11/12/2008

… Le Seigneur fera germer la justice et la louange
devant toutes les nations.

Bonjour !
Nous sommes au 3ème Dimanche de l'Avent, et la liturgie nous propose comme première lecture cet extrait du Livre d'Isaïe (Is 61, 1-2a.10-11)
, suivi du Magnificat (Luc 1, 46b-48, 49-50, 53-54).

61

01 L'esprit du Seigneur est sur moi
parce que le Seigneur m'a consacré par l'onction.
Il m'a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres,
guérir ceux qui ont le cœur brisé,
annoncer aux prisonniers la délivrance
et aux captifs la liberté,
2a annoncer une année de bienfaits, accordée par le Seigneur.
10 Je tressaille de joie dans le Seigneur,
mon âme exulte en mon Dieu.
Car il m'a enveloppé du manteau de l'innocence,
il m'a fait revêtir les vêtements du salut,
comme un jeune époux se pare du diadème,
comme une mariée met ses bijoux.
11 De même que la terre fait éclore ses germes,
et qu'un jardin fait germer ses semences,
ainsi le Seigneur fera germer la justice et la louange
devant toutes les nations.
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Certains des versets de ce poème d’Isaïe en rappellent d’autres, par exemple dans la première partie du Premier chant du serviteur de Yavhé: «Voici mon serviteur que je soutiens, mon élu que préfère mon âme. J’ai mis sur lui mon esprit pour qu’il apporte aux nations le droit» (42, 1). Dans le Livre de la Consolation, Israël est souvent représenté comme «un serviteur de Yavhé», choisi et séparé, réhabilité et sauvé pour être son témoin parmi les nations. Par contre, dans les quatre «Chants du Serviteur», est présenté un «serviteur» plutôt sous la forme d’une personne appelée par le Seigneur dès le sein de sa mère, formée par lui et remplie de son esprit. Ce nouveau serviteur apparaît comme un disciple éclairé par Dieu (qui lui a “ouvert l’oreille“ ) et envoyé par lui au milieu des hommes afin qu’il les instruise par sa parole: non seulement il rassemblera Israël, mais il sera aussi lumière pour toutes les nations de la terre. C’est le sens de la prophétie d’Isaïe (cf versets 42 à 53) dans laquelle on peut reconnaître plus tard (Mt 3, 17+ — Lc 4, 17-21+ — Ac 3, 13+ ) le Christ Jésus qui réunit en sa personne les traits du serviteur Roi-Messie fils de David et ceux du serviteur souffrant.

Il est beau ce poème d’Isaïe qui dresse les saveurs de la mission du prophète (dans la première partie) et rend compte de la joie anticipée du peuple d’Israël devant les promesses du Seigneur Dieu. Certaines de ces phrases nous sont familières, à travers le magnifique chant du RP Lucien Deiss (+) [ “L’esprit de Dieu repose sur moi, l’Esprit de Dieu m’a consacré, l’Esprit de Dieu m’a envoyé proclamer la paix, la joie…“], mais plus particulièrement dans la prière eucharistique IV ["Tu as tellement aimé le monde, Père très saint, que tu nous as envoyé ton propre Fils, lorsque les temps furent accomplis, pour qu’il soit notre Sauveur. Conçu de l’Esprit Saint, né de la Vierge Marie, il a vécu notre condition d’homme en toute chose, excepté le péché, annonçant aux pauvres la Bonne Nou­velle du salut ; aux captifs, la délivrance; aux affligés, la joie…"].
Mais qui sont donc ces affligés et captifs dont parle le prophète? Pour mémoire, lorsque Isaïe écrit ce poème, le peuple juif est revenu de l’exil. Depuis Babylone, tous espéraient retrouver leur terre intacte; mais à leur grande déception, ils découvrent que non seulement on ne les attendait pas, mais en plus qu’on ne leur facilitait pas leur réinstallation sur leur Palestine désormais habitée par de nombreuses populations étrangères. La domination perse leur empêche de reconstruire le Temple et l’effet démographique joue en leur défaveur : le peuple juif est devenu minoritaire sur ses propres terres faces à des populations païennes toutes dévouées à leurs idoles. A l’exil politique succède l’exil spirituel, la perte des repères historiques fondés et nourris dans cette longue relation avec Yavhé.
C’est dans ce contexte qu’Isaïe fait entendre sa voix : «Regardez, semble-t-il dire à ses frères, comme le Seigneur Dieu m’a consacré et a fait de moi un messie, celui qui annonce sa parole». Et quelle est-elle cette parole : «Ne vous découragez pas. Le Seigneur Dieu n’a pas renié son peuple. Il est avec vous. Mais ayez confiance car son œuvre germera patiemment en vous et portera du fruit…»
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Cet émerveillement d’Isaïe n’est pas sans rappeler ce que sera la Magnificat de Marie qui, devant l’annonce si exceptionnelle de l’Ange Gabriel manifestera une humilité, une confiance et un sens du «collectif» (on dirait aujourd’hui: “d’église“) que l’on trouve nulle part ailleurs. Cette véritable prière universelle de tous les croyants exalte la grandeur de l’amour et de la justice de Dieu qui se penche sur ceux (et celles) qui le servent, sur les pauvres, les faibles et les plus petits. Avec les mots et expressions que l’on peut retrouver aisément dans presque tous les textes de l’Ancien Testament, Marie dit sa foi et rend grâce à Dieu pour tous les bienfaits dont il comble l’humanité, en ce qu’il l’honore et la sanctifie par elle et surtout l’élève à sa divinité.

Psaume : Magnificat (Luc 1, 46b-48, 49-50, 53-54)

46 Mon âme exalte le Seigneur,
exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur.
48 Il s'est penché sur son humble servante ;
désormais tous les âges me diront bienheureuse.

49 Le Puissant fit pour moi des merveilles ;
Saint est son nom !
50 Son amour s'étend d'âge en âge
sur ceux qui le craignent.

53 Il comble de biens les affamés,
renvoie les riches les mains vides.
54 Il relève Israël, son serviteur,
il se souvient de son amour.

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