12/10/2009

« … Tout est possible à Dieu. »

Evangile de Jésus-Christ selon saint Marc: 10, 17 - 30

17 Jésus se mettait en route
quand un homme accourut vers lui,
se mit à genoux et lui demanda :
«Bon Maître, que dois-je faire
pour avoir en héritage la vie éternelle ?»
18 Jésus lui dit :
«Pourquoi m'appelles-tu bon ?
Personne n'est bon, sinon Dieu seul.
19 Tu connais les commandements :
Ne commets pas de meurtre,
ne commets pas d'adultère,
ne commets pas de vol,
ne porte pas de faux témoignage,
ne fais de tort à personne,
honore ton père et ta mère.»
20 L'homme répondit :
«Maître, j'ai observé tous ces commandements
depuis ma jeunesse.»
21 Posant alors son regard sur lui,
Jésus se mit à l'aimer.
Il lui dit :
«Une seule chose te manque :
va, vends tout ce que tu as,
donne-le aux pauvres
et tu auras un trésor au ciel ;
puis viens et suis-moi.»
22 Mais lui, à ces mots, devint sombre
et s'en alla tout triste,
car il avait de grands biens.
23 Alors Jésus regarde tout autour de lui
et dit à ses disciples :
«Comme il sera difficile
à ceux qui possèdent des richesses
d'entrer dans le royaume de Dieu !»
24 Les disciples étaient stupéfaits de ces paroles.
Mais Jésus reprend : '
« Mes enfants, comme il est difficile
d'entrer dans le royaume de Dieu !
25 Il est plus facile à un chameau
de passer par le trou d'un aiguille
qu'à un riche d'entrer dans le royaume de Dieu. »
26 De plus en plus déconcertés,
les disciples se demandaient entre eux :
«Mais alors, qui peut être sauvé ?»
27 Jésus les regarde et répond :
«Pour les hommes, cela est impossible,
mais pas pour Dieu ;
car tout est possible à Dieu.»
28 Pierre se mit à dire à Jésus :
«Voilà que nous avons tout quitté
pour te suivre.»
29 Jésus déclara :
«Amen, je vous le dis :
personne n'aura quitté,
à cause de moi et de l'Evangile,
une maison, des frères, des soeurs,
une mère, un père, des enfants
ou une terre,
30 sans qu'il reçoive, en ce temps déjà, le centuple :
maisons, frères, sœurs, mères, enfants et terres,
avec des persécutions
et, dans le monde à venir,
la vie éternelle.»

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Dure réalité que celle vécue par ce jeune que Jésus appelle à le suivre. Pour mémoire, Jésus est en plein enseignement et se déplace dans tout le pays, y compris chez les païens pour annoncer la Bonne Nouvelle du salut. La profession de foi de Pierre [«Tu es le Christ» (Mc 8, 29-30)] avait marqué un moment charnière dans l’adhésion des disciples et, à cette occasion, Jésus avait même enjoint Pierre (et des autres disciples) de ne parler de lui à personne. Quelques jours plus tard, il leur précise les conditions pour le suivre [«Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix et qu’il me suive. Qui veut en effet sauver sa vie la perdra, mais celui qui perd sa vie à cause de moi et de l’Evangile la sauvera» (Mc 8, 34-35)]. Or la question que pose ce jeune porte justement sur ces conditions sine qua non pour suivre le Maître (titre que Jésus récuse par ailleurs !): «… que dois-je faire pour avoir en partage la vie éternelle ?»

Jésus renvoie le jeune homme à la loi, aux commandements reçus de Dieu par Moïse et gravés dans le marbre de la tradition juive (cf. Ex 20, 12-16 — Dt 5, 16-20 — Dt 24, 14). La loi, il l’observe, répond-t-il. Marc précise que «Jésus fixa sur lui son regard et il l’aima», c’est-à-dire qu’il le prit en estime. Pourtant sa réponse est déroutante: «Une seule chose te manque : va, vends ce que tu as, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor au ciel ; puis, viens, suis-moi». Mais lui, à ces mots, son visage s’assombrit et il s’en alla attristé, car il avait de grands biens. Oui, il s'en alla tout attristé. C’est dire combien Jésus venait de toucher à un point névralgique dans la vie de ce jeune homme. Le doute s’empare aussi des apôtres qui ne comprenaient plus rien à rien. En effet, ils avaient tout quitté (femmes, enfants, familles et biens…) pour suivre Jésus et leur situation matérielle n’en était pas devenue meilleure.
«Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'un aiguille qu'à un riche d'entrer dans le royaume de Dieu.» (25) Le jeune homme était riche, mais l’était-il de vraies et bonnes richesses ? Ce qui interpelle les apôtres, c’est que dans ses propos Jésus stigmatise les richesses (et la prospérité qu’elles amènent) dont traditionnellement les juifs pensent qu’elle est un signe de la bénédiction divine. Or Jésus appelle à un véritable renversement, un renouvellement total de notre esprit et de notre vie pour enfin saisir la radicalité du son message. Il annonce un monde nouveau qui dépasse la Loi de Moïse et nos plus volontaristes dispositions à le suivre. Par-delà le bien qu’il nous demande de faire, Jésus nous exhorte à nous détacher de nos richesses matérielles et nos "sécurités sociales et affectives"… qui peuvent être un danger pour le suivre. Car ces richesses-là, ces sécurités-là peuvent nous posséder et nous emprisonner ; elles peuvent nous refermer sur nous-mêmes par peur de les perdre ou d’en être dessaisis. La route vers le ciel n’est donc pas une sinécure et Jésus en alerte ses disciples tout autant qu’il les rassure: «Mes enfants, comme il est difficile d'entrer dans le royaume de Dieu ! (25) Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'un aiguille qu'à un riche d'entrer dans le royaume de Dieu.» «Amen, je vous le dis : personne n'aura quitté, à cause de moi et de l'Evangile, une maison, des frères, des sœurs, une mère, un père, des enfants ou une terre (29), sans qu'il reçoive, en ce temps déjà, le centuple : maisons, frères, sœurs, mères, enfants et terres, avec des persécutions et, dans le monde à venir, la vie éternelle (30)».

Mais les apôtres ne comprennent pas encore dans sa substance le message nouveau que Jésus sème dans les cœurs de ceux qui accourent pour l’écouter. «A Dieu rien d’impossible», dit-il. Quel encouragement ! Mais en fait, cela signifie aussi que le ciel ne gagne pas par nos seuls mérites, quand bien même nous ferions le bien à tout va. Ce ne sont pas ceux qui disent «Seigneur, Seigneur» qui entreront automatiquement dans le ciel. Bien sût que non ! la vie et l’annonce de l’Evangile de Jésus exigent de l’homme qu’il soit libéré de toute chaîne, de toute entrave… qu’il prenne de la distance sur soi. L’Apôtre Paul l’a rappelé aux Hébreux : notre humanité a été attestée en Christ par toute sa vie terrestre ; notre foi nous commande de nous rendre dignes de son amour, lui qui a fait de nous ses «frères».

Il s’agit de nous détacher de tout, y compris de nous-mêmes pour nous mettre au service de la Parole qui sauve. Ce n’est pas une sinécure, et Jésus le premier en avise ses disciples. La vie dans le royaume nouveau qu’il annonce ne se construit pas dans des calculs d’épicier. La vie au ciel, c’est-à-dire la vie en Dieu auprès de Dieu est une pure grâce. Notre salut n’est donc pas une histoire de «petite cuisine» dans notre coin. Jésus ne nous propose pas des ingrédients parmi lesquels il faut choisir pour confectionner notre «dîner parfait». Déjà, dans les Béatitudes, Jésus avait dressé le panorama de ceux qu’il qualifie de «bienheureux», ceux dont la seule reconnaissance de la part des hommes sera la persécution à cause de l’annonce de sa Parole. Et pourtant, le ciel qu’il leur promet dès ici-bas, c’est bien cette récompense au centuple. Car seul Dieu sauve, lui qui a pouvoir sur tout, y compris sur sur ce qui nous semble «impossible»… Jean dans l’Apocalypse précise pour nous la certitude de la promesse de Dieu à ceux qui auront tout quitté pour le suivre et se seront dépouillés d’eux-mêmes pour le servir fidèlement: «Les serviteurs de Dieu verront son visage, et son nom sera écrit sur leur front. La nuit n’existera plus, ils n’auront plus besoin de la lumière d’une lampe ni de la lumière du soleil, parce que le Seigneur Dieu les illuminera, et ils règneront pour les siècles des siècles» (Ap. 22, 4-5).

1 commentaire:

Anonyme a dit…

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