18/08/2013

« C’est un feu que je suis venu apporter sur la terre »


Chers amis, bonjour !

Notre foi est-elle suffisamment solide pour résister — ainsi que nous le demande l’apôtre Paul — à l’épreuve de la persécution, de la faim, du dénuement, du danger ou du glaive ? Dans les deux premiers textes de ce 20e dimanche du temps ordinaire, il est question de combat, de résistance et d’endurance dans l’épreuve que peuvent vivre les chrétiens, parfois au péril de leur vie.
Dans l'extrait de l’Évangile de Jean apparaît le profil du parfait résistant, Christ lui-même affrontant sans honte l’humiliation et la méchanceté des hommes qui ont entrepris de le condamner à mort. Face à ces violences, Jésus allume le feu, ce feu qu’il nous a promis par son Esprit Saint, ce feu qui fait de nous des torches vivantes au cœur d’un monde à transformer par la puissance de son amour.

Pour nous aider à aller plus loin dans la compréhension de ces textes, j’ai le plaisir de vous proposer ci-dessous l’homélie du RP Raymond HARDINGUÉDY de Saint-Priest.



Lecture du livre de Jérémie (38, 4-6. 8-10)
Le prophète signe de contradiction
Pendant le siège de Jérusalem, les chefs qui tenaient Jérémie en prison dirent au roi Sédécias :
« Que cet homme soit mis à mort : en parlant comme il le fait, il démoralise tout ce qui reste de combattants dans la ville, et toute la population. Ce n’est pas le bonheur du peuple qu’il cherche, mais son malheur. »
Le roi répondit : « Il est déjà entre vos mains, et le roi ne peut rien contre vous ! » Alors ils se saisirent de Jérémie et le jetèrent dans la citerne du prince Melkias, dans la cour de la prison. On le descendit avec des cordes. Dans cette citerne il n’y avait pas d’eau, mais de la boue, et Jérémie s’enfonça dans la boue. Un officier du palais, l’Éthiopien Ébed-Mélek, vint trouver le roi : « Mon Seigneur le roi, ce qu’ils ont fait au prophète Jérémie, c’est mal ! Ils l’ont jeté dans la citerne, il va y mourir de faim ! » Alors le roi donna cet ordre à l’Éthiopien Ébed-Mélek : « Prends trois hommes avec toi, et retire de la citerne le prophète Jérémie avant qu’il ne meure. »



Lecture de la lettre aux Hébreux (12, 1-4)
Le combat dans la foi à l’exemple de Jésus Frères, ceux qui ont vécu dans la foi, foule immense de témoins, sont là qui nous entourent. Comme eux, débarrassons-nous de tout ce qui nous alourdit, et d’abord du péché qui nous entrave si bien ; alors nous courrons avec endurance l’épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus, qui est à l’origine et au terme de la foi.
Renonçant à la joie qui lui était proposée, il a enduré, sans avoir de honte, l’humiliation de la croix, et, assis à la droite de Dieu, il règne avec lui. Méditez l’exemple de celui qui a enduré de la part des pécheurs une telle hostilité, et vous ne serez pas accablés par le découragement. Vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang dans votre lutte contre le péché.




Évangile de Jésus Christ selon saint Luc (12, 49-53)
Jésus, cause de division entre les hommes
Jésus disait à ses disciples : « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! Je dois recevoir un baptême, et comme il m’en coûte d’attendre qu’il soit accompli ! Pensez-vous que je sois venu mettre la paix dans le monde ? Non, je vous le dis, mais plutôt la division. Car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées : trois contre deux et deux contre trois ; ils se diviseront : le père contre le fils et le fils contre le père, la mère contre la fille et la fille contre la mère, la belle-mère contre la belle-fille et la belle-fille contre la belle-mère. »



Homélie du RP Raymond HARGINDÉGUY (de Saint-Priest – France)

« C’est un feu que je suis venu apporter sur la terre » (v. 49a).
Jésus est déconcertant.  Il n'invite pas à se méfier du feu.  Il préfère l'incendie aux tiédeurs.  Jean Baptiste avait prédit un Messie qui  baptiserait « dans l’Esprit Saint et le feu » (Lc 3, 16). Autant dire, qu’à la suite de Jésus, ce ne sera jamais le calme plat. Son désir de feu - d’autres textes nous le disent –  c’est le désir de nous communiquer le feu du Saint Esprit.
Rappelons-nous les langues de feu de la Pentecôte.  Ou bien le feu de la surabondance de son amour : « Ayant aimé les siens, il les aima jusqu’au bout » (Jn 13, 1), nous dit l’évangéliste Jean.  Et nous sommes invités à aller, nous aussi, aux extrêmes de l’amour.  Evidemment, chacune/chacun de nous se pose la question : est-ce bien un feu brûlant qui m’entraîne, moi, à la suite de Jésus, au service de Dieu le Père et de mes frères et sœurs en humanité ?

Ce texte de Luc peut nous choquer, mais reconnaissons qu’il est d’une étonnante modernité : Jésus n'apporte pas la tranquillité, le calme plat, la paix des cimetières.  Il sèmerait plutôt la division dans les familles, au cœur même de nos maisons. Mais comment comprendre ce texte ?  Quand on sait que Jésus ne prétend pas surcharger nos vies par des lois toujours plus lourdes…

Cette division dont il nous parle est tout autre chose qu'un désordre, une guerre des uns contre les autres :
  • Il vient séparer le père du fils, et le fils du père. La mère de la fille, et la fille de la mère.
  • Il veut nous aider à couper nos liens de parenté, de citoyenneté, d’allégeance religieuse  quand ils nous retiennent et nous ligotent.
  • Il veut nous aider à couper les relations possessives, exclusives, les mélanges inextricables.  
  • Il vient sauver la capacité d'éloignement et de distance qui sont la condition de l'amour.
  • Il nous propose de laisser ouvert l'espace de nos vies.
  • Il demande qu'on ne jette pas tout notre désir dans le seul amour de notre parenté de notre pays, de notre église.

Mais, dans ce texte de l’évangéliste Luc,  Jésus nous dit aussi son tiraillement à la pensée de la mort, de sa mort. Il proteste contre ce passage par la mort. L’affrontement avec la mort, il le redoute : « C’est un baptême que j’ai à recevoir, et comme cela me pèse jusqu'à ce qu'il soit accompli ! » (v. 50)  Ce baptême, dont parle Jésus, est son immersion dans les souffrances qui l’attendent et sa mort. Sa passion pour l’homme le conduira jusqu’à l’agonie sur la croix. Il le sait, il le redoute.

Ne l'oublions pas : au cours de nos eucharisties,  c’est au «corps livré» et au «sang versé» que nous communions.  Il est bon de nous rappeler que l’on ne peut suivre le Christ sans épouser ses choix et sans prendre les mêmes risques que lui,  y compris ceux de l’opposition, des critiques et parfois de l’hostilité.  Jésus n’a cessé de heurter la mentalité et la pratique des croyants de son temps.  Ils l’en crucifieront.  Mais, nous le savons et c’est notre foi qui nous le fait dire : il transformera la défaite de la mort en victoire de la vie, par sa résurrection.

Autour de nous, le monde est en feu : feu de la haine, de la guerre, de la jalousie, du rejet des différences...  La justice est bafouée, les pauvres écrasés.  Fasse le Seigneur Jésus que nous ne restions jamais froids  devant le scandale de la misère, de la violence et de l’injustice.  Que son feu enflamme nos cœurs et nous pousse à l’indignation et parfois au combat.