26/03/2012

« Nous voudrions voir Jésus…»




Dimanche 25 mars 2012, cinquième dimanche de Carême


Chers amis, bonjour !

Voir Jésus, tel est le désir de tout croyant, de tout chrétien. Les Juifs et les Grecs (les craignant-Dieu », c’est-à-dire les étrangers qui se sont laissés convaincre par le message de Jésus) pouvaient le voir en chair et en os. Pourtant nombre d’entre eux, surtout parmi les Juifs, sont restés fermés à l’éclat de sa lumière, dans les ténèbres du péché. Pourtant, aujourd’hui encore, la situation est plus qu’actuelle pour nous qui cherchons Dieu sans le trouver. Soit que nous doutons de sa présence, soit que nous la refusons au nom de notre liberté de croire ou de ne pas croire, au nom de notre rationalisme dont nous pensons qu’il peut seul nous procurer le progrès et l’accomplissement suprême. L’Alliance Nouvelle qu’annonce Jérémie est celle du pardon accompli en la personne de Jésus, Dieu parmi les hommes. C’est également la promesse de la vie qui sans cesse surgit par la germination, ce processus mystérieux par lequel le grain passe par la mort pour magnifier la vie et donner du fruit en abondance.
Mais où donc trouver Jésus ? Sur la croix, dans notre prière contemplative, dans son corps et son sang offerts comme nourriture et source de vie éternelle, sur les chemins de la vie, sur nos propres visages et dans nos propres vies qui auront été marqués du sceau de l’amour. C’est ainsi que Jésus lui-même nous fait missionnaires, apôtres de sa Bonne Nouvelle partout dans le monde, au milieu de nos frères: «… je vous ai choisis, je vous ai chargés d’aller, de porter du fruit et du fruit en abondance» (Jn 15, 16). Le fondement est bio puisqu’il procède de la vie ; il est durable parce qu’il se nourrit de justice et d’amour… C’est le sens des trois lectures que nous propose la liturgie de ce cinquième dimanche de Carême.



Première Lecture - Jérémie 31, 31 - 34
31 Voici venir des jours, déclare le SEIGNEUR,
où je conclurai avec la maison d'Israël et avec la maison de Juda
une Alliance nouvelle.
32 Ce ne sera pas comme l'Alliance
que j'ai conclue avec leurs pères,
le jour où je les ai pris par la main
pour les faire sortir d'Egypte :
mon Alliance, c'est eux qui l'ont rompue,
alors que moi, j'avais des droits sur eux.
33 Mais voici quelle sera l'Alliance
que je conclurai avec la maison d'Israël
quand ces jours-là seront passés,
déclare le SEIGNEUR.
Je mettrai ma Loi au plus profond d'eux-mêmes ;
je l'inscrirai dans leur cœur.
Je serai leur Dieu,
et ils seront mon peuple.
34 Ils n'auront plus besoin d'instruire chacun son compagnon,
ni chacun son frère en disant :
« Apprends à connaître le SEIGNEUR ! »
Car tous me connaîtront,
des plus petits jusqu'aux plus grands, déclare le SEIGNEUR.
Je pardonnerai leurs fautes,
je ne me rappellerai plus leurs péchés.


«Voici venir des jours...» … Cette formule de Jérémie que l’on retrouve déci delà dans Le Livre de la Consolation résonne comme un appel à l’espérance. Déjà le déclin de l’Assyrie avait permis au roi Josias (cf. 2 R 22, 3 – 24, 24) de reconquérir la Samarie et la Galilée.  L’oracle de Jérémie est comme une semence d’espérance dans les cœurs des exilés d’un retour dans le royaume de David enfin restauré. Yahvé aime son peuple et il le ramènera sur les terres de leurs pères et dans l’unité recouvrée autour de Sion, la Ville sainte. Une annonce du retour qui sera ensuite étendue au royaume de Juda à sons tour conquis et déporté. Juda est associé à Israël, et le Livre de la Consolation prend une portée définitivement messianique. Jérémie le clame dans un oracle qui précède notre texte du jour: «Voici venir des jours — oracle de Yahvé — où je sèmerai sur la maison d’Israël et sur la maison de Juda une semence d’hommes et une semence de bétail. Et de même que j’ai veillé sur eux pour arracher, pour renverser, pour démolir, pour exterminer et pour affliger, de même je veillerai sur eux pour bâtir et pour planter, oracle de Yahvé.» (Jr 31, 27-28).

Cet oracle est le cri de la Nouvelle Alliance, après l’échec de l’Antique Alliance : désormais, le dessein de Dieu apparaît sous un nouveau jour. Certes avec une survivance des anciennes perspectives (la fidélité des hommes à la Loi, la présence divine qui assure aux hommes la paix et la prospérité: «Je serai votre Dieu et vous serez mon peuple».  Un engagement de Dieu à l’égard des hommes sans cesse réaffirmé depuis l’Exode (Ex 11, 20 ; 36, 28 ; 37, 27), redit dans le Deutéronome (Dt 7, 6). Mais la nouveauté de l’Alliance porte sur trois points fondamentalement saillants : l’initiative divine du pardon des péchés (voir également Ez 36, 25-29, le Ps 51), la responsabilité et la rétribution personnelle (lire aussi Ez 14, 12 +) et l’intériorisation de la religion (la Loi cesse de n’être qu’une charte extérieure pour devenir une inspiration affectant le cœur, et c’est au cœur de l’homme que Dieu parle dorénavant sous l’influence de son Esprit qui consacre toute personne en laquelle il repose. Cette Alliance Nouvelle exaltée par Isaïe et le psalmiste sera inaugurée par le sacrifice du Christ. Tous les Apôtres en annonceront l’accomplissement. Paul en fera l’éloge en des termes identiques: «Telle est l’alliance que je contracterai avec eux après ces jours-là, le Seigneur dit : je mettrai mes lois dans leur cœur et je les graverai dans leur pensée. Ni de leurs péchés, ni de leurs offenses je ne me souviendrai plus. Or là où les péchés sont remis, il n’y a plus d’oblation pour le péché». (He 10, 16-18). Paul affirme ainsi la supériorité et l’efficacité du sacrifice du Christ sur les sacrifices anciens, forcément inefficaces : « Tu n’as voulu ni sacrifice n oblation ; mais tu m’as façonné un corps. Tu n’as agréé ni holocaustes ni sacrifices pour les péchés. Alors j’ai dit : Voici, je viens, car c’est de moi qu’il est question dans le rouleau du livre, pour faire, ô Dieu, ta volonté » (He 10, 5-8) … telles sont les paroles du Christ en entrant dans le monde. « Et c’est en vertu de cette volonté que nous sommes sanctifiés par l’oblation du corps de Jésus Christ, une fois pour toutes » (He, 10, 10).

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Psaume 50 (51), 3-4, 12-13, 14-15
Pitié pour moi, mon Dieu, dans ton amour,
selon ta grande miséricorde, efface mon péché.
4 Lave-moi tout entier de ma faute,
purifie-moi de mon offense.

12 Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
13 Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint.

14 Rends-moi la joie d'être sauvé ;
que l'esprit généreux me soutienne.
15 Aux pécheurs j'enseignerai tes chemins,
vers toi reviendront les égarés.


On pourrait dire que le texte de Jérémie fait écho au contenu du psaume 51 (50) communément intitulé «Miserere» : un psaume de pénitence dont on peut dire qu’il dégage comme un parfum de prophétie. La dernière phrase de Jérémie est une formidable promesse de Dieu pour les hommes en dépit de leurs infidélités et trahisons répétées: «Je pardonnerai leurs fautes, je ne me rappellerai plus leurs péchés». C’est par là que commence le psaume : la demande du pardon pour les péchés. Le psalmiste demande à Dieu de créer pour lui un cœur pur (lavé de toute malice) : notons ici que le verbe créer est réservé à Dieu seul au sens où il signifie l’acte par lequel il pose dans l’existence une chose nouvelle et, partant, merveilleuse.
Mais ce JE et ce MOI sont en réalité « collectifs » : c’est de tout le peuple d’Israël qu’il s’agit. C’est, au-delà, tout le peuple de la Nouvelle Alliance qui est convoqué à la table du pardon et de la purification par les eaux du Baptême. Purifiés, les disciples du Christ le seront aussi, selon les mots de Paul , dans l’Esprit de Dieu: «Vous, vous n’êtes pas dans la chair mais dans l’esprit, puisque l’Esprit de Dieu habite en vous. Qui n’a pas l’Esprit du Christ ne lui appartient pas : mais si le Christ est en vous, bien que le corps soit mort déjà en raison du péché, l’esprit est en vie en raison de la justice» (Rm 8, 9-10), car l’esprit est vie et puissance de résurrection. Au régime  du péché et de la mort, Paul oppose le régime nouveau de l’Esprit.
Longtemps avant Paul, le psalmiste supplie donc Dieu de ne pas lui soustraire son Esprit saint. Car Dieu, dans sa générosité, revient offre toujours son pardon à l’homme méchant et égaré. C’est cet homme-là que les prophètes interpellent et exhorte à reprendre le chemin du SEIGNEUR. Isaïe dira plus tard: «Que le méchant abandonne son chemin, et l'homme malfaisant, ses pensées. Qu'il retourne vers le SEIGNEUR qui lui manifestera sa tendresse, vers notre Dieu qui se surpasse pour pardonner.» (Is 55, 7). Dans sa prière dans le péril, David chantait déjà: «Fais-moi connaître ? Yahvé, tes voies, enseigne-moi tes sentiers. Dirige-moi dans ta vérité, enseigne-moi, c’est toi le Dieu de mon salut — Droiture et bonté que Yahvé, il remet dans la voie les égarés ; il dirige les humbles dans la justice, il enseigne aux malheureux sa voie» (Ps 25/26, 4-5, 8-9).



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Deuxième Lecture - Hébreux 5, 7 - 9
Le Christ,
7 pendant les jours de sa vie mortelle,
a présenté, avec un grand cri et dans les larmes,
sa prière et sa supplication
à Dieu qui pouvait le sauver de la mort ;
et, parce qu'il s'est soumis en tout,
il a été exaucé.
8 Bien qu'il soit le Fils,
il a pourtant appris l'obéissance
par les souffrances de sa passion ;
9 et, ainsi conduit à sa perfection,
il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent
la cause du salut éternel.

Ce texte est extrait du chapitre dans lequel Paul présente Jésus comme le grand prêtre compatissant. En effet, ce Jésus qui réalise cette Nouvelle Alliance dont parle Jérémie est exalté ici dans son humanité, dans sa chair.  Pour représenter les hommes devant Dieu, le prêtre doit être entièrement semblable à eux, vivre avec eux pour compatir à leurs misères au quotidien ; il doit même les avoir partagées, vécues pour pouvoir les porter en offrande à Dieu. Or, cette humanité de chair est attestée en Jésus Christ par son incarnation, sa vie au milieu des hommes, et surtout par son agonie et sa mort sur la croix. Une mort pour laquelle il est venu sur terre, envoyé de Dieu, pour nous sauver du péché, de lé déchéance. Une mort à laquelle il ne s’est pas dérobé, une mort à laquelle il n’a pas été arraché, mais au contraire !: «Père, si tu le veux, éloigne de moi cette coupe ! Cependant, que ce ne soit pas ma volonté qui se fasse, mais la tienne» (Lc 22, 42). Et pour consacrer sa mission de salut pour les hommes, il demande la miséricorde de son Père pour ces mains humaines qui viennent de le crucifier en croix: «Mon Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font» (Lc 23, 34). Oui, l’image est là bien visible d’un Christ obéissant jusqu’à sa mort que Dieu a transformé en une exaltation de gloire (voir aussi Jn 12, 27s ; 13, 31s).
Le Christ soumis est l’exemple type du Fils qui s’emplit de crainte et de respect pour son Père qu’il prie en agonie. Et c’est ainsi qu’il fut entendu et exaucé. La perfection du Christ se manifeste dans sa fonction de Prêtre et de Victime expiatoire. La perfection, il la vit dans cette prière qui n’est autre qu’un échange totalement confiant avec son Père. Qu’il nous souvienne ici la puissante prière sacerdotale (Jn 17, 1-26), cette grande prière d’oblation et d’intercession du Christ Sauveur à l’heure de son sacrifice. Car celui qui fut envoyé pour révéler aux hommes la personne du Père, a incarné son « nom » qui n’est autre qu’AMOUR. Et réciproquement, Dieu nous prouve son amour en livrant son Fils unique. Croire que Jésus est le Fils de Dieu est donc nécessaire à la reconnaissance de cet AMOUR.


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Evangile - Jean 12, 20 - 33
20 Parmi les Grecs qui étaient montés à Jérusalem
pour adorer Dieu durant la Pâque,
21 quelques-uns abordèrent Philippe,
qui était de Bethsaïde en Galilée.
Ils lui firent cette demande :
« Nous voudrions voir Jésus. »
22 Philippe va le dire à André ;
et tous deux vont le dire à Jésus.
23 Alors Jésus leur déclare :
« L'heure est venue pour le Fils de l'homme
d'être glorifié.
24 Amen, amen, je vous le dis :
si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas,
il reste seul ;
mais s'il meurt,
il donne beaucoup de fruit.
25 Celui qui aime sa vie la perd ;
celui qui s'en détache en ce monde
la garde pour la vie éternelle.
26 Si quelqu'un veut me servir,
qu'il me suive ;
et là où je suis,
là aussi sera mon serviteur.
Si quelqu'un me sert,
mon Père l'honorera.
27 Maintenant, je suis bouleversé.
Que puis-je dire ?
Dirai-je : « Père, délivre-moi de cette heure ? »
- Mais non ! C'est pour cela
que je suis parvenu à cette heure-ci !
28 Père, glorifie ton nom ! »
Alors, du ciel vint une voix qui disait :
« Je l'ai glorifié et je le glorifierai encore. »
29 En l'entendant, la foule qui se tenait là
disait que c'était un coup de tonnerre ;
d'autres disaient :
« C'est un ange qui lui a parlé. »
30 Mais Jésus leur répondit :
« Ce n'est pas pour moi que cette voix s'est fait entendre,
c'est pour vous.
31 Voici maintenant que ce monde est jugé ;
voici maintenant que le prince de ce monde
va être jeté dehors ;
32 et moi, quand j'aurai été élevé de terre,
j'attirerai à moi tous les hommes. »
33 Il signifiait par là de quel genre de mort il allait mourir.


Jésus annonce sa glorification par sa mort… Il faut avouer que le procédé n’est pas des plus fins pour revigorer le moral de ses disciples. Et pour évoquer des fondamentaux de la foi, il pouvait trouver des mots et un argumentaire plus simples, plus abordables… Mais hélas !
Revenons au texte : dès le début, comme pour dresser le décors, il est question de la Pâque juive. Beaucoup de personnes sont montées à Jérusalem pour se purifier avant de célébrer la grande fête. Les grands prêtres et les Pharisiens ont donné des consignes strictes à ceux qui stationnaient devant le Temple: si quelqu’un voit Jésus, qu’il en donne le signalement afin qu’on l’arrête.
Jésus vient de Béthanie où il avait rendu visite à son Lazare, celui-là même qu’il avait ressuscité. Pendant que Marthe servait le repas, Marie, l’autre sœur de Lazare, oignit d’un parfum de vrai nard, très coûteux, les pieds de Jésus au point d’en indigner plus d’un convive. Les grands prêtres, informés de la présence de Jésus en ces lieux, vinrent pour tuer Lazare, témoignage vivant de la puissance de Jésus le Nazaréen et arrêter Jésus. Mais c’est le lendemain que ce dernier entre triomphalement dans la Ville, monté sur un ânon au milieu d’une foule en liesse qui criait, rameaux à la main : «Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, le roi d’Israël» (Jn 12, 13). Dans la foule qui était venue acclamer Jésus, se trouvaient aussi des non Juifs, des Grecs convertis au monothéisme d’Israël et, dans une certaine mesure, aux observances de la Loi de Moïse : on les appelle les «craignant-Dieu». Ces derniers cherchent à rencontrer Jésus car ils ont entendu parler de ses hauts faits. C’est à eux tous réunis que Jésus annonce sa glorification par sa mort. Il est impossible de tirer la richesse de cet extrait de l’Évangile selon saint Jean en seulement quelques mots. C’est pourquoi nous allons essayer donner un bref éclairage de certaines phrases :

1)     «Voici venue l’heure où le Fils de l’homme doit être glorifié» : dans le texte de la première lecture, le prophète Jérémie proclame : Voici venir des jours, déclare le SEIGNEUR, où je conclurai avec la maison d'Israël et avec la maison de Juda une Alliance nouvelle ». Jérémie annonçait quelque chose qui arriverait ; Jésus annonce son heure qui est déjà là. Le temps du monde est désormais au rythme de celui de Jésus qui, en réalité, n’annonce pas sa glorification “par orgueil“, ou pour impressionner son auditoire. Si le Père le glorifie, il le fait aussi pour nous les hommes qu’il a élevés au rang de Fils de Dieu.
2)    «Si le grain de blé ne tombe en terre et ne meurt, il reste seul ; s’il meurt, il porte beaucoup de fruit». Cette phrase de Jésus trouve écho dans ce propos du Frère Axel de Taizé: «Le processus de la vie éternelle passe par la mort : pour que le grain se transforme en une vie nouvelle et productive, il faut qu’il passe par le stade de la germination. C’est-à-dire qu’une sorte de mort prépare l’éclatement et le développement nouveau» (F. Axel de Taizé, Le meurtre du prince, Évangile pour les agressifs, Les Presses de Taizé, 1972, p. 84). Il poursuit : «L’amour ne se manifeste pas seulement par la présence visible : l’image du grain, qui doit être jeté en terre pour permettre la germination et donner ensuite une plante et du fruit en abondance, retrouve ici sa signification. La séparation set à multiplier les richesses potentielles contenues dans la semence d’amour qui va éclater. La vie en Dieu est toujours faite de rupture et de retour. Ce mouvement de va-et-vient reproduit la réalité biologique (…) Tous ces rites de passage contribuent au processus de vie et de maturation. C’est l’occasion d’échapper soit à l’inertie passive, soit à la fermentation des foyers clos. L’attente de Dieu stimule l’amitié et développe un nouveau mode de communication avec Dieu.» (p. 94-95)
.
Mourir en terre, c’est la condition nécessaire de notre vie et de notre propre capacité à féconder la vie des autres, croyants ou non croyants. C’est ce que Jésus appellera «s’humilier», au sens étymologique de se mettre en terre (« humus ») pour se redresser. Car Jésus nous invite à nous faire petits, pauvres et discrets pour laisser fermenter en nous sa Parole qui nous relèvera comme Lazare de son tombeau, cette Parole qui est l’Esprit d’amour qui nous redressera telle une croix de la Nouvelle Alliance au cœur de nos vies.
3)    «Si quelqu’un me sert, qu’il me suive, et où je suis, là aussi sera mon serviteur» : le Fils de l’Homme qui est venu en ce monde non pour être servi mais pour servir inscrit sa glorification dans une attitude d’humilité, de rabaissement qui contraste avec celle des Pharisiens fanfarons et pédants. Jésus vient libérer l’homme de l’esclavage du péché. Comme il avait relevé Lazare de la condition d’opprimé, il rachète tous les hommes de toutes les servilités. Oui, avec lui le serviteur est hissé au rang du maître qui lui fait participer à la gloire du Père.
4)    «Maintenant, je suis bouleversé» : cette scène dont on peut penser qu’elle préfigure Gethsémani, l’angoisse légitime devant l’Heure qui approche, Jésus la vit debout comme un combat intérieur dans lequel il accepte le sacrifice. Il ne démissionne pas, il est « jusqu’au-boutiste ». Quel exemple d’abnégation, quelle leçon d’engagement ! Il prononce le nom de son Père justement pour se convaincre de la grandeur de son choix. Il s’offre à mourir pour l’accomplissement de l’œuvre qui glorifiera le Père en manifestât son amour pour le monde. Et une voix venue du ciel signe le pacte, marque par avance d’un sceau divin sur la mort de Jésus. Car sa mort affranchit les hommes de sa tyrannie.
5)     «C’est maintenant le jugement de ce monde ; maintenant le prince de ce monde va être jeté bas ; et moi, élevé de terre, j’attirerai tous les hommes à moi». Jésus sait qu’il va être jugé et maltraité par le tribunal des grands prêtres ; ce sera le jugement de ce monde. Mais il annonce déjà sa double élévation sur la croix et dans le ciel  la droite du Père. Il faut reconnaître que c’est là une drôle de réponse à tous ces Grecs qui cherchaient à le voir : élevé sur la croix, Jésus apparaîtra aux yeux de tous les hommes comme le Sauveur du monde. C’est ce dont témoigneront les Grecs pieux lorsqu’ils s’en retourneront chez eux.
6)     Aux Juifs qui sont là, incrédules et désespérés, Jésus demande de croire en lui avant qu’il ne soit trop tard. «La Lumière n’est plus avec vous que pour peu de temps. Marchez tant que voua avez la lumière, de peur que les ténèbres ne vous atteignent». Cette lumière brillera du haut de la croix qui sera le signe de ralliement de tous les hommes attentifs à l’appel de Dieu, réceptifs à son message d’amour, de paix et de lumière.
7)     «Nous voudrions voir Jésus.» Ces mots résument notre recherche, notre soif de Dieu. Mais comment le voir aujourd’hui encore ? Comme les bergers et les mages ont suivi l’étoile qui indiquait le lieu où se trouvait le nouveau-né, notre étoile aujourd’hui c’est la Parole de Dieu même. Mais Dieu se voit avec les yeux de la foi et non pas de la seule connaissance rationnelle. Ou plutôt, seule la foi nourrit et structure en chacun de nous la vraie connaissance de Dieu. Vivre sa Parole en communion avec nos frères en église, telle est le sens de notre vocation missionnaire. Celui qui a fait recouvrer la vue et l’ouïe à plusieurs infirmes est le seul capable de nous guérir de notre cécité, de notre refus permanent de voir le monde des hommes avec ses splendeurs et ses injustices… pour nous ouvrir au monde  et donner sens à la vie.



 

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