24/04/2008

« Si quelqu'un m'aime, mon Père l'aimera
et nous irons demeurer auprès de lui. » (Jn 14, 23)

Nous voici au sixième dimanche de Pâques…

B
onjour !
On ne peut s’empêcher de relever une contradiction, ou plutôt une tension entre le viveau de maîtrise technologique auquel est parvenue l’humanité depuis une cinquantaine d’années — des progrès gigantesques, des domanies aussi divers que la médecine, les nouvelles technologies de l’information et de la commuication, la conquête de l’espace, l’exploration du vivant avec le décodage du génome humain, l'intelligence de l'infiniment grand et de l'infiniment petit, etc. — et le fait qu’à l’orée du troisième millénaire des populations entières souffrent de pandémies de toutes sortes (grippe, sida, malnutrition, paludisme, etc.), de pauvreté, d’exclusion sociale, économique et politique. Même les populations des pays dits « développés » ne sont pas épargnées par des maux caractéristiques de leurs modes de vie : surconsommation alimentaire et énergétique, financiarisation de la vie économique et sociale (tout s’achète!), métro-boulot-dodo, pouvoir d’achat… avec des conséquences immédiatement visibles : chômage, angoisse, stress, explosion des maladiees professionnelles… et radicalisation de l’individualisme. Oui ! le tableau n’est pas noirci à dessein, c’est la réalité. Tout se passe comme si l’homme était en train de perdre tous ses repères sociaux et moraux, et il n’est pas jusqu’à la religion qui ne soit concernée par ces renversements.

Et nous autres chrétiens, qui vivons bien au cœur de ce monde, quelle est notre attitude ? Quel sens donnons-nous à ces bouleversements et comment comptons-nous œuvrer à faire triompher le message du Christ ?

La seconde lecture (Première lettre de saint Pierre Apôtre (1P 3, 15-18) et le passage de l’Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean (Jn 14, 15-21) qui nous sont proposés par l’Eglise en ce sixième dimanche de Pâques, textes que j’ai voulu présenter ensemble ci-après, nous donnent les clés, la feuille de route pour notre agir et vivre ensemble après le départ du Christ : «rendre compte de sa foi et de son espérance», car le Seigneur lui-même nous rassure : je pars, mais «je ne vous laisserai pas orphelins».
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Jean-Paul II : le Pape de l'évangélisation. "N'ayez pas peur!",
aimait-il répéter (souvent aux jeunes). L'engagement missionnaire
était, pour lui, soutenu et nourri par les grâces de l'Espit-Saint

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Première lettre de saint Pierre Apôtre (1P 3, 15-18)

3

15 C'est le Seigneur, le Christ, que vous devez reconnaître dans vos coeurs comme le seul saint. Vous devez toujours être prêts à vous expliquer devant tous ceux qui vous demandent de rendre compte de l'espérance qui est en vous ;
16 mais faites-le avec douceur et respect. Ayez une conscience droite, pour faire honte à vos adversaires au moment même où ils calomnient la vie droite que vous menez dans le Christ.
17 Car il vaudrait mieux souffrir pour avoir fait le bien, si c'était la volonté de Dieu, plutôt que pour avoir fait le mal.
18 C'est ainsi que le Christ est mort pour les péchés, une fois pour toutes ; lui, le juste, il est mort pour les coupables afin de vous introduire devant Dieu. Dans sa chair, il a été mis à mort ; dans l'esprit, il a été rendu à la vie.
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E
vangile de Jésus-Christ selon saint Jean (Jn 14, 15-21)

14
15i À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « Si vous m’aimez, vous resterez fidèles à mes commandements.
16 Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous :
17 c'est l'Esprit de vérité. Le monde est incapable de le recevoir, parce qu'il ne le voit pas et ne le connaît pas ; mais vous, vous le connaissez,
18 parce qu'il demeure auprès de vous, et qu'il est en vous. Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous.
19 D'ici peu de temps, le monde ne me verra plus, mais vous, vous me verrez vivant, et vous vivrez aussi.
20 En ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous.
21 Celui qui a reçu mes commandements et y reste fidèle, c'est celui-là qui m'aime ; et celui qui m'aime sera aimé de mon Père ; moi aussi je l'aimerai, et je me manifesterai à lui. »
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Quelques repères pour notre méditation

Nous savons tous la souffrance que vit un orphelin : il perd ses racines, les premiers repères biologiques, psychologiques et sociaux de son cœur : plus de père ou de mère, c’est-à-dire plus de guide. Or Jésus donnent une assurance, une certitude aux apôtres : vous souffrirez, certes !, vous serez persécutés… mais ces tribulations seront pour vous une grâce parce que vous aurez fait le bien en restant fidèles à mes commandements et en proclamant ma parole : mais oui ! «vous me verrez vivant et vous vivrez aussi !». Vous me verrez, pourrait-on dire en chair et en esprit, lors de mes apparitions et avec les yeux de la foi.

Il est fondamental de se convaincre d’une chose : la résurrection du Christ a totalement transformé l’ordre du matériel et du spirituel ; avec Christ ressuscité, c’est le triomphe de la vie sur la mort, de l’espérance sur l’angoisse. Christ est en nous et nous en lui : il nous a justifiés, c’est-à-dire réconciliés dans le projet divin, et c’est en cela que nous sommes devenus de vrais fils de son Père, notre Père, partageant comme (et avec) lui sa gloire pour l’éternité. Cette réconciliation « par lui, avec lui et en lui » nous rend dignes d’accéder et de nous établir dans la demeure du Père parce que nous serons restés fidèles à ses commandements (au premier rang desquels l’Amour), que nous aurons accueilli son Esprit-Saint (lumière qui nous ouvrira à l’intelligence de ce qui nous est inaccessible et difficile à appréhender aujourd’hui) et que nous aurons la foi et la certitude d’être aimés de Dieu.

Après son départ, sa «disparition de nos yeux humains», Dieu redevient exclusivement Esprit. C’est pourquoi Jésus insiste auprès des apôtres : «Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : c'est l'Esprit de vérité. Le monde est incapable de le recevoir, parce qu'il ne le voit pas et ne le connaît pas ; mais vous, vous le connaissez, parce qu'il demeure auprès de vous, et qu'il est en vous. Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous.» L’apôtre Paul ne dit pas autre chose quand il écrit : «Le Seigneur est esprit, et là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté » (2 Co 3,17)

L’Esprit-Saint est le don de Dieu lui-même, offert aux hommes en abondance et en plénitude. Nos faiblesses nous empêchent de voir le Fils et le Père. C’est donc l’Esprit, défenseur et intercesseur qui illumine à cette fin notre intelligence et nourrit notre foi dans notre quête de Dieu. Lumière de (et dans) nos esprits, l’Esprit-Saint est splendeur vive et éternelle de nos âmes, il est le gage des biens de l’espérance à venir.

Finalement, ces deux textes stigmatisent une seule et même exigence : pour le chrétien, rendre compte aux autres (la communauté, le monde en général) de son espérance en Christ, oblige d’en rendre compte à soi-même d’abord : suis-je fidèle au commandement de l’Amour ?… en tant que « habité par l’Esprit-Saint, suis-je lumière dans ce monde ?… suis-je message de la joie du Christ ressuscité ?
Notre espérance, parce qu’elle nous transforme en vérité, doit être débordante comme l’Esprit-Saint qui nous remplit. Ainsi, les chrétiens que nous sommes pourrons agir, là où nous vivons, pour redonner du sens aux expériences de vie de nos frères perdus, de l’espoir à ceux qui sont angoissés, la délivrance aux captifs et la joie aux affligés. L’Esprit-Saint est providence d’amour et de sens, d’intelligence et de vie. Il est en nous jusqu’à la fn des temps, et c’est donc par lui que nous devons demander au Seigneur : «Demandez, vous obtiendrez; cherchez, vous trouverez; frappez, la porte vous sera ouverte. Celui qui demande, reçoit; celui qui cherche, trouve, et pour celui qui frappe, la porte s'ouvrira. Lequel d'entre vous donnerait une pierre à son fils qui lui demande du pain […] ? Si donc, vous qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent (Mt 7, 7-11) Dieu nous donnera ce qui est nécessaire pour continuer notre route, notre combat, son œuvre d’évangélisation. C’est ce même Esprit qui vient nous réconforter en tout temps pour que nous soyons en mesure de «rendre compte de l'espérance qui est en [nous] (1 P 3, 15b)».

Frères, réjouissons-nous de la promesse que le Christ nous fait : alors que le péché avait mis l’homme à distance de Dieu, Jésus s'est incarné et a revêtu notre condition humaine, il a lavé notre souillure originelle par sa mort et sa résurrection et il nous élève avec lui dans la glorification de son Père. L’Esprit-saint qu’il nous promet achève désormais l’inhabitation et l’incorporation de Dieu en nous et réciproquement : nous devenons, en vérité, des membres vivants du Christ vivant.

Pour l’Eglise, cette inhabitation est tout aussi réelle. La Pentecôte à venir peut être considérée comme l’épiphanie de l’Eglise elle-même au sens où elle est appelée à se monter au monde, à se rendre de plus en plus présente au (dans le) monde (en usant à bon escient des formidables possibilités qu’offrent justement ces nouvelles technlogies de l’information et de la communication), à sortir de sa léthargie pour agir et proclamer la parole de Dieu au milieu et au plus près de hommes. Dire de l’Eglise qu’elle est sainte, c’est affirmer qu’elle est la matrice au sein de laquelle Dieu — Père, Fils et Esprit-Saint — viennent « faire demeure » : c’est en église, à notre tour et chacun selon les talents que nous aurons reçu de l'Esprit-Saint, que nous sommes enfantés à la vie de Dieu. Alors, que l’Esprit de Dieu repose sur nous, qu’il nous consacre et qu’il nous envoie proclamer la paix et la joie de Dieu à tous les hommes…


Crédit photo : www.seletlumieretv.org

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