18/08/2013

« C’est un feu que je suis venu apporter sur la terre »


Chers amis, bonjour !

Notre foi est-elle suffisamment solide pour résister — ainsi que nous le demande l’apôtre Paul — à l’épreuve de la persécution, de la faim, du dénuement, du danger ou du glaive ? Dans les deux premiers textes de ce 20e dimanche du temps ordinaire, il est question de combat, de résistance et d’endurance dans l’épreuve que peuvent vivre les chrétiens, parfois au péril de leur vie.
Dans l'extrait de l’Évangile de Jean apparaît le profil du parfait résistant, Christ lui-même affrontant sans honte l’humiliation et la méchanceté des hommes qui ont entrepris de le condamner à mort. Face à ces violences, Jésus allume le feu, ce feu qu’il nous a promis par son Esprit Saint, ce feu qui fait de nous des torches vivantes au cœur d’un monde à transformer par la puissance de son amour.

Pour nous aider à aller plus loin dans la compréhension de ces textes, j’ai le plaisir de vous proposer ci-dessous l’homélie du RP Raymond HARDINGUÉDY de Saint-Priest.



Lecture du livre de Jérémie (38, 4-6. 8-10)
Le prophète signe de contradiction
Pendant le siège de Jérusalem, les chefs qui tenaient Jérémie en prison dirent au roi Sédécias :
« Que cet homme soit mis à mort : en parlant comme il le fait, il démoralise tout ce qui reste de combattants dans la ville, et toute la population. Ce n’est pas le bonheur du peuple qu’il cherche, mais son malheur. »
Le roi répondit : « Il est déjà entre vos mains, et le roi ne peut rien contre vous ! » Alors ils se saisirent de Jérémie et le jetèrent dans la citerne du prince Melkias, dans la cour de la prison. On le descendit avec des cordes. Dans cette citerne il n’y avait pas d’eau, mais de la boue, et Jérémie s’enfonça dans la boue. Un officier du palais, l’Éthiopien Ébed-Mélek, vint trouver le roi : « Mon Seigneur le roi, ce qu’ils ont fait au prophète Jérémie, c’est mal ! Ils l’ont jeté dans la citerne, il va y mourir de faim ! » Alors le roi donna cet ordre à l’Éthiopien Ébed-Mélek : « Prends trois hommes avec toi, et retire de la citerne le prophète Jérémie avant qu’il ne meure. »



Lecture de la lettre aux Hébreux (12, 1-4)
Le combat dans la foi à l’exemple de Jésus Frères, ceux qui ont vécu dans la foi, foule immense de témoins, sont là qui nous entourent. Comme eux, débarrassons-nous de tout ce qui nous alourdit, et d’abord du péché qui nous entrave si bien ; alors nous courrons avec endurance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus, qui est à l’origine et au terme de la foi.
Renonçant à la joie qui lui était proposée, il a enduré, sans avoir de honte, l’humiliation de la croix, et, assis à la droite de Dieu, il règne avec lui. Méditez l’exemple de celui qui a enduré de la part des pécheurs une telle hostilité, et vous ne serez pas accablés par le découragement. Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang dans votre lutte contre le péché.




Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (12, 49-53)
Jésus, cause de division entre les hommes
Jésus disait à ses disciples : « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! Je dois recevoir un baptême, et comme il m’en coûte d’attendre qu’il soit accompli ! Pensez-vous que je sois venu mettre la paix dans le monde ? Non, je vous le dis, mais plutôt la division. Car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées : trois contre deux et deux contre trois ; ils se diviseront : le père contre le fils et le fils contre le père, la mère contre la fille et la fille contre la mère, la belle-mère contre la belle-fille et la belle-fille contre la belle-mère. »



Homélie du RP Raymond HARGINDÉGUY (de Saint-Priest – France)

« C’est un feu que je suis venu apporter sur la terre » (v. 49a).
Jésus est déconcertant.  Il n'invite pas à se méfier du feu.  Il préfère l'incendie aux tiédeurs.  Jean Baptiste avait prédit un Messie qui  baptiserait « dans l’Esprit Saint et le feu » (Lc 3, 16). Autant dire, qu’à la suite de Jésus, ce ne sera jamais le calme plat. Son désir de feu - d’autres textes nous le disent –  c’est le désir de nous communiquer le feu du Saint Esprit.
Rappelons-nous les langues de feu de la Pentecôte.  Ou bien le feu de la surabondance de son amour : « Ayant aimé les siens, il les aima jusqu’au bout » (Jn 13, 1), nous dit l’évangéliste Jean.  Et nous sommes invités à aller, nous aussi, aux extrêmes de l’amour.  Evidemment, chacune/chacun de nous se pose la question : est-ce bien un feu brûlant qui m’entraîne, moi, à la suite de Jésus, au service de Dieu le Père et de mes frères et sœurs en humanité ?

Ce texte de Luc peut nous choquer, mais reconnaissons qu’il est d’une étonnante modernité : Jésus n'apporte pas la tranquillité, le calme plat, la paix des cimetières.  Il sèmerait plutôt la division dans les familles, au cœur même de nos maisons. Mais comment comprendre ce texte ?  Quand on sait que Jésus ne prétend pas surcharger nos vies par des lois toujours plus lourdes…

Cette division dont il nous parle est tout autre chose qu'un désordre, une guerre des uns contre les autres :
  • Il vient séparer le père du fils, et le fils du père. La mère de la fille, et la fille de la mère.
  • Il veut nous aider à couper nos liens de parenté, de citoyenneté, d’allégeance religieuse  quand ils nous retiennent et nous ligotent.
  • Il veut nous aider à couper les relations possessives, exclusives, les mélanges inextricables.  
  • Il vient sauver la capacité d'éloignement et de distance qui sont la condition de l'amour.
  • Il nous propose de laisser ouvert l'espace de nos vies.
  • Il demande qu'on ne jette pas tout notre désir dans le seul amour de notre parenté de notre pays, de notre église.

Mais, dans ce texte de l’évangéliste Luc,  Jésus nous dit aussi son tiraillement à la pensée de la mort, de sa mort. Il proteste contre ce passage par la mort. L’affrontement avec la mort, il le redoute : « C’est un baptême que j’ai à recevoir, et comme cela me pèse jusqu'à ce qu'il soit accompli ! » (v. 50)  Ce baptême, dont parle Jésus, est son immersion dans les souffrances qui l’attendent et sa mort. Sa passion pour l’homme le conduira jusqu’à l’agonie sur la croix. Il le sait, il le redoute.

Ne l'oublions pas : au cours de nos eucharisties,  c’est au «corps livré» et au «sang versé» que nous communions.  Il est bon de nous rappeler que l’on ne peut suivre le Christ sans épouser ses choix et sans prendre les mêmes risques que lui,  y compris ceux de l’opposition, des critiques et parfois de l’hostilité.  Jésus n’a cessé de heurter la mentalité et la pratique des croyants de son temps.  Ils l’en crucifieront.  Mais, nous le savons et c’est notre foi qui nous le fait dire : il transformera la défaite de la mort en victoire de la vie, par sa résurrection.

Autour de nous, le monde est en feu : feu de la haine, de la guerre, de la jalousie, du rejet des différences...  La justice est bafouée, les pauvres écrasés.  Fasse le Seigneur Jésus que nous ne restions jamais froids  devant le scandale de la misère, de la violence et de l’injustice.  Que son feu enflamme nos cœurs et nous pousse à l’indignation et parfois au combat.

19/05/2013

« Le Paraclet, l'Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, vous enseignera toutes choses et vous fera ressouvenir de tout ce que je vous ai dit.»


Dimanche 19 mai 2013

« En ces jours-là, Pierre se leva au milieu des frères, le nombre des personnes réunies étant d'environ cent vingt. » (Actes 1, 15) — « Ceux qui acceptèrent sa parole furent baptisés ; et, en ce jour-là, le nombre des disciples s'augmenta d'environ trois mille âmes. » (Actes 2, 41)




Le Pape François sur la Place Saint-Pierre à Rome,
tenant dans sa main une colombe


Chers amis, bonjour !

Oui, c’est Pentecôte aujourd’hui, et bonne fête à vous tous ! En ce jour où nous célébrons la venue de l’Esprit Saint dans nos vies pour nous soutenir et nous révéler ce que nous ne savons ou ne pouvons comprendre par nos seules forces, quoi de plus normal que de faire montre d’universalité. En effet, Dieu, le même et l’Unique, se manifeste à tous les hommes de toutes nations et cultures. Pentecôte, c’est le triomphe de la diversité, c’est la confirmation de notre statut d’enfants et d’héritiers de Dieu grâce à Jésus Christ. D’emblée, je voudrais partager avec vous cette courte prière universelle proposée par la liturgie des heures en ce jour de fête…


Renouvelle, Seigneur, la face de la terre !
Ô Christ, glorifié à la droite de Dieu, tu as répandu sur tes disciples l’Esprit Saint reçu du Père :
       — envoie ton Esprit : qu’il crée un monde nouveau.
Ô Christ, par ton souffle, tu as donné l’Esprit à tes Apôtres pour qu’ils aient le pouvoir de remettre les péchés :
       — envoie ton Esprit : qu’il efface nos fautes.
Ô Christ, tu as promis que l’Esprit nous enseignerait toute chose et nous rappellerait ce que tu avais dit toi-même :
       — envoie ton Esprit : qu’il éclaire notre foi.
Ô Christ, tu as promis d’envoyer l’Esprit de vérité pour qu’il rende témoignage à ton sujet :
       — envoie ton Esprit : qu’il fasse de nous des témoins fidèles.


Première lecture - Actes des Apôtres 2, 1-11
1 Quand arriva la Pentecôte (le cinquantième jour après Pâques),
ils se trouvaient réunis tous ensemble.
2 Soudain il vint du ciel un bruit pareil à celui d'un violent coup de vent :
toute la maison où ils se tenaient en fut remplie.
3 Ils virent apparaître comme une sorte de feu qui se partageait en langues
et qui se posa sur chacun d'eux.
4 Alors ils furent tous remplis de l’Esprit Saint :
ils se mirent à parler en d'autres langues,
et chacun s'exprimait selon le don de l'Esprit.
5 Or, il y avait, séjournant à Jérusalem, des Juifs fervents,
issus de toutes les nations qui sont sous le ciel.
6 Lorsque les gens entendirent le bruit, ils se rassemblèrent en foule.
Ils étaient dans la stupéfaction
parce que chacun d'eux les entendait parler sa propre langue.
7 Déconcertés, émerveillés, ils disaient :
« Ces hommes qui parlent ne sont-ils pas tous des Galiléens ?
8 Comment se fait-il que chacun de nous les entende dans sa langue maternelle ?
9 Parthes, Mèdes et Elamites,
habitants de la Mésopotamie, de la Judée et de la Cappadoce,
des bords de la mer Noire, de la province d'Asie,
10 de la Phrygie, de la Pamphylie,
de l'Egypte et de la Libye proche de Cyrène, Romains résidant ici,
11 Juifs de naissance et convertis, Crétois et Arabes,
tous, nous les entendons proclamer dans nos langues les merveilles de Dieu. »
 
Psaume 103 (104), 1.24, 29-30, 31.34
1 Bénis le SEIGNEUR, ô mon âme ;
SEIGNEUR mon Dieu, tu es si grand !
24 Quelle profusion dans tes œuvres, SEIGNEUR !
La terre s'emplit de tes biens.

29 Tu reprends leur souffle, ils expirent
et retournent à leur poussière.
30 Tu envoies ton souffle ; ils sont créés ;
tu renouvelles la face de la terre.

31 Gloire au SEIGNEUR à tout jamais !
Que Dieu se réjouisse en ses oeuvres !
34 Que mon poème lui soit agréable ;
moi, je me réjouis dans le SEIGNEUR.
Deuxième lecture - Romains 8, 8 - 17
Frères,
8 sous l'emprise de la chair, on ne peut pas plaire à Dieu.
9 Or vous, vous n'êtes pas sous l'emprise de la chair,
mais sous l'emprise de l'Esprit,
puisque l'Esprit de Dieu habite en vous.
Celui qui n'a pas l'Esprit du Christ
ne lui appartient pas.
10 Mais si le Christ est en vous,
votre corps a beau être voué à la mort à cause du péché,
l'Esprit est votre vie,
parce que vous êtes devenus des justes.
11 Et si l'Esprit
de celui qui a ressuscité Jésus d'entre les morts
habite en vous,
celui qui a ressuscité Jésus d'entre les morts
donnera aussi la vie à vos corps mortels
par son Esprit qui habite en vous.
12 Ainsi donc, frères, nous avons une dette,
mais ce n'est pas envers la chair ;
nous n'avons pas à vivre sous l'emprise de la chair.
13 Car si vous vivez sous l'emprise de la chair,
vous devez mourir ;
mais si, par l'Esprit,
vous tuez les désordres de l'homme pécheur,
vous vivrez.
14 Tous ceux qui se laissent conduire par l'Esprit de Dieu,
ceux-là sont fils de Dieu.
15 L'Esprit que vous avez reçu
ne fait pas de vous des esclaves,
des gens qui ont encore peur ;
c'est un Esprit qui fait de vous des fils ;
poussés par cet Esprit,
nous crions vers le Père en l'appelant « Abba ! »
16 C'est donc l’Esprit Saint lui-même
qui affirme à notre esprit
que nous sommes enfants de Dieu.
17 Puisque nous sommes ses enfants,
nous sommes aussi ses héritiers ;
héritiers de Dieu,
héritiers avec le Christ,
à condition de souffrir avec lui
pour être avec lui dans sa gloire.
Évangile - Jean 14, 15-16. 23b-26
À l'heure où Jésus passait de ce monde à son Père,
il disait à ses disciples :
15 « Si vous m'aimez,
vous resterez fidèles à mes commandements.
16 Moi, je prierai le Père,
et il vous donnera un autre Défenseur
qui sera pour toujours avec vous.

23 Si quelqu'un m'aime,
il restera fidèle à ma parole ;
mon Père l'aimera,
nous viendrons chez lui,
nous irons demeurer auprès de lui.
24 Celui qui ne m'aime pas
ne restera pas fidèle à mes paroles.
Or, la parole que vous entendez
n'est pas de moi :
elle est du Père qui m'a envoyé.
25 Je vous dis tout cela
pendant que je demeure encore avec vous ;
26 mais le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom,
lui, vous enseignera tout,
et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit. »
 


Plusieurs symboles dans ces textes :
• Tout d’abord dans le premier, il est question de la ville de Jérusalem. C’est là que Jésus institua l’Eucharistie, c’est dans cette ville qu’il souffrit sa passion, qu’il fut mis au tombeau qu’il ressuscita le troisième jour… Oui, Jérusalem, une ville chargée de symboles forts, et dans laquelle grouille un nombre incroyable de gens de toutes origines, et qui sont là résidents pour certains, travailleurs saisonniers pour d’autres, pèlerins ou touristes pour d’autres encore. Et au milieu de tout ce monde, dans une bâtisse, le cénacle, les apôtres se sont calfeutrés par crainte des représailles de la part du pouvoir romain et des persécuteurs des disciples du Christ mis à mort mais ressuscité le troisième jour. Ce Jésus est déjà apparu aux siens pour les rassurer et leur faire « toucher du doigt » la matérialité de sa résurrection : « Mets ton doigt dans mon côté », avait-il demandé à Thomas l’incrédule, avant de leur dire à tous : « Heureux qui croit sans avoir vu ! ». Or, même depuis ce jour, l’inquiétude est toujours là, mais l’espérance encore plus forte du fait de la présence parmi eux de Marie. Pourtant, Jésus leur avait fait une promesse, une belle promesse : je m’en retourne vers mon Père, mais je vous enverrai L’esprit Saint qui vous instruira de tout ce que vous n’avez pas compris… : « Soudain il vint du ciel un bruit pareil à celui d'un violent coup de vent : toute la maison où ils se tenaient en fut remplie » […] Alors, remplis de l’Esprit Saint, ils sortirent de leur « enclos » et se mirent à proclamer l’Évangile de Jésus Christ à la foule qui était là : « … chacun d'eux les entendait parler sa propre langue. »

• Souvent, Dieu s’est manifesté aux hommes sous la forme d’un Esprit. Dans le livre de l'Exode, on peut lire : « Le troisième jour, quand vint le matin, il y eut des voix, des éclairs, une nuée pesant sur la montagne et la voix d'un cor très puissant ; dans le camp, tout le peuple trembla. Moïse fit sortir le peuple à la rencontre de Dieu hors du camp, et ils se tinrent tout en bas de la montagne. La montagne du Sinaï n'était que fumée, parce que le SEIGNEUR y était descendu dans le feu ; sa fumée monta comme le feu d'une fournaise, et toute la montagne trembla violemment ... Moïse parlait et Dieu lui répondait par la voix du tonnerre ». (Ex 19, 16-19). C’est ce même souffle, Parole de feu, qui présida à la création du monde. C’est ce même Esprit que le psalmiste invoque dans les psaume 103/104 : (29) « Tu reprends leur souffle, ils expirent et retournent à leur poussière. (30) Tu envoies ton souffle ; ils sont créés ; tu renouvelles la face de la terre. »

• De même, on ne peut pas s’empêcher de faire ici le parallèle avec l’épisode de Babel. A l’occasion de la construction d cette fameuse tour, dont les instigateurs pensaient qu’elle devait monter jusqu’au ciel comme pour aller défier Dieu dans sa demeure, les différents ouvriers qui étaient là furent contraints de ne parler qu’une seule langue. Il leur était donc demandé de se renier dans leur identité même pour apprendre une langue qui n’avait rien d’universelle, une sorte d’esperanto sans chair, sans contenu, sans âme. Il fallait que s’effacent les différences de ces femmes et hommes et faire place nette à la langue du dominateur. Au contraire de ce monde d’exclusion, d’oppression et contrainte au reniement de soi et du véhicule de sa particularité culturelle, sa langue, le monde de la Pentecôte est l’espace d’expression de la liberté, d’exaltation de la diversité. Là où on voulait taire les différences pour l’expression d’une fausse unicité, L’Esprit Saint de Dieu manifeste l’unité de la Parole de Dieu dans plusieurs langues. Chacun entend proclamer l’Évangile de Jésus-Christ dans sa langue maternelle. C’est la vraie universalité qui est à l’œuvre ici. Dieu se manifeste comme l’Unique dans toutes les cultures, à tous les peuples. Et chacun est appelé à l’annoncer et le vire dans la richesse de sa particularité.

• C’est là même le sens de l’Église : à la fois une et universelle car c’est le même Esprit qui est à l’œuvre partout dans le monde pour achever en chacun l’œuvre de la création. Et les chrétiens que nous sommes, surtout dans le monde d’aujourd’hui submergé par les nouvelles divinités que sont les technologies, le consumérisme et le pouvoir de domination… nous sommes invités à faire œuvre de contagion.  Oui, parce que nous avons reçu l’Esprit Saint de Dieu et qu’il a incubé en nous, nous avons mission de le transmettre à tous nos frères de par le monde. Transmettre par le témoignage de nos vies « d’allumés », transmettre par la proclamation de cette Parole qui enflamme et transforme ceux qui se laissent touchés par elle.

Bien sûr, à la Pentecôte nous avons l’habitude de parler des sept dons de l’Esprit Saint que nous invoquons par le merveilleux chant du Veni Creator Spiritus. Mais en réalité, comme le rappelle Jésus lui-même dans le texte de l’Évangile de ce jour : « Si quelqu'un m'aime, il restera fidèle à ma parole; mon Père l'aimera,
nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui. »
La Pentecôte, c’est donc par excellence la fête de l’amour. Dieu dont le Fils, obéissant jusqu’à la mort sur la croix, telle une victime expiatoire du péché des hommes, fait aujourd’hui don de sa présence agissante. Car son Esprit est créateur, il renouvelle ce qui est vieux et usé, il redresse ce qui est cassé, il rafraîchit ce qui est brûlant, il apaise ce qui est remuant… La Pentecôte, c’est bien la fête de l’Amour de Dieu pour les hommes.

• Enfin, on eut dire qu’avec la Pentecôte Dieu nous confirme dans notre statut d’héritiers. L’esprit Saint est le souffle qui désormais nous anime dans notre projection dans le monde, un monde difficile, cruel mais à bâtir avec ce nouveau matériau qui s’appelle « Amour ». Comme les apôtres qui sortent de leur cachette, nous sommes désormais libérés, affranchis et nous n’avons plus peur de dire au monde notre foi et de montrer dans nos vies si différentes les unes des autres comment ce même Esprit nous habite et nous transforme. C’est Paul qui nous dit dans sa Lettre aux Romains : « L'Esprit que vous avez reçu ne fait pas de vous des esclaves, des gens qui ont encore peur ; c'est un Esprit qui fait de vous des fils ». Chaque fois que nous contribuerons à réconcilier des frères, des peules qui se haïssent, c’est l’Esprit Saint de Dieu qui est à l’œuvre ; chaque fois que nous consolerons les malheureux, les opprimés, les veuves et les orphelins, c’est encore l’Esprit Saint de Dieu qui est à l’œuvre ; chaque fois que nous aurons visité et réconforté les malades, les laissés pour compte, les prisonniers… c’est encore et toujours l’Esprit Saint de Dieu qui est à l’œuvre.


27/04/2013

"Je suis le vrai berger (…) Mes brebis écoutent ma voix;
moi je les connais, et elles me suivent."


Chers amis, bonjour !

Cela fait un bon moment que nous ne nous sommes pas retrouvés autour des textes de la liturgie dominicale, ni des autres célébrations festives. Voilà pourquoi je ne cache pas mon plaisir de partager avec vous cette méditation des textes du dimanche dernier (21 avril 2013).
-        Rester fidèle à la grâce de Dieu et se laisser habiter par l’Esprit Saint qui rend joyeux, tel est le message du premier texte extrait des Actes des Apôtres (Ac 13, 14. 43-52).
-        Le psaume 99 (100) 1-3. 5) magnifie la bonté du Seigneur.
-        Le texte de l’Apocalypse de Jean (7,  9… 17) nous fait contempler le projet de Dieu pour les hommes dans sa forme et sa force abouties. A l’homme, aux hommes (car il est ici question d’universalité de ce projet — « Une foule de toutes nations, races, peuples et langues », cette multitude justifiée par le Serviteur Souffrant tel que prophétisé par Isaïe dans les fameux Quatre chants), Jean donne à voir la réalité de la promesse du Royaume.
-        Et puis, il y a cet évangile du « Bon pasteur » (Apocalypse 10, 27-30) qui nous décrit, bien au-delà de l’image et du symbole, la fonction pastorale du Christ et de tous ceux qui acceptent de le suivre. Berger de la multitude, ne sommes-nous pas conviés, nous-aussi, à l’être pour nos frères, nos communautés ?


PREMIÈRE LECTURE - Ac 13, 14. 43-52
Paul et Barnabé
14 étaient arrivés à Antioche de Pisidie.
Le jour du sabbat, ils entrèrent à la synagogue.

43 Quand l'assemblée se sépara,
beaucoup de Juifs et de convertis au judaïsme
les suivirent.
Paul et Barnabé, parlant avec eux,
les encourageaient à rester fidèles à la grâce de Dieu.
44 Le sabbat suivant,
presque toute la ville se rassembla
pour entendre la parole du Seigneur.
45 Quand les Juifs virent tant de monde,
ils furent remplis de fureur ;
ils repoussaient les affirmations de Paul avec des injures.
46 Paul et Barnabé leur déclarèrent avec assurance :
« C'est à vous d'abord
qu'il fallait adresser la parole de Dieu.
Puisque vous la rejetez
et que vous-mêmes ne vous jugez pas dignes de la vie éternelle,
eh bien ! nous nous tournons vers les païens.
47 C'est le commandement que le Seigneur nous a donné :
J'ai fait de toi la lumière des nations
pour que, grâce à toi,
le salut parvienne jusqu'aux extrémités de la terre. »
48 En entendant cela, les païens étaient dans la joie
et rendaient gloire à la parole du Seigneur ;
tous ceux que Dieu avait préparés pour la vie éternelle
devinrent croyants.
49 Ainsi, la parole du Seigneur se répandait dans toute la région.
50 Mais les Juifs entraînèrent les dames influentes
converties au judaïsme,
ainsi que les notables de la ville ;
ils provoquèrent des poursuites contre Paul et Barnabé,
et les expulsèrent de leur territoire.
51 Ceux-ci secouèrent contre eux la poussière de leurs pieds
et se rendirent à Iconium,
52 tandis que les disciples étaient pleins de joie dans l'Esprit Saint.
PSAUME 99 (100) 1-3. 5
1 Acclamez le SEIGNEUR, terre entière,
2 servez le SEIGNEUR dans l'allégresse,
venez à lui avec des chants de joie !

3 Reconnaissez que le SEIGNEUR est Dieu :
il nous a faits et nous sommes à lui,
nous, son peuple, son troupeau.

5 Oui, le SEIGNEUR est bon,
éternel est son amour,
sa fidélité demeure d'âge en âge.

DEUXIÈME LECTURE - Apocalypse 7, 9 ... 17
Moi, Jean,
9 j'ai vu une foule immense,
que nul ne pouvait dénombrer,
une foule de toutes nations, races, peuples et langues.
Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l'Agneau,
en vêtements blancs,
avec des palmes à la main.

14 L'un des Anciens me dit :
« Ils viennent de la grande épreuve ;
ils ont lavé leurs vêtements,
ils les ont purifiés dans le sang de l'Agneau.
15 C'est pourquoi ils se tiennent devant le trône de Dieu,
et le servent jour et nuit dans son temple.
Celui qui siège sur le Trône
habitera parmi eux.
16 Ils n'auront plus faim, ils n'auront plus soif,
la brûlure du soleil ne les accablera plus,
17 puisque l'Agneau qui se tient au milieu du Trône
sera leur Pasteur
pour les conduire vers les eaux de la source de vie.
Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux. »

ÉVANGILE - Jean 10, 27-30
Jésus avait dit aux Juifs :
« Je suis le bon pasteur (le vrai berger). »
Il leur dit encore :
27 « Mes brebis écoutent ma voix ;
moi je les connais,
et elles me suivent.
28 Je leur donne la vie éternelle :
jamais elles ne périront,
personne ne les arrachera de ma main.
29 Mon Père, qui me les a données, est plus grand que tout,
et personne ne peut rien arracher de la main du Père.
30 Le Père et moi,
nous sommes UN. »



 
Le RP Mounier, Jésuite de la Communauté de la Rue Sala à LYON (2°), m’a fait l’honneur et l’amitié de me confier l’homélie qu’il a faite ce dimanche 21 avril et de la poster sur mon blog. Je l’en remercie infiniment car j’ai toujours eu grand plaisir à écouter ses prédications, tant elles sont justes, tant elles propose à chaque fois un regard neuf, décalé et original des textes proposés par la liturgie dominicale.

« Cette image du berger et des brebis nous est bien connue. En notre temps de chevaux vapeur, de civilisation urbaine, de villes béton et de bruit, elle ne nous est pas quotidienne. Certes, nous pouvons avoir le souvenir d’un voyage à la campagne ou à la montagne, ou encore avoir en tête des images tirées d’un film ou de la télévision, mais cette image ne relève pas de notre expérience habituelle et, du même coup, au mieux, peut avoir une portée poétique ou au pire paraître archaïque et mièvre, bref ne pas avoir de quoi habiter nos cœurs, nos esprits, et être force d’engagement aujourd’hui.
Alors, nous devons la considérer dans son mouvement. Si la caricature consiste à schématiser une image pour n’en voir que le ridicule, il est aussi une manière de lire une image qui consiste à en faire apparaître la structure, comme on le ferait en face d’un monument ou d’un visage pour mettre en évidence l’armature, les lignes de force qui expriment l’essentiel de ce qu’on regarde  et en donner la signification. C’est comme cela que nous devons regarder ces quelques lignes sur ce pasteur et ses brebis. Et nous devons d’autant mieux le faire aujourd’hui que ce texte revient dans une autre version plus développée où il est question de porte, d’enclos, de brebis perdue. Ici, la parabole du berger et des brebis est réduite à l’essentiel, c’est cet essentiel que nous devons considérer et voir comment il répond très profondément à la nature de l’homme et donc à notre expérience. Que voyons-nous ? Un berger et un troupeau. Nous savons que la brebis a besoin du berger pour trouver les bons points d’eau, pour être conduite vers les bonnes prairies et éviter les précipices, pour être protégée des voleurs ou des prédateurs come le loup. Alors, le berger s’applique intensément d’autant qu’il a besoin des brebis, elles sont sa fortune ; y toucher c’est comme toucher à lui-même ; les perdre, c’est perdre ce qui le fait vivre. Le berger et la brebis ont ainsi besoin l’un de l’autre.
Mais à ce point, l’évangile se détache de l’image, parce qu’au bout du compte le berger tuera ou fera tuer à son profit la brebis, alors que le berger de la parabole donne sa vie pour ses brebis, donne la vie éternelle. En disant cela, nous sommes très fidèle à l’évangile dès lors que l’on considère que dans le passage qui précède le texte lu, il est question de la contestation des Juifs à l’égard de Jésus et, dans le texte qui suit, des Juifs qui cherchent des pierres pour le lapider.
Mais il est un autre point que cette parabole met en évidence et qui est très important, à savoir qu’on pourrait croire que dans le troupeau comme dans une foule, chacun est anonyme. Notre époque aime bien les immatriculations et les statistiques. Or ici, en écho de ce que nous dit l’évangile ailleurs, le berger connaît ses brebis par leur nom et ses brebis le connaissent et, du même coup, le suivent. Non seulement le berger assume la responsabilité de tous, il assume aussi la responsabilité de chacun, dans le fond de sa personnalité. L’amour dont Dieu aime l’humanité, dont il aime son Église, est identique à celui par lequel il aime chacun. C’est un mystère, mais un mystère qui correspond tout à fait à l’attente de notre condition humaine. Des philosophes grecs s’étaient penchés justement sur cette question qui paraissait abstraite : comment penser l’un et le multiple ?  Autrement dit, comment penser avec le même degré d’intensité l’ensemble des hommes et chacun en particulier, et penser à chacun sans le détacher de l’univers auquel il appartient. À notre petite cervelle humaine, cela est impossible car il y a toujours une attention privilégiée à l’un ou à l’autre. Or l’amour de Dieu est tel qu’en se donnant à l’un il n’enlève rien ni à l’autre ni à l’ensemble.
Notre foi en Jésus, certes ne change pas notre manière humaine de penser, mais nous fait participer de ce regard de Dieu sur le monde et sur chacun. La solidarité n’est pas exclusive de la vie personnelle. La chance de la foi est de nous permettre de lier les deux dans un seul mouvement d’unité comme le Père, créateur du ciel et de la terre est Un avec les Fils dont le corps singulier, incarné, est, comme nous le disons à la messe, offert pour la multitude.
Cette force de la foi peut être notre expérience… mais aussi il arrive que l’actualité nous en donne l’illustration. Je ne voudrais céder ni à la récupération ni à l’utilisation abusive — tant leur modestie et leur discrétion ont été grandes — mais nous avons été les témoins de la libération d’otages dont les médias nous ont dit qu’ils avaient une foi profonde qui les avait aidés à tenir. Nul doute qu’ils avaient le sens et de l’infini de Dieu et de sa présence au fond du cœur de chacun. Nul doute qu’ils avaient une prière personnelle et un sens du don de soi aux autres membres du troupeau. Membre du troupeau, chacun s’en savait aussi le berger et leur face-à-face avec Dieu dans la prière devait être aussi un face-à-face avec chacun des autres membres de la famille.
Rendons grâce au Seigneur pour ce don en un sens inimitable, en tout cas impossible à apprendre comme on apprendrait une leçon de yoga — pas une recette — mais comme un long chemin à parcourir comme nous dit l’évangile en étant, comme nous dit l’évangile en étant la brebis qui écoute la Parole de son berger. Alors, à notre tour, sachons aussi être des bergers à ‘image du Seigneur.