27/04/2013

"Je suis le vrai berger (…) Mes brebis écoutent ma voix;
moi je les connais, et elles me suivent."


Chers amis, bonjour !

Cela fait un bon moment que nous ne nous sommes pas retrouvés autour des textes de la liturgie dominicale, ni des autres célébrations festives. Voilà pourquoi je ne cache pas mon plaisir de partager avec vous cette méditation des textes du dimanche dernier (21 avril 2013).
-        Rester fidèle à la grâce de Dieu et se laisser habiter par l’Esprit Saint qui rend joyeux, tel est le message du premier texte extrait des Actes des Apôtres (Ac 13, 14. 43-52).
-        Le psaume 99 (100) 1-3. 5) magnifie la bonté du Seigneur.
-        Le texte de l’Apocalypse de Jean (7,  9… 17) nous fait contempler le projet de Dieu pour les hommes dans sa forme et sa force abouties. A l’homme, aux hommes (car il est ici question d’universalité de ce projet — « Une foule de toutes nations, races, peuples et langues », cette multitude justifiée par le Serviteur Souffrant tel que prophétisé par Isaïe dans les fameux Quatre chants), Jean donne à voir la réalité de la promesse du Royaume.
-        Et puis, il y a cet évangile du « Bon pasteur » (Apocalypse 10, 27-30) qui nous décrit, bien au-delà de l’image et du symbole, la fonction pastorale du Christ et de tous ceux qui acceptent de le suivre. Berger de la multitude, ne sommes-nous pas conviés, nous-aussi, à l’être pour nos frères, nos communautés ?


PREMIÈRE LECTURE - Ac 13, 14. 43-52
Paul et Barnabé
14 étaient arrivés à Antioche de Pisidie.
Le jour du sabbat, ils entrèrent à la synagogue.

43 Quand l'assemblée se sépara,
beaucoup de Juifs et de convertis au judaïsme
les suivirent.
Paul et Barnabé, parlant avec eux,
les encourageaient à rester fidèles à la grâce de Dieu.
44 Le sabbat suivant,
presque toute la ville se rassembla
pour entendre la parole du Seigneur.
45 Quand les Juifs virent tant de monde,
ils furent remplis de fureur ;
ils repoussaient les affirmations de Paul avec des injures.
46 Paul et Barnabé leur déclarèrent avec assurance :
« C'est à vous d'abord
qu'il fallait adresser la parole de Dieu.
Puisque vous la rejetez
et que vous-mêmes ne vous jugez pas dignes de la vie éternelle,
eh bien ! nous nous tournons vers les païens.
47 C'est le commandement que le Seigneur nous a donné :
J'ai fait de toi la lumière des nations
pour que, grâce à toi,
le salut parvienne jusqu'aux extrémités de la terre. »
48 En entendant cela, les païens étaient dans la joie
et rendaient gloire à la parole du Seigneur ;
tous ceux que Dieu avait préparés pour la vie éternelle
devinrent croyants.
49 Ainsi, la parole du Seigneur se répandait dans toute la région.
50 Mais les Juifs entraînèrent les dames influentes
converties au judaïsme,
ainsi que les notables de la ville ;
ils provoquèrent des poursuites contre Paul et Barnabé,
et les expulsèrent de leur territoire.
51 Ceux-ci secouèrent contre eux la poussière de leurs pieds
et se rendirent à Iconium,
52 tandis que les disciples étaient pleins de joie dans l'Esprit Saint.
PSAUME 99 (100) 1-3. 5
1 Acclamez le SEIGNEUR, terre entière,
2 servez le SEIGNEUR dans l'allégresse,
venez à lui avec des chants de joie !

3 Reconnaissez que le SEIGNEUR est Dieu :
il nous a faits et nous sommes à lui,
nous, son peuple, son troupeau.

5 Oui, le SEIGNEUR est bon,
éternel est son amour,
sa fidélité demeure d'âge en âge.

DEUXIÈME LECTURE - Apocalypse 7, 9 ... 17
Moi, Jean,
9 j'ai vu une foule immense,
que nul ne pouvait dénombrer,
une foule de toutes nations, races, peuples et langues.
Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l'Agneau,
en vêtements blancs,
avec des palmes à la main.

14 L'un des Anciens me dit :
« Ils viennent de la grande épreuve ;
ils ont lavé leurs vêtements,
ils les ont purifiés dans le sang de l'Agneau.
15 C'est pourquoi ils se tiennent devant le trône de Dieu,
et le servent jour et nuit dans son temple.
Celui qui siège sur le Trône
habitera parmi eux.
16 Ils n'auront plus faim, ils n'auront plus soif,
la brûlure du soleil ne les accablera plus,
17 puisque l'Agneau qui se tient au milieu du Trône
sera leur Pasteur
pour les conduire vers les eaux de la source de vie.
Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux. »

ÉVANGILE - Jean 10, 27-30
Jésus avait dit aux Juifs :
« Je suis le bon pasteur (le vrai berger). »
Il leur dit encore :
27 « Mes brebis écoutent ma voix ;
moi je les connais,
et elles me suivent.
28 Je leur donne la vie éternelle :
jamais elles ne périront,
personne ne les arrachera de ma main.
29 Mon Père, qui me les a données, est plus grand que tout,
et personne ne peut rien arracher de la main du Père.
30 Le Père et moi,
nous sommes UN. »



 
Le RP Mounier, Jésuite de la Communauté de la Rue Sala à LYON (2°), m’a fait l’honneur et l’amitié de me confier l’homélie qu’il a faite ce dimanche 21 avril et de la poster sur mon blog. Je l’en remercie infiniment car j’ai toujours eu grand plaisir à écouter ses prédications, tant elles sont justes, tant elles propose à chaque fois un regard neuf, décalé et original des textes proposés par la liturgie dominicale.

« Cette image du berger et des brebis nous est bien connue. En notre temps de chevaux vapeur, de civilisation urbaine, de villes béton et de bruit, elle ne nous est pas quotidienne. Certes, nous pouvons avoir le souvenir d’un voyage à la campagne ou à la montagne, ou encore avoir en tête des images tirées d’un film ou de la télévision, mais cette image ne relève pas de notre expérience habituelle et, du même coup, au mieux, peut avoir une portée poétique ou au pire paraître archaïque et mièvre, bref ne pas avoir de quoi habiter nos cœurs, nos esprits, et être force d’engagement aujourd’hui.
Alors, nous devons la considérer dans son mouvement. Si la caricature consiste à schématiser une image pour n’en voir que le ridicule, il est aussi une manière de lire une image qui consiste à en faire apparaître la structure, comme on le ferait en face d’un monument ou d’un visage pour mettre en évidence l’armature, les lignes de force qui expriment l’essentiel de ce qu’on regarde  et en donner la signification. C’est comme cela que nous devons regarder ces quelques lignes sur ce pasteur et ses brebis. Et nous devons d’autant mieux le faire aujourd’hui que ce texte revient dans une autre version plus développée où il est question de porte, d’enclos, de brebis perdue. Ici, la parabole du berger et des brebis est réduite à l’essentiel, c’est cet essentiel que nous devons considérer et voir comment il répond très profondément à la nature de l’homme et donc à notre expérience. Que voyons-nous ? Un berger et un troupeau. Nous savons que la brebis a besoin du berger pour trouver les bons points d’eau, pour être conduite vers les bonnes prairies et éviter les précipices, pour être protégée des voleurs ou des prédateurs come le loup. Alors, le berger s’applique intensément d’autant qu’il a besoin des brebis, elles sont sa fortune ; y toucher c’est comme toucher à lui-même ; les perdre, c’est perdre ce qui le fait vivre. Le berger et la brebis ont ainsi besoin l’un de l’autre.
Mais à ce point, l’évangile se détache de l’image, parce qu’au bout du compte le berger tuera ou fera tuer à son profit la brebis, alors que le berger de la parabole donne sa vie pour ses brebis, donne la vie éternelle. En disant cela, nous sommes très fidèle à l’évangile dès lors que l’on considère que dans le passage qui précède le texte lu, il est question de la contestation des Juifs à l’égard de Jésus et, dans le texte qui suit, des Juifs qui cherchent des pierres pour le lapider.
Mais il est un autre point que cette parabole met en évidence et qui est très important, à savoir qu’on pourrait croire que dans le troupeau comme dans une foule, chacun est anonyme. Notre époque aime bien les immatriculations et les statistiques. Or ici, en écho de ce que nous dit l’évangile ailleurs, le berger connaît ses brebis par leur nom et ses brebis le connaissent et, du même coup, le suivent. Non seulement le berger assume la responsabilité de tous, il assume aussi la responsabilité de chacun, dans le fond de sa personnalité. L’amour dont Dieu aime l’humanité, dont il aime son Église, est identique à celui par lequel il aime chacun. C’est un mystère, mais un mystère qui correspond tout à fait à l’attente de notre condition humaine. Des philosophes grecs s’étaient penchés justement sur cette question qui paraissait abstraite : comment penser l’un et le multiple ?  Autrement dit, comment penser avec le même degré d’intensité l’ensemble des hommes et chacun en particulier, et penser à chacun sans le détacher de l’univers auquel il appartient. À notre petite cervelle humaine, cela est impossible car il y a toujours une attention privilégiée à l’un ou à l’autre. Or l’amour de Dieu est tel qu’en se donnant à l’un il n’enlève rien ni à l’autre ni à l’ensemble.
Notre foi en Jésus, certes ne change pas notre manière humaine de penser, mais nous fait participer de ce regard de Dieu sur le monde et sur chacun. La solidarité n’est pas exclusive de la vie personnelle. La chance de la foi est de nous permettre de lier les deux dans un seul mouvement d’unité comme le Père, créateur du ciel et de la terre est Un avec les Fils dont le corps singulier, incarné, est, comme nous le disons à la messe, offert pour la multitude.
Cette force de la foi peut être notre expérience… mais aussi il arrive que l’actualité nous en donne l’illustration. Je ne voudrais céder ni à la récupération ni à l’utilisation abusive — tant leur modestie et leur discrétion ont été grandes — mais nous avons été les témoins de la libération d’otages dont les médias nous ont dit qu’ils avaient une foi profonde qui les avait aidés à tenir. Nul doute qu’ils avaient le sens et de l’infini de Dieu et de sa présence au fond du cœur de chacun. Nul doute qu’ils avaient une prière personnelle et un sens du don de soi aux autres membres du troupeau. Membre du troupeau, chacun s’en savait aussi le berger et leur face-à-face avec Dieu dans la prière devait être aussi un face-à-face avec chacun des autres membres de la famille.
Rendons grâce au Seigneur pour ce don en un sens inimitable, en tout cas impossible à apprendre comme on apprendrait une leçon de yoga — pas une recette — mais comme un long chemin à parcourir comme nous dit l’évangile en étant, comme nous dit l’évangile en étant la brebis qui écoute la Parole de son berger. Alors, à notre tour, sachons aussi être des bergers à ‘image du Seigneur.