérance sur l’angoisse. Christ est en nous et nous en lui : il nous a justifiés, c’est-à-dire réconciliés dans le projet divin, et c’est en cela que nous sommes devenus de vrais fils de son Père, notre Père, partageant comme (et avec) lui sa gloire pour l’éternité. Cette réconciliation « par lui, avec lui et en lui » nous rend dignes d’accéder et de nous établir dans la demeure du Père parce que nous serons restés fidèles à ses commandements (au premier rang desquels l’Amour), que nous aurons accueilli son Esprit-Saint (lumière qui nous ouvrira à l’intelligence de ce qui nous est inaccessible et difficile à appréhender aujourd’hui) et que nous aurons la foi et la certitude d’être aimés de Dieu.

Après son départ, sa «disparition de nos yeux humains», Dieu redevient exclusivement Esprit. C’est pourquoi Jésus insiste auprès des apôtres : «Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : c'est l'Esprit de vérité. Le monde est incapable de le recevoir, parce qu'il ne le voit pas et ne le connaît pas ; mais vous, vous le connaissez, parce qu'il demeure auprès de vous, et qu'il est en vous. Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous.» L’apôtre Paul ne dit pas autre chose quand il écrit : «Le Seigneur est esprit, et là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté » (2 Co 3,17)

L’Esprit-Saint est le don de Dieu lui-même, offert aux hommes en abondance et en plénitude. Nos faiblesses nous empêchent de voir le Fils et le Père. C’est donc l’Esprit, défenseur et intercesseur qui illumine à cette fin notre intelligence et nourrit notre foi dans notre quête de Dieu. Lumière de (et dans) nos esprits, l’Esprit-Saint est splendeur vive et éternelle de nos âmes, il est le gage des biens de l’espérance à venir.

Finalement, ces deux textes stigmatisent une seule et même exigence : pour le chrétien, rendre compte aux autres (la communauté, le monde en général) de son espérance en Christ, oblige d’en rendre compte à soi-même d’abord : suis-je fidèle au commandement de l’Amour ?… en tant que « habité par l’Esprit-Saint, suis-je lumière dans ce monde ?… suis-je message de la joie du Christ ressuscité ?
Notre espérance, parce qu’elle nous transforme en vérité, doit être débordante comme l’Esprit-Saint qui nous remplit. Ainsi, les chrétiens que nous sommes pourrons agir, là où nous vivons, pour redonner du sens aux expériences de vie de nos frères perdus, de l’espoir à ceux qui sont angoissés, la délivrance aux captifs et la joie aux affligés. L’Esprit-Saint est providence d’amour et de sens, d’intelligence et de vie. Il est en nous jusqu’à la fn des temps, et c’est donc par lui que nous devons demander au Seigneur : «Demandez, vous obtiendrez; cherchez, vous trouverez; frappez, la porte vous sera ouverte. Celui qui demande, reçoit; celui qui cherche, trouve, et pour celui qui frappe, la porte s'ouvrira. Lequel d'entre vous donnerait une pierre à son fils qui lui demande du pain […] ? Si donc, vous qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent (Mt 7, 7-11) Dieu nous donnera ce qui est nécessaire pour continuer notre route, notre combat, son œuvre d’évangélisation. C’est ce même Esprit qui vient nous réconforter en tout temps pour que nous soyons en mesure de «rendre compte de l'espérance qui est en [nous] (1 P 3, 15b)».

Frères, réjouissons-nous de la promesse que le Christ nous fait : alors que le péché avait mis l’homme à distance de Dieu, Jésus s'est incarné et a revêtu notre condition humaine, il a lavé notre souillure originelle par sa mort et sa résurrection et il nous élève avec lui dans la glorification de son Père. L’Esprit-saint qu’il nous promet achève désormais l’inhabitation et l’incorporation de Dieu en nous et réciproquement : nous devenons, en vérité, des membres vivants du Christ vivant.

Pour l’Eglise, cette inhabitation est tout aussi réelle. La Pentecôte à venir peut être considérée comme l’épiphanie de l’Eglise elle-même au sens où elle est appelée à se monter au monde, à se rendre de plus en plus présente au (dans le) monde (en usant à bon escient des formidables possibilités qu’offrent justement ces nouvelles technlogies de l’information et de la communication), à sortir de sa léthargie pour agir et proclamer la parole de Dieu au milieu et au plus près de hommes. Dire de l’Eglise qu’elle est sainte, c’est affirmer qu’elle est la matrice au sein de laquelle Dieu — Père, Fils et Esprit-Saint — viennent « faire demeure » : c’est en église, à notre tour et chacun selon les talents que nous aurons reçu de l'Esprit-Saint, que nous sommes enfantés à la vie de Dieu. Alors, que l’Esprit de Dieu repose sur nous, qu’il nous consacre et qu’il nous envoie proclamer la paix et la joie de Dieu à tous les hommes…


Crédit photo : www.seletlumieretv.org

23/04/2008

Tous les peuples, battez des mains,
acclamez Dieu en éclats de joie…

Le psaume ci-après nous est proposé en méditation pour ce sixième Dimanche de Pâques. Dans la série de Psaumes précédents, nous avions la description des situations dans lesquelles l’homme est en présence de la puissance du mal et adresse ses supplications à Dieu. Le Psaume 65 par exemple montre que même si la louange se tait dans Sion, même si les fidèles ont subi les pires iniquités, la confiance demeure inébranlable. La fin du Psaume célèbre les bénédictions de la terre quand Dieu interviendra ainsi en faveur de son peuple. Dans le triptique 65 à 67, le psalmiste met en exergue plutôt la pleine et joyeuse confiance du fidèle en Dieu, et compte sur sa bénédiction.
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Psaume [66 (65), 1-3a, 4-5, 6-7a, 16.20]

01 Acclamez Dieu, toute la terre ; +
02 fêtez la gloire de son nom,
glorifiez-le en célébrant sa louange.
3a Dites à Dieu : « Que tes actions sont redoutables !

04 Toute la terre se prosterne devant toi,
elle chante pour toi, elle chante pour ton nom. »
05 Venez et voyez les hauts faits de Dieu,
ses exploits redoutables pour les fils des hommes.

06 Il changea la mer en terre ferme :
ils passèrent le fleuve à pied sec.
De là, cette joie qu'il nous donne.
7a Il règne à jamais par sa puissance.

16 Venez, écoutez, vous tous qui craignez Dieu :
je vous dirai ce qu'il a fait pour mon âme ;
20 Béni soit Dieu +
qui n'a pas écarté ma prière,
ni détourné de moi son amour !
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Le Psaume 66 est une invitation à glorifier le Seigneur Dieu et à contempler les œuvres (vers. 5) de ce même Dieu qui a autrefois délivré Israël de l’Égypte (vers. 6), qui a réalisé des prodiges et des actions redoutables (les dix plaies d’Égypte…), signes de sa toute puissance. Il s’agit d’un appel universel, adressé à toutes les nations de la terre. Par delà le résidu, c’est-à-dire Israël, ce sont en effet tous ceux qui craignent le Seigneur — qui ont traversé toutes sortes d’afflictions et de tribulations — qui sont appelés à se tourner vers ce Dieu de la délivrance et à lui rendre gloire avec des hymnes et des instruments de musique. Maintenant, ils viendront à lui et le loueront, car dans l’obscurité s’est élevée une lumière pour les justes. C’est Dieu qui intervient en justice, Lui qui assure la délivrance des justes dont il ne détourne pas son regard aimant. La confiance absolue en Dieu se nourrit de justice et d’amour. Oui, Dieu est la gloire du juste (cf. Ps 3) et ce dernier lui rend gloire en éveillant et en réveillant toutes les nations. Car si elle peut être individuelle, la louange est bien plus expressive lorsqu'elle s'enrichit des énergies d'un collectif.

Alors que l’on pourrait se poser la question «Mais qui donc est ce Dieu de gloire?», le psalmiste nous le décrit indirectement : Il est Puissance de création, Il est créateur et moteur de l'histoire et de l'évolution des hommes, Il est le Rocher et le refuge des hommes, Il est le Sauveur et le libérateur, Il est Amour et Il gouverne avec Justice...

Ce psaume n’est pas le seul dans lequel pareille exhortation à la louange est faite aux hommes : «Chantez-lui un cantique nouveau! Faites retentir vos instruments et vos voix!» (Ps. 33 : 3). Dans le Psaume 98, le psalmiste réitère : «Poussez vers l'Éternel des cris de joie, vous tous, habitants de la terre! Faites éclater votre allégresse, et chantez! Chantez à l'Éternel avec la harpe; avec la harpe chantez des cantiques! Avec les trompettes et au son du cor, poussez des cris de joie devant le roi, l'Éternel! Que la mer retentisse avec tout ce qu'elle contient, que le monde et ceux qui l'habitent éclatent d'allégresse, Que les fleuves battent des mains, que toutes les montagnes poussent des cris de joie» (Ps. 98 : 4 à 8). L’apôtre Paul n’est pas en reste lorsqu’il recommande aux Éphésiens de chanter la louange de Dieu «par des psaumes, par des hymnes, et par des cantiques spirituels, chantant et célébrant de tout votre cœur les louanges du Seigneur» (Éph. 5 : 19).
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J
e vous propose désormais, tant pour les Épîtres, les Psaumes que pour l'Évangile, de faire l'expérience des quatre degrés d'élévation spirituelle, degrés qui constituent l'échelle même des cloîtrés (selon le Fr. Manuel Rivero) : la lecture, la méditation, la prière et la contemplation.

- Par lecture, il faut entendre l’examen attentif des Écritures, faite avec un esprit concentré.
- La méditation est l’action persévérante de l’intelligen ce, qui cherche, au moyen de sa propre raison, la connais sance d’une vérité cachée.
- La prière est la religieuse orientation du cœur vers Dieu, pour s’écarter de ce qui est mal ou atteindre à ce qui est bon.
- La contemplation désigne une sorte d’élévation de l’esprit au-dessus de lui-même, en Dieu, goûtant les joies de la douceur éternelle.


22/04/2008

Philippe proclamait le Christ,
et il y eut dans cette ville une grande joie…

Bonjour !

Nous voici bientôt au 6ème dimanche de Pâques. L'œuvre d'évangélisation va s'emplifiant; de nombreux disciples prennent le relais des apôtres à travers les contrées lointaines; le sacerdoce devient "universel". La moisson est abondante et chaque nouveau baptisé, désormais habité par l'Esprit-Saint, devient acteur engagé de cette mission. C'est le sens du premier texte que l'Eglise nous donne de méditer.
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L
ivre des Actes des Apôtres (Ac 8, 5-8.14-17)

8
05i Philippe, l’un des Sept, arriva dans une ville de Samarie, et là il proclamait le Christ.
06 Les foules, d'un seul cœur, s'attachaient à ce que disait Philippe, car tous entendaient parler des signes qu'il accomplissait, ou même ils les voyaient.
07 Beaucoup de possédés étaient délivrés des esprits mauvais, qui les quittaient en poussant de grands cris. Beaucoup de paralysés et d'infirmes furent guéris.
08 Et il y eut dans cette ville une grande joie.
14 Les Apôtres, restés à Jérusalem, apprirent que la Samarie avait accueilli la parole de Dieu. Alors ils leur envoyèrent Pierre et Jean.
15 A leur arrivée, ceux-ci prièrent pour les Samaritains afin qu'ils reçoivent le Saint-Esprit ;
16 en effet, l'Esprit n'était encore venu sur aucun d'entre eux : ils étaient seulement baptisés au nom du Seigneur Jésus.
17 Alors Pierre et Jean leur imposèrent les mains, et ils recevaient le Saint-Esprit.
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Quelques repères pour notre méditation :

«Alors donc qu’ils vous persécuteront dans une ville, fuyez dans une autre. Je vous dis en vérité que vous n’aurez pas achevé de parcourir toutes le villes d’Israël, que le Fils de l’Homme ne soit venu» (Matt. 10 :23-34)
Cette recommandation de Jésus à ses disciples permet d’expliquer les versets qui précèdent le texte ci-dessus. En effet, Etienne vient d’être lapidé et mis à mort par Paul à cause de sa foi (1), il est ainsi le premier martyre de l’Eglise. Partout dans la ville, les persécutions des chrétiens font rage ; femmes et hommes sont traînés en prison. Les apôtres échappent à cette inquisition par la volonté de Dieu. Mais au lieu de fuir la ville, de se disséminer à travers le pays avec les autres chrétiens, ils restent à Jérusalem pour achever leur mission d’évangélisation [«Vous me servirez de témoins dans Jérusalem.» (1.8)] Or la dispersion des persécutés produit un effet inattendu : partout où ils passent, ces simples fidèles, pourtant dépourvus de toute autorité apostolique, proclament leur foi, ils annnocent la Parole de Dieu. Et parmi ces fugitifs devenus missionnaires, un diacre nommé Philippe (il ne s'agit pas de l'apôtre du même nom, resté dans Jérusalem avec ses collègues) décide de passer du « service aux tables » à l’« annonce de la Parole ».

Il est intéressant de noter ici que c’est Etienne, l’un des 7 diacres (2) qui par sa mort similaire à celle du Christ [Il prie pour ses meurtriers : «Seigneur ne leur impute point ce péché» (Actes 7:60)] provoque la dispersion d’une bonne partie de l’Eglise. C’est également un diacre (Philippe) qui en prépare l’établissement dans une ville de Samarie, au milieu des gentils.

Plusieurs faits extraordinaires sont rapportés : des possédés délivrés des esprits mauvais, des paralysés et des infirmes guéris, etc. L’évangéliste, c’est-à-dire celui qui annonce la Parole, est en proximité étroite avec l’assemblée qu’il évangélise. Proche du Seigneur, il faut l’être tout autant des membres de la communauté et des fidèles (au sens étymologique de “ceux qui vivent dans la foi“). C’est ainsi que Philippe opère avec succès, attirant des foules de plus en plus nombreuses. «Suivez-moi, et je vous ferai pêcheurs d’hommes» (Matt. 4:19), dit un jour Jésus à André. Du poisson en abondance, et des pêcheurs déterminés et volontaristes aussi. Convertir les âmes signifie les tourner vers le Christ qui le chemin, la vérité et la vie. On voit bien dans ce contexte que l’évangélisation est une mission difficile, parfois périlleuse (ici en pleine persécution) pour l’annonceur et pour le chrétien qui est appelé à vivre et témoigner de la Parole qu’il accueille. Il faut donc parfois sortir en pleine mer, en pleine bourrasque pour aller jeter le filet et ramener du poisson sur le rivage: «Encore, le royaume des cieux est semblable à une seine (3) jetée dans la mer et rassemblant des poissons de toute sorte ; et quand elle fut pleine, ils la tirèrent sur le rivage, et s’asseyant, ils mirent ensemble les bons dans les vaisseaux, et jetèrent dehors les mauvais» (Matt. 13:47-48)… Aux apôtres restés à Jérusalem parviennent des échos de ce que le Seigneur accomplit, à travers Philippe, et de la satisfaction des Samaritains. C’est alors qu’ils envoient auprès de ce diacre Pierre et Jean pour imposer les mains aux nouveaux baptisés, afin qu’ils reçoivent le Saint-Esprit. Bel exemple d’humilité des apôtres…

Avec Philippe — rappelons-le — nous sommes à un moment particulier de la constitution, de l’élargissement et de la consolidation des premières communautés chrétiennes. Les disciples sont très engagés dans la prédication et le témoignage ; plusieurs miracles et faits « extraordinaires » se produisent à leur passage, la foi est vivante et agissante : Dieu est à l’œuvre… Bien entendu, il faut tout cela pour accompagner cette propagation. Mais de nos jours, est-il nécessairement besoin de faits extraordinaires pour vraiment croire ? La parole et la promesse de Jésus ne nous suffisent-elles pas ? ("Heureux qui croit sans avoir vu"). Le miracle ne naît-il pas, silencieusement et invisiblement, de notre propre engagement dans la prière individuelle et communautaire, du témoignage que nous donnons de l’amour pour nos frères, cet amour dont le Christ lui-même a porté témoignage jusqu’à la mort ? Il est bien sûr légitime pour un malade, un handicapé, un laisser-pour-compte d’espérer la rémission, la guérison ou la considération… Mais au-delà, ne faut-il pas rendre grâce à Dieu pour les valeurs intrinsèques d’espérance et d’aspiration au salut qu’il a lui-même semées en chacun de nous ?

Ce court passage des Actes des Apôtres nous interpelle sur plusieurs points en lien direct avec notre propre vie de chrétien :
- quelle est, en tant que chrétiens, notre attitude individuelle et collective face aux situations difficiles (sociales et/ou politiques, familiales…) que nous traversons ou que l’on nous fait subir : sommes-nous démissionnaires et fuyards, tièdes et/ou arrangeants ?
- Sommes-nous, en tant que chrétiens, fondamentalement engagés à annoncer la Parole de Dieu jusqu’à nous mettre en danger, jusqu’à compromettre notre propre vie, notre confort, notre image ?
- Préférons-nous la pêche à la puisette, juste au bord de la mer, ou alors savons-nous nous risquer au large pour aller partout (dans la rue, chez l'habitant, sur le lieu de travail, de loisir, dans le quartier, chez les non-baptisés, chez ceux qui par préjugé ne veulent pas entendre parler de Dieu…) chercher les âmes qui ont vraiment besoin d’être éclairées par la Parole de Dieu et de connaître son amour miséricordieux ?
- Notre foi est-elle une affaire strictement intellectuelle et individuelle, ou savons-nous aussi nous employer à la partager avec nos frères de la communauté, en paroles et en actes ?
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(
1) Rempli de la grâce de l'Esprit-Saint pour accomplir des miracles et parler avec l'autorité des envoyés de Dieu, Etienne faisait l'admiration de tous. Un jour des Juifs, furieux de ne pouvoir répondre à ses arguments, l'accusèrent faussement de blasphème et de complot contre les institutions de la Loi, et le traduisirent devant le Sanhédrin, le tribunal du grand-Prêtre. Sans crainte, il déclamation un discours d’accusation des Juifs (voir Ac 7, 51-52) et d’exaltation de Jésus Christ ayant partagé notre condition humaine, mis à mort par eux, ressuscité le troisième jour et désormais partageant la gloire de Dieu le Père, en attendant son retour… Le sanhédrin ordonna de le conduire hors de la ville. Là, il fut lapidé à mort.

(2) Diacre (mot d'origine grecque) vient du verbe diakonein = «servir»; non pas au sens de la soumission à une autorité, mais en tant qu'imitation du Christ qui s'est fait Lui-même le Serviteur de tous par Son Incarnation (cf. Lc. 22:27; Jn. 13:14). Le «service» chrétien est une expression de la charité fraternelle, «lien de la perfection» (Col. 3:14).

(3) Une seine est une sorte de filet qu’on place verticalement et parallèlement au rivage, et que l’on ramène vers le rivage.




18/04/2008

" Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie…"

Bonjour !

Dimanche dernier, Jésus se définissait comme « le Bon Pasteur » (dans son rôle rassembleur, sacerdotal) ; aujourd’hui il insiste sur sa proximité avec le Père dont il est le seul chemin d’accès : «Je suis le chemin, la vérité et la Vie»… et le ton est tranchant et sans ambiguïté : «Nul ne vient au Père sinon par moi». Voici le txet de l'Evangile que l'Eglise nous propose de méditer en ce cinquième dimanche de Pâques.
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Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean (Jn 14, 1-12)

14

01i
À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « Ne soyez donc pas bouleversés : vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi.

02
Dans la maison de mon Père, beaucoup peuvent trouver leur demeure; sinon, est-ce que je vous aurais dit : Je pars vous préparer une place ?

03
Quand je serai allé vous la préparer, je reviendrai vous prendre avec moi; et là où je suis, vous y serez aussi.

04
Pour aller où je m'en vais, vous savez le chemin. »

05
Thomas lui dit : « Seigneur, nous ne savons même pas où tu vas ; comment pourrions-nous savoir le chemin ? »

06
Jésus lui répond : « Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ; personne ne va vers le Père sans passer par moi.

07
Puisque vous me connaissez, vous connaîtrez aussi mon Père. Dès maintenant vous le connaissez, et vous l'avez vu. »

08
Philippe lui dit : « Seigneur, montre-nous le Père ; cela nous suffit. »

09
Jésus lui répond : « Il y a si longtemps que je suis avec vous, et tu ne me connais pas, Philippe ! Celui qui m'a vu a vu le Père.

10
Comment peux-tu dire : 'Montre-nous le Père' ? Tu ne crois donc pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ! Les paroles que je vous dis, je ne les dis pas de moi-même ; mais c'est le Père qui demeure en moi, et qui accomplit ses propres œuvres.

11
Croyez ce que je vous dis : je suis dans le Père, et le Père est en moi ; si vous ne croyez pas ma parole, croyez au moins à cause des œuvres.

12
Amen, amen, je vous le dis : celui qui croit en moi accomplira les mêmes œuvres que moi. Il en accomplira même de plus grandes, puisque je pars vers le Père.
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Quelques repères
pour notre méditation :


Ce texte vient en conclusion d'un premier développement autour de l'affirmation: «Où je vais, vous, vous ne pouvez pas venir» (13/33), précisée à Pierre: «vous ne pouvez pas venir maintenant» (13/37). Mais immédiatement le départ de Jésus est rattaché au thème «Jésus est le chemin».
Mais Jésus pousse plus loin sa révélation : «Si vous m'avez connu, vous connaîtrez aussi mon Père. Dès maintenant, vous le connaissez et vous l'avez vu…». Pour Thomas et Philippe, les choses sont encore trop floues, trop complexes à appréhender, en tout cas sujettes au doute : « Seigneur, montre-nous le Père ; cela nous suffit », dit l’un d’eux. Et Jésus de lui répondre : «Qui m'a vu, a vu le Père».

Rappelons que tout ceci fait écho à cette période de développement et de rayonnement des premières communautés chrétiennes. Et c’est donc à dessein que l’évangéliste Luc pointe dans son propos les «œuvres» de Jésus (dont ils ont été les témoins) ayant valeur de «signes» et se rapportent à sa «gloire», c’est-à-dire à sa présence divine : Jésus est notre chemin, Jésus est notre vérité, Jésus est notre vie. Suivre Jésus, marcher sur ses traces, cela devient un engagement permanent. Son départ qu’il annonce avec sérénité, Jésus ne le pose pas comme un aller simple vers l’inconnu ; il faut plutôt l’entendre en continuité de sa résurrection et pour la glorification de son Père. Christ veut nous conduire à son Père : il est à la fois la méthode et le moyen qui mènent à son Père. En mettant nos pas dans ceux du Christ, nous faisons l’expérience de la solidarité de Dieu avec nous dans cette mission partagée de rassemblement et de responsabilité dans nos communautés de foi. Celle-ci n’est plus dans les idées convenues ou sécurisantes, elle ne se limite pas non plus au culte religieux de Dieu… La foi chrétienne, notre foi est alliance vivante et sans cesse renouvelée entre Dieu et nous, mais également entre nous.

«Dans la maison de mon Père, beaucoup peuvent trouver leur demeure», dit Jésus à ses disciples comme pour les rassurer par rapport à la révélation qu’il leur faisait de son prochain départ … et là où je suis, vous y serez aussi… Pour aller où je m'en vais, vous savez le chemin». Les apôtres et le peuple d’Israël attendaient le Messie d’un royaume terrestre… Mais les données n’ont jamais été celles-là.
En effet, Pâques a tout bouleversé et l’Esprit Saint aidera à tout «débrouiller». Ainsi, à la suite de la rédemption de Christ, l’homme est entré dans la gloire éternelle et divine du Fils de l’homme dans le ciel, pour être comme lui et avec lui. Et cela, Jésus leur demande de le croire « sur parole », c’est-à-dire la sienne, celle qui agit et transforme quiconque l’accueille. Jésus s’en va, il était avec les apôtres ; l’Esprit Saint, donné aux croyants, vient demeurer en eux pour aider les aider à réaliser la plénitude de la rédemption.


Si donc Christ est Le Chemin, l’issue n’en est pas inconnue ou indéterminée ou encore un cul-de-sac : Christ est notre chemin dans notre vie, et il est l’horizon même de notre nouvel exode. Si donc Christ est La Vérité, ses œuvres et sa Parole dont toute sa vie a été la manifestation sont l’héritage le plus précieux qu’il ait laissé pour macher à sa suite et vivre sa vie. Si donc Christ est La Vie, alors il est la promesse même de notre salut. Ainsi, le Seigneur est vérité et puissance de Dieu ; en lui seront comblés ceux qui vivent en sa présence…

Nombreux sont nos frères qui doutent de la présence réelle du Christ parmi nous, nombreux sont ceux qui recherchent avec acharnement des preuves extraordinaires de son action aujourd’hui.
Pourquoi donc attendre un autre Dieu que Christ qui, lui, se révèle à nous et se rappelle à nous toutes les fois où nous revivons le partage de son Corps et de son Sang dans l'Eucharistie? Pourquoi donc, puisque Christ lui-même se révèle à nous en tant que Messie de son Père dont il procède avec l'Esprit Saint qu'il nous promet : «Qui m’a vu, a vu le Père» ! … Puissions chanter avec confiance : Dieu, tu es la route qui me mène jusqu'à toi et la parole me comble de joie




17/04/2008

Vous aussi, soyez les pierres vivantes…
Vous êtes chargés d'annoncer les merveilles
de Dieu.

Bonjour !

Pierres vivantes de l'édifice spirituel, tous les fidèles sont chargés d'annoncer les merveilles de Dieu. Voici le texte de la seconde lecture de ce cinquième dimanche de Pâques :
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Première lettre de saint Pierre Apôtre (1P 2, 4-9)

2
04i Frères, approchez-vous de Seigneur Jésus : il est la pierre vivante que les hommes ont éliminée, mais que Dieu a choisie parce qu’il en connaît la valeur.
05 Vous aussi, soyez les pierres vivantes qui servent à construire le Temple spirituel, et vous serez le sacerdoce saint, présentant des offrandes spirituelles que Dieu pourra accepter à cause du Christ Jésus.
06 On lit en effet dans l'Écriture :
Voici que je pose en Sion une pierre angulaire,
une pierre choisie et de grande valeur ;
celui qui lui donne sa foi
ne connaîtra pas la honte.
07 Ainsi donc, honneur à vous qui avez la foi, mais, pour ceux qui refusent de croire, l'Écriture dit :
La pierre éliminée par les bâtisseurs est devenue la pierre d'angle,
08 une pierre sur laquelle on bute, un rocher qui fait tomber.
Ces gens-là butent en refusant d'obéir à la Parole, et c'est bien ce qui devait leur arriver.
09 Mais vous, vous êtes la race choisie, le sacerdoce royal, la nation sainte, le peuple qui appartient à Dieu ; vous êtes donc chargés d'annoncer les merveilles de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière.
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Quelques repères pour notre méditation :

Nous sommes toujours dans cette période de conversions massives — ainsi que s’emploie à le préciser désormais Saint Luc à chaque épisode — suite aux prédications et aux exhortations des apôtres, Pierre en tête. Ici, ce dernier s’adresse aux esclaves qui, dans le droit romain, étaient considérés comme de véritables objets à la disposition de leurs maîtres. Corvéables à merci et parfois victimes de sévices gratuits, ils pouvaient aussi être utilisés pour le seul plaisir, pour les seuls caprices de ceux-ci. Et c’est dans ce contexte que Pierre leur demande d’«imiter le Christ».

Il faut avouer que le mot de Pierre peut paraître dur, décalé et presque grossier et provocateur («à côté de la plaque», dirait-on aujourd’hui). Comment en effet recommander à des personnes qui sont maltraitées, parfois sans raison, de ne pas se rebeller contre les violences dont ils sont l’objet, de ne pas insulter lorsque le maître vous couvre d’insultes, de ne pas menacer quand bien même il vous accable de souffrance ? Pierre va plus loin : «Si l'on vous fait souffrir alors que vous avez bien agi, vous rendrez hommage à Dieu en tenant bon. (verset 20 )... C'est bien à cela que vous avez été appelés, puisque le Christ lui-même a souffert pour vous et vous a laissé son exemple afin que vous suiviez ses traces.» (verset 21).

«Tenir bon…» : l’expression est crue et rude. Le chrétien aurait-il donc vocation à accepter la souffrance, voire à la rechercher comme une moyen sûr d’obtenir le salut? En réalité, non ! Dans la souffrance, dans l’humiliation, le chrétien doit tenir bon à l’image du Christ qui, pour avoir souffert les crachats, les injures et la méchanceté des hommes dans sa chair blessée, nous a sauvés de nos péchés. En disant aux esclaves «tenez bon», l’apôtre Pierre replace Christ au centre de la vie de chaque homme, y compris ceux qui souffrent de l’esclavage ou qui sont persécutés pour leur foi. C’est donc le même message qu’il continue de faire passer : «Approchez-vous de Seigneur Jésus, il est la pierre vivante que les hommes ont éliminée, mais que Dieu a choisie parce qu’il en connaît la valeur… Vous aussi, soyez les pierres vivantes qui servent à construire le Temple spirituel, et vous serez le sacerdoce saint, présentant des offrandes spirituelles que Dieu pourra accepter à cause du Christ Jésus.»

Le christ, en acceptant de faire la volonté de son Père face à l’horreur absolue de la lâcheté humaine, est le symbole même de l’obéissance libératrice, l’exemple parfait de la fidélité au projet divin : en mourant sur la croix, il entraîne et transforme sa souffrance dans sa propre glorification. Souffrir l’injustice à cause du bien que l’on fait est une grâce. Remettre sa souffrance au Christ, c’est donc d’une façon, devenir une « pierre vivante » dans le projet de Dieu, c’est devenir soi-même une offrande à sa gloire.

L’esclavage social et politique auquel est confronté l’apôtre Pierre préfigure à n’en point douter l’esclavage spirituel dont souffriront plus tard les victimes des politiciens cupides et véreux, des marchands de bonheur, des idéologues et autres faux bergers et imposteurs qui séviront de par le monde, et parfois au nom de Jésus Christ. L’apôtre Pierre pressent également les injustices que devront subir les communautés chrétiennes au fur et à mesure de leur développement et de leur expansion au-delà de la Palestine. La parole du Christ est «dangereuse» pour certains pouvoirs politiques, elle dérange déjà à Jérusalem. Les persécutions, les martyres et autres tribulations rappelleront sans doute la passion du Christ, homme et Dieu de paix, qui est allé jusqu’au bout par amour, pour nous sauver, et pour rendre gloire à son Père.

Christ est le premier Enfant du Royaume, il est vivant auprès de Dieu. Et comme jadis Dieu accompagna le peuple élu d’Egypte vers la Terre promise, Christ, le Fils aîné, recommence pour chaque homme un exode humble et caché des ténèbres vers la lumière, du mal vers le bien, de l’injustice vers la justice… Tel est Christ pour nous et avec nous, désormais "passeur" de la mort à la vie. Devenir une pierre vivante, cela veut dire se convertir et se mettre à sa suite, l’approcher dans une tension permanente afin de se laisser habiter par son Esprit Saint qui agit en nous et nous fait messagers de Dieu en actes et en parole.


16/04/2008

Hommes justes, jouez pour le Seigneur !
avec un chant nouveau, dites sa louange…

Bonjour (ou bonsoir !), mais peu importe…

[Note liminaire : le psaume qui nous est proposé en ce cinquième dimanche de Pâques s’intitule en réalité: «Pour la fin. Psaume de David». Il vient à la suite du précédent dans lequel le psalmiste a médité sur sa propre justification. Ici, il traite de la grandeur et de la dignité des justes qu’il exhorte à la joie et à la louange pour le Seigneur].
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P
saume (32, 1.2b-3a, 4-5, 18-19)


01
Criez de joie pour le Seigneur, hommes justes !

Hommes droits, à vous la louange !

2b
jouez pour lui sur la harpe à dix cordes.

3a
Chantez-lui le cantique nouveau,

04
Oui, elle est droite, la parole du Seigneur ;

il est fidèle en tout ce qu'il fait.

05
Il aime le bon droit et la justice ;
la terre est remplie de son amour.
18
Dieu veille sur ceux qui le craignent,

qui mettent leur espoir en son amour,

19
pour les délivrer de la mort,
les garder en vie aux jours de famine.

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C
ommentaire du psaume et quelques repères pour notre méditation. Procédons pas à pas, mot à mot, verset par verset :

«Louez le Seigneur… Hommes droits, à vous la louange» parce que la parole du Seigneur est droite. «Criez le joie pour le Seigneur, hommes justes !»… Le juste, dans la Bible, est celui qui s’en remet avec confiance au Seigneur, celui qui accepte et intègre le projet de Dieu. C’est l’homme de l’alliance avec Dieu. Seuls donc les justes, parce qu’ils ont le cœur droit, sont dignes de louer le Seigneur : pour toutes choses et en toutes circonstances, ils louent le Seigneur et se réjouissent de se conformer à sa volonté. Il ne s’agit pas ici d’une droiture synonyme d’une justice parfaite, mais d’une rectitude de la volonté de celui qui recherche en permanence l’accomplissement du projet divin, et qui s’en réjouit à chaque instant de la journée.

Ensuite, le psalmiste indique le mode de la louange et de cette joie : «jouez pour lui sur la harpe à dix cordes» (2b) — «Chantez-lui le cantique nouveau» (3a). Il s’agit donc de louer le Seigneur sur la harpe [en réalité le psaltérion ou la cithare (1)] à dix cordes. Tout d’abord, c'est un instrument de musique précis qui est désigné, pour son équilibre et son spectre sonores. Puis, comme second mode de laudation, le chant, c’est-à-dire la voix humaine. Le chant nouveau n’est pas forcément différent à chaque fois, même si l’on peut comprendre qu’à certains moments de sa vie ou de son histoire [ à l’issue d’une délivrance ou d’une guérison — pour une personne, ou au commencement d’une nouvelle phase du salut — pour un peuple, par exemple au sortir de la captivité en Egypte…], un homme ou un peuple peuvent vouloir exprimer leur louange à Dieu avec des cantiques appropriés.

Aux cœurs justes donc, Dieu donne sa grâce et promet sa gloire. Chanter, psalmodier avec des cris de joie… mais en l’honneur de Dieu, pour sa parole qui est promesse de salut, pour sa fidélité et sa droiture, pour sa justice. Cela, l’homme juste l’exalte parce qu’il est sûr que la terre est remplie de la miséricorde du Seigneur.


La dernière strophe peut être traduite ainsi :

18
Voilà que le regard du Seigneur se pose
sur ceux qui le craignent

et sur ceux qui espèrent en sa miséricorde,

19
afin de délivrer les âmes de la mort,

et de les nourrir de la famine



(Ci-contre, joueur de Kora)




La miséricorde divine se manifeste par le regard de Dieu sur ceux qui le craignent, c’est-à-dire ceux qui ont mis en lui toute leur confiance. La crainte et l’espérance sont intimement liées, mais l’une ne se suffit pas sans l’autre. Ainsi, le regard de Dieu sur celui qui le craint et espère, libère du mal, nourrit et délivre de la mort. La famine, souvent née de calamités naturelles ou du pouvoir de domination des hommes (par exemple, le contrôle des terres et des eaux à l’issue des conquêtes territoriales) est jugulée par le Seigneur. Il est le Maître de tout, sa bonté et sa grandeur envahissent toute la terre. Celle-ci est non seulement l’œuvre de ses mains, mais aussi le théâtre de la manifestation de sa toute-puissance et de sa magnanimité. Le regard de Dieu rassure… le regard de Dieu attendrit, car lui seul peut sauver du mal et de la mort…
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(1)- Avis aux spécialistes (ou aux curieux) : le choix de l’instrument n’est pas anodin ; tout est question de hauteur, de timbre, de fermeté ou de douceur. Cela conditionne la nature du chant. A l’époque, selon les études du philosophe Pythagore, ont été institués trois genres de chant : le dorien (premier genre) qui correspond aux premier et deuxième tons — le phrigien (deuxième genre) qui correspond au troisième ton — l’hippodolydien (troisième genre) qui correspond aux cinquième et sixième tons. Ces différents tons de la voix humaine renvoient à différents tons instrumentaux. Ainsi, la flûte et la trompette donnent le premier ton, certains instruments comme l’orgue le deuxième ton, et d’autres comme le psaltérion et la cithare le troisième ton. Mais, alors que la cithare (ou la harpe) sonne grave (comme si la louange montait des profondeurs de l’être et jaillissait d'une source telle une eau vive), le psaltérion sonne haut (comme pour signifier la louange des biens célestes). La Kora africaine (à mon avis) est une synthèse des deux, et ses sonorités claires se prêtent à merveille aux déclamations des griots. Et pourquoi la cithare ou la harpe à dix cordes ? Parce que cela renvoie aux dix préceptes du Décalogue.



15/04/2008

Rester fidèles à la prière
et au service de la Parole

Après le dimanche des vocations, voici que l’Eglise nous propose de méditer, outre l’Evangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 14, 1-12), trois textes [le Livre des Actes des Apôtres (Ac 6, 1-7) — le Psaume (32, 1.2b-3a, 4-5, 18-19) et la Première lettre de saint Pierre Apôtre (1P 2, 4-9)]. Je vous propose de nous arrêter sur le premier texte et essayer d'en dégager quelques messages qui permettent leur compréhension globale, utiles pour notre méditation.


Livre des Actes des Apôtres (Ac 6, 1-7)
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6

01 En ces jours-là, comme le nombre des disciples augmentait, les frères de langue grecque récriminèrent contre ceux de langue hébraïque : ils trouvaient que, dans les secours distribués quotidiennement, les veuves de leur groupe étaient désavantagées.
02 Les Douze convoquèrent alors l'assemblée des disciples et ils leur dirent: «Il n'est pas normal que nous délaissions la parole de Dieu pour le service des repas.
03 Cherchez plutôt, frères, sept d'entre vous, qui soient des hommes estimés de tous, remplis d'Esprit Saint et de sagesse, et nous leur confierons cette tâche.
04 Pour notre part, nous resterons fidèles à la prière et au service de la Parole.»
05 La proposition plut à tout le monde, et l'on choisit : Étienne, homme rempli de foi et d'Esprit Saint, Philippe, Procore, Nicanor, Timon, Parménas et Nicolas, un païen originaire d'Antioche converti au judaïsme.
06 On les présenta aux Apôtres, et ceux-ci, après avoir prié, leur imposèrent les mains.
07 La parole du Seigneur était féconde, le nombre des disciples se multipliait fortement à Jérusalem, et une grande foule de prêtres juifs accueillaient la foi.
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Un rappel
Le Livre des Actes des apôtres constituent le second Livre de Saint Luc. Fin pédagogue, l’évangéliste a organisé ces actes en deux grandes parties : la période des missions que l’on peut qualifier d’« intérieures » et la seconde qui est consacrée aux missions « étrangères ». Le texte ci-dessus fait partie de la première période qui se déroule presque exclusivement en Palestine, avec Jérusalem comme centre ; le personnage central en est l’apôtre Pierre qui annonce la Parole de Dieu au milieu des juifs (majoritairement), y compris ceux de la diaspora qui se convertis et qui viennent à Jérusalem en pèlerinage.
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Quelques repères pour notre méditation :

Ce texte nous décrit en très peu de mots les débuts de l’Église ; celle-ci se construit, se développe, sous l'impulsion de l’Esprit-Saint, avec la participation active des croyants dans l’annonce de la Parole de Dieu. Elle s'organise donc et elle voit le nombre des disciples augmenter jour après jour.

On voit apparaître ici pour la première fois cette fonction de « chargé du service des tables » à Jérusalem, ordonnés pour le service de leurs frères [fonction qui évoluera au fur eet à mesure vers celle du diacre (1)]. Choisis par et parmi les chrétiens, et après l'imposition des mains par l'un des apôtres, ces hommes sont appelés à s'occuper des plus démunis de la communauté.
Les circonstances qui ont concouru à l’institution de cette nouvelle fonction « d’aides gestionnaires » sont d’ailleurs pour le moins étonnantes: il s’agit bien d’un problème de discrimination, de racisme. En effet , les veuves de langue grecque étaient plus négligées que celles des Hébreux. Voilà les apôtres confrontés à une double équation à résoudre : comment rester unis alors que le nombre de convertis augmente sans cesse ? Et comment s’organiser dans la gestion (nécessaire et source de tensions sociales) des biens et besoins matériels et la sauvegarde de la mission fondamentale d’annonce de la Parole de Dieu ?

Le problème de la gestion des biens matériels confiée à sept (2) frères appréciés de tous pour leur honnêteté et leur sagesse [Étienne (devenu St Étienne), le premier martyr de la Chrétienté ; Philippe ; Prochore ; Nicanor ; Timon ; Parménas et Nicolas] en révèle un autre qui est celui du choc des langues, et donc des cultures qui les nourrissent. Très tôt, nous voyons que dans cette Eglise dite « primitive », la question de l’universalité du message de Jésus Christ est confrontée aux réalités culturelles et politiques de ceux à qui il est annoncé et que les apôtres exhortent à la propager à leur tour. L’Esprit Saint conduit à la compréhension, au dia-logue des personnes, des communautés et des peuples dans le respect de leurs identités : il ne génère pas un nouveau « Babel ».

En outre, la réaction des apôtres pour résoudre le problème posé (celui né de la plainte des veuves grecques) est intéressante à relever : 1)- ils convoquent une assemblée générale, 2)- ils rappellent les objectifs fondamentaux, 3)- ils proposent rapidement une solution innovante, et 4)- ils en confient la mise en œuvre aux membres de la communauté eux-mêmes. Nous avons ici l’illustration d’une gestion participative de la vie de l’Église. Personne n'est laissé à l'écart de la gestion des affaires quotidiennes, celles qui ont des incidences sur la marche de la communauté… Mais dans le versant matériel de cette gestion la distance que Pierre impose au collège des apôtres fait écho à l’objectif et au devoir absolus de leur fonction sacerdotale : rester fidèles à la prière, au service de la Parole et à celui des frères.

L’organisation de l’Église est dessinée, et des esquisses sont élaborées quant aux rôles du prêtre et de ces hommes « chargés du service des tables à Jérusalem » (3) ; si le premier est le signe du Christ rassembleur, tête de l'Église, le second, lui, est signe du Christ serviteur. Nous savons combien la fonction de diacre a été importante par la suite dans la vie des communautés ecclésiales, nous savons aussi comment elle a évolué à travers le temps — pour ce qui concerne la vie ordinaire et la liturgie — au sein d'une seule et même Église et d’une Église à l’autre [catholique (4), protestante, orthodoxe, etc.].

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Que retenir de ce texte…
et en quoi nous parle-t-il aujourd’hui encore ?


- tout d’abord, que les communautés ecclésiales sont appelées à croître : c’est le but de l’évangélisation, mission première de l'après-Pentecôte ;
- chacun a sa place dans une communauté ecclésiale (paroissiale, par exemple), les ministres comme les fidèles, les femmes comme les hommes, les enfants comme les adultes, les riches comme les pauvres ;
- toute communauté ecclésiale fait cohabiter des différences d’âge, de race, de culture, etc. mais les conflits nés de ces coexistences doivent être résolus rapidement (ou du moins apaisés) en vue d’un «mieux-vivre-ensemble»… ;
- la justification et la finalité de toute communauté d’Église restent l’annonce de la Parole de Dieu et le partage de l’Eucharistie dans l’unité de nos différences et de notre diversité.


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1- Le mot «diacre» ne figure pas dans le texte. Il ne faut donc pas anticiper une fonction spécifique qui sera issue d’autres contextes ultérieurs et impactant une nouvelle organisation des communautés ecclésiales dans leurs développements inévitables.
3- Voir (1)
2- Notons l’importance du chiffre 7, symbole de la plénitude et de la totalité.
4- Dans l'Église catholique romaine, le rôle du diacre, fruit d'une longue histoire, est défini par la constitution dogmatique «
Lumen Gentium»


09/04/2008

“Moi je suis venu pour que les hommes aient la vie,
pour qu'ils l'aient en abondance“…

Quatrième dimanche de Pâques
Journée Mondiale de prière pour les vocations


Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean (Jn 10, 1-10)

10

01i Jésus parlait ainsi aux pharisiens: "Amen, amen, je vous le dis: celui qui entre dans la bergerie sans passer par la porte, mais qui escalade par un autre endroit, celui-là est un voleur et un bandit.
02
Celui qui entre par la porte, c'est lui le pasteur, le berger des brebis.

03
Le portier lui ouvre, et les brebis écoutent sa voix. Ses brebis à lui, il les appelle chacune par son nom, et il les fait sortir.

04
Quand il a conduit dehors toutes ses brebis, il marche à leur tête, et elles le suivent, car elles connaissent sa voix.

05
Jamais elles ne suivront un inconnu, elles s'enfuiront loin de lui, car elles ne reconnaissent pas la voix des inconnus. »

06
Jésus employa cette parabole en s'adressant aux pharisiens, mais ils ne comprirent pas ce qu'il voulait leur dire.

07
C'est pourquoi Jésus reprit la parole : « Amen, amen, je vous le dis : je suis la porte des brebis.

08
Ceux qui sont intervenus avant moi sont tous des voleurs et des bandits ; mais les brebis ne les ont pas écoutés.

09
Moi, je suis la porte. Si quelqu'un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra aller et venir, et il trouvera un pâturage.

10
Le voleur ne vient que pour voler, égorger et détruire. Moi je suis venu pour que les hommes aient la vie, pour qu'ils l'aient en abondance.

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Quelques repères pour notre méditation
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Avec l’Evangile de ce dimanche, nous sommes devant un discours de première importance en ce qu’il est à la fois parabole (pour son caractère pédagogique) et révélation (pour son éclairage sur l’identité du Christ). En effet, par deux fois, Jésus scande « Amen, amen, je vous le dis », c’est-à-dire qu’il énonce une vérité qui, ici, définit les critères d’appartenance à un camp ou à l’autre : ceux qui viennent ou reviennent à lui, et ceux qui se laissent gouverner par les autres [les voleurs, les bandits, les idéologues, les usurpateurs, tels Theudas, et surtout Judas le Galiléen qui entraîna son peuple dans une révolte ruineuse (cf. Ac 5 36-37)]. L’histoire de l’homme responsable donne à Dieu l’occasion de révéler sa souveraineté et son dessein d’amour pour l’humanité. C’est ainsi qu’ayant vécu parmi les hommes, il a réalisé la promesse de jadis : investi de l’autorité par Dieu, Christ a été établi bon Berger et bon Pasteur.

L
a figure du bon Pasteur est déjà présente entre autres chez Ezékiel (voir 34 1 et sq) : le bon Pasteur rassemble son troupeau dispersé. Dieu promet de devenir lui-même le Pasteur d’Israël. Jésus se présente comme ce Berger, ce Pasteur annoncé par les prophètes [ Lc 15 1-7 | Mt 18 12-14 et 25 31-46 (le jugement final)]. S'il professe son identité messianique et sa fonction pastorale, c’est que la société de l’époque bouge sans cesse ; les populations (juifs, craignant-Dieu, juifs chrétiens, païens, etc.) sont désemparées, et certaines d'entre elles sous l’emprise de plusieurs faux prophètes et d’illusionnistes qui racontent que “l’épisode de la vie de Jésus“ et surtout sa fin sont un échec patent. C’est la raison pour laquelle Pierre et ses compagnons martèlent à corps et à cris que « Ce Jésus-là » est vraiment ressuscité, qu’ils l’ont vu de leurs propres yeux, qu'
il a vécu publiquement au milieu d'eux et qu'il est bien le Messie qu’attendait Israël.

- Christ n’est pas un voleur qui entre par la fenêtre. Il est le bon et le vrai Berger des brebis égarées. Il les connaît toutes et celles-ci connaissent sa voix : quand il leur parle, elles le reconnaissent. Mieux ! Christ est lui-même la porte de la bergerie et il donne sa bénédiction à ceux qui le suivent. Porte de sortie pour échapper à ce qui est corrompu, il est aussi la seule porte d’entrée des bénédictions que Dieu réserve à ses brebis. Parmi ces bénédictions : le salut de l’âme, la délivrance du jugement et la liberté dans une pâture abondante et inépuisable.
- Christ est le bon Berger, c’est-à-dire celui qui prend soin de ses brebis et qui va jusqu’à donner sa vie pour elles face aux agressions du voleur, de l’homme à gage ou du loup. Au fait, à quoi reconnaît-on le bon Berger ? 1)- les brebis écoutent sa voix, 2)- elles sont connues de lui qui les appelle individuellement par leur nom, et 3)- elles le suivent. Notons ici le continuum parfait entre les deux épîtres, le psaume et l’évangile de ce quatrième dimanche : la confiance totale en Christ pour qui accepte de le suivre et l’assurance d’une vie transformée par la grâce de l’amour en plénitude.

Il est intéressant de noter ici l’acte qui signe l’appartenance au troupeau du Christ : le baptême. Jésus, premier des baptisés, est la porte d’entrée pour une relation privilégiée avec Dieu et ses frères de la communauté. Par le baptême, Dieu nous donne un nouveau nom connu de lui seul et de chacun des baptisés (voir aussi Ap.
32 17 pour la similitude). Le baptême établit une sorte de pacte entre le Berger et sa brebis, un lien scellé autour de cette vocation (appel) du Berger à la brebis et réciproquement (« De ma voix je crie à l’Eternel, et il me répond de sa montagne sainte » Ps 3 5). C’est dire que Jésus noue une relation profonde avec chacun de nous. Au contraire de tous ceux qui, avant lui, s’étaient présentés comme de faux guides et bergers, lui seul nous ramène à lui et lui seul nous restitue à nous-mêmes, enrichis et transformés et en communion avec nos frères. Christ est présent à (en) nous et en plénitude, et c’est ainsi qu’il nous fait parcelle de son Corps unique. Saint-Augustin, dans un de ses sermons, a insisté sur l’unicité du Christ et sur l’unité de son Corps : il y a une seule tête, un seul corps, un seul Seigneur, et par conséquent un seul Berger et Pasteur : Christ est le Berger universel.

Dernier point : la vie moderne, surtout citadine, avec les contraintes du MBD (métro-boulot-dodo) ou de la consommation non maîtrisée, avec les inconséquences d'une exploitation irresponsable et égoïste de la nature et de ses richesses… cette vie-là est significative de la façon dont les personnes se vident de leur volonté en se laissant enfermer dans des schémas stressants et des rythmes sociaux effrénés. On s’y perd… dans la foule, dans la masse, dans l’incognito, dans l’oubli, dans l’exclusion, dans l’anonymat. Pourtant, l'espoir est encore à nos portes : Christ, le bon Pasteur, nous propose de faire l’expérience de la reconnaissance et de la confiance, de la quiétude et de la joie, de l’émancipation et de la liberté : dans son troupeau et dans ses pâturages, il nous donne la vie, l’amour et la grâce en abondance…


Crédit photo : mosaïque de la moitié du 5ème siècle "le Berger assis", au mausolée de Galla Placidia, à Ravenne, Italie.