08/03/2012

Le Messie : puissance et sagesse de Dieu…


Chers amis, bonjour !


En ce troisième Dimanche de Carême, la liturgie nous propose de méditer sur les textes suivants :
Première lecture                 Exode (20, 1-17)
Psaume                                 18 (19), 8-11
Deuxième lecture                Première Lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens (1, 22-25)
Évangile                                 Jean (2, 13-25)


• Première lecture Exode (20, 1-17)
Sur le Sinaï,
1 Dieu prononça toutes les paroles que voici :
2 « Je suis le SEIGNEUR ton Dieu,
qui t'ai fait sortir du pays d'Egypte, de la maison d'esclavage.
3 Tu n'auras pas d'autres dieux que moi.
4 Tu ne feras aucune idole,
aucune image de ce qui est là-haut dans les cieux,
ou en-bas sur la terre, ou dans les eaux par-dessous la terre.
5 Tu ne te prosterneras pas devant ces images,
pour leur rendre un culte.
Car moi, le SEIGNEUR ton Dieu, je suis un Dieu jaloux :
chez ceux qui me haïssent,
je punis la faute des pères sur les fils,
jusqu'à la troisième et la quatrième génération ;
6 mais ceux qui m'aiment et observent mes commandements,
je leur garde ma fidélité jusqu'à la millième génération.
7 Tu n'invoqueras pas le nom du SEIGNEUR ton Dieu pour le mal,
car le SEIGNEUR ne laissera pas impuni
celui qui invoque son nom
pour le mal.
8 Tu feras du sabbat un mémorial, un jour sacré.
9 Pendant six jours tu travailleras
et tu feras tout ton ouvrage ;
10 Mais le septième jour est le jour du repos,
sabbat en l'honneur du SEIGNEUR ton Dieu :
tu ne feras aucun ouvrage,
ni toi, ni ton fils, ni ta fille,
ni ton serviteur, ni ta servante, ni tes bêtes,
ni l'immigré qui réside dans ta ville.
11 Car en six jours le SEIGNEUR a fait le ciel,
la terre, la mer et tout ce qu'ils contiennent,
mais il s'est reposé le septième jour.
C'est pourquoi le SEIGNEUR a béni le jour du sabbat
et l'a consacré.
12 Honore ton père et ta mère, afin d'avoir longue vie
sur la terre que te donne le SEIGNEUR ton Dieu.
13 Tu ne commettras pas de meurtre.
14 Tu ne commettras pas d'adultère.
15 Tu ne commettras pas de vol.
16 Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain.
17 Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain ;
tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain,
ni son serviteur, ni sa servante,
ni son bœuf, ni son âne : rien de ce qui lui appartient. »

Ce texte que l’on appelle le Décalogue (ou les Dix Paroles) nous a été conservé sous deux formes concise (dite sacerdotale) et développée (dite deutéronomique, dont Saint Augustin a organisé la structuration en deux divisions. C’est celle-là qui a été adoptée par l’Église— voir Dt 5, 6-21).  Il s’agit ici de ce qui constitue la base, le fondement sur lequel s’organise la vie religieuse et morale du Peuple choisi. Le Décalogue est le cœur même de la Loi mosaïque que le Christ rappellera la valeur dans le cadre de la Nouvelle Loi en l’enrichissant des «conseils évangéliques» (Matthieu, au chapitre 10, 17-21, présente les recommandations de Jésus à ses disciples, un ensemble qui constituera en quelque sorte le « bréviaire du missionnaire »).
Nous n’allons pas commenter les dix commandements, et nous nous en tiendrons donc à quelques-uns. Tout d’abord le premier d’entre eux, celui qui raisonne à l’évocation du shema Israël  (Écoute, Israël) : «Tu n’auras pas d’autres dieux que moi». Dans le Deutéronome, cela est plus explicite encore et c’est la forme retenue et gravée dans la tradition juive : «Écoute, Israël : Yahvé notre Dieu est le seul Yahvé. Tu aimeras Yahvé ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir. Que ces paroles que je te dicte aujourd’hui restent gravées dans ton cœur ! Tu les répéteras à tes fils, tu les leur diras aussi bien assis dans ta maison que marchant sur la route, couché aussi bien que debout ; tu les attacheras à ta main comme un signe, sur ton front comme un bandeau ; tu les écriras sur les poteaux de ta maison et sur tes portes.» (Dt 6, 4-9). Sans aucun doute, il s’agit ici d’un commandement à double lecture : affirmation du monothéisme en Israël où Yahvé est présent — donc pas d’autres dieux devant sa face —, affirmation de la présence immédiate, sans intermédiaire de Dieu dans son peuple. Nous savons que plus tard Jésus nous apprendra cette prière du Notre Père pour celui qui veut parler à Dieu. La seconde prescription découle logiquement du premier : pas d’idolâtrie, cette tare d’un peuple impatient et infidèle. « Ne vous tournez pas vers les idoles et ne vous faites pas fondre des dieux de métal. Je suis Yahvé votre Dieu » (Lv 19, 4).
Dans Matthieu 22, 37, Jésus citera Dt 6, 5 pour donner le plus grand commandement, à savoir l’amour de Dieu qui crainte filiale et non pas servile. Mais le second, dira-t-il, qui lui ressemble est : «Tu aimeras ton prochain comme toi-même» (id). Et il précise : «A ces deux commandements se rattachent toute la Loi, ainsi que les Prophètes» (id). Si donc les premiers commandements concernent la relation de l’homme au Dieu unique, les suivants portent sur les relations à autrui. Ce double bordage vertical et horizontal à travers ces dix Paroles manifeste en réalité l’amour de Dieu pour son peuple et pour chacun de ses enfants ; il veut nous éviter de nous égarer, de suivre le mauvais chemin, celui du Mal. Car la récompense du SEIGNEUR est immense pour qui se nourrit et agit selon sa Loi : «… ceux qui m'aiment et observent mes commandements, je leur garde ma fidélité jusqu'à la millième génération». Le monde de Dieu ne se construit pas sans l’homme et avec des pierres… le nouveau monde de Dieu se construit avec et dans le cœur de l’homme. C’est pourquoi Jean le Baptiste puis Jésus lui-même se sont attachés à  appeler les peuples à la conversion : «Convertissez-vous, car le Royaume de Dieu est proche». Un cœur nouveau… telle est la prophétie d’Ézéchiel (Ez 11, 19-21) : «Je leur donnerai un même cœur. Et je mettrai en vous  un esprit nouveau; J’ôterai de leur chair le cœur de pierre et Je leur donnerai un cœur de chair, afin qu’ils suivent mes prescriptions et qu’ils observent et pratiquent mes ordonnances; Ils seront mon peuple et Je serai leur Dieu. Mais pour ceux qui dont le cœur  se plait à leurs abominations et leurs horreurs, je ferai retomber leurs œuvres sur leur têtes, -- Oracle du Seigneur, l’Éternel», de Jérémie (Jr 9, 24-25) : «J’interviendrai contre tous les circoncis qui ne le sont pas vraiment….Car toutes les nations sont incirconcises, et toute la maison d’Israël est incirconcise de cœur». La Loi qu’annonce Jésus est celle de la Nouvelle Alliance, celle de l’Amour infini de Dieu envers toute l’humanité et qui nous justifie désormais par la foi. Paul s’en fera le chantre inépuisable dans la Lettre aux Galates (3, 24) et celle aux Hébreux (8, 6-10) : «Mais maintenant, Christ a obtenu un ministère d’autant supérieur qu’il est médiateur d’une alliance meilleure, fondée sur des meilleures promesses. Si, en effet, la première alliance avait été irréprochable, il n’y aurait pas lieu d’en chercher une seconde. C’est sous formes de reproche que Dieu dit : voici que les jours viennent, dit le Seigneur, je conclurai une alliance nouvelle avec la maison d’Israël, et la maison de Juda. Ce ne sera pas comme l’alliance que j’ai traitée avec leurs pères… Or voici l’alliance que j’établirai avec la maison d’Israël, après ces jours là, dit le Seigneur; je mettrai mes lois dans leur intelligence, Je les inscrirai dans leur cœur…».

____________________________________________________

• Psaume 18 (19), 8-11
La loi du SEIGNEUR est parfaite,
qui redonne vie ;
la charte du SEIGNEUR est sûre,
qui rend sages les simples.

9 Les préceptes du SEIGNEUR sont droits,
ils réjouissent le cœur ;
le commandement du SEIGNEUR est limpide,
il clarifie le regard.

10 La crainte qu'il inspire est pure,
elle est là pour toujours ;
les décisions du SEIGNEUR sont justes
et vraiment équitables :

11 plus désirables que l'or,
qu'une masse d'or fin,
plus savoureuses que le miel
qui coule des rayons.

Ce psaume de confiance fait écho à l’extrait du Décalogue ci-dessus ; il est un véritable hymne du Dieu créateur du ciel et de la terre, spécialement du soleil… mais aussi du Dieu créateur de la Loi. Nature et loi étant les marques de la perfection divine. Dans l’ancien Orient, le Soleil est le symbole de la justice. C’est pourquoi la liturgie de Noël applique ce symbole au Verbe de Dieu. Le Messie de Dieu est Soleil de justice.
Logiquement composé de deux parties distinctes. La première (versets 2 à 7) célèbre la gloire de Dieu dans le firmament de sa gloire ; la seconde (versets 8 à 15) qui fait l’éloge de la loi et de la lumière de Dieu révélée en sa Parole. Une Parole dont la clarté est plus étincelante que celle du Soleil. Le commandement de Dieu est droit, pur et sa parole est permanente (au sens où son contenu est inaltérable). Elle est riche comme l’or et douce comme le miel. L’homme qui respecte la Loi du Seigneur s’humilie et, de ce fait même, est récompensé de sa démarche par la justice de Celui qui est son rocher et son rédempteur.
Ce psaume peut être mis en miroir avec le psaume 119 (118), un psaume alphabétique dans lequel le psalmiste fait l’éloge de la loi divine en la différemment nommée : volonté, précepte, commandement, parole, témoignage, promesse, jugement, voie, chemin, route… autrement dit « enseignement révélé » tel qu’il a été transmis pas les prophètes.
« Heureux, impeccables en leur voie, | ceux qui marchent dans la loi de Yahvé. | Heureux, gardant son témoignage, | ceux qui le cherchent de tout cœur, | et qui, sans commettre de mal, | marchent dans ses voies » (Ps 119, 1-3).

____________________________________________________

Deuxième lecture : Première Lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens (1, 22-25)
Frères,
22 alors que les Juifs réclament les signes du Messie,
et que le monde grec recherche une sagesse,
23 nous, nous proclamons un Messie crucifié,
scandale pour les Juifs,
folie pour les peuples païens.
24 Mais pour ceux que Dieu appelle,
qu'ils soient Juifs ou Grecs,
ce Messie est puissance de Dieu et sagesse de Dieu.
25 Car la folie de Dieu est plus sage que l'homme,
et la faiblesse de Dieu est plus forte que l'homme.
Sagesse du monde ou sagesse chrétienne, Paul recentre l’enjeu de la foi pour le chrétien. En effet, nous savons que le monde grec s’est illustré par la richesse et la diversité d’une pensée philosophique qui a irrigué principalement la civilisation occidentale et orientale. Un essor qui a été facilité par l’hégémonie politique et militaire  de la puissance hellénique de l’époque. Une Raison dont les Grecs pensaient qu’elle était le principe actif de l’univers. Mais une Raison qui était elle-même nourrie par d’innombrables divinités cosmogoniques. Car dans sa soif de s’expliquer les origines et la finalité du monde, la Raison philosophique cédait le pas à la mythologie. Et bien entendu la rencontre de cette culture grecque avec l’Évangile de Jésus-Christ en réinterroge les fondements. Voici qu’est révélé aux Grecs ce Jésus qui est venu vivre notre humanité, prendre sur lui tous les péchés des hommes et, par sa mort et sa résurrection, nous dire l’espérance du salut dans son royaume de gloire.
De leur côté, les Juifs — dont on peut penser qu’ils sont en proximité culturelle et spirituelle avec le message du Christ — demandent des signes visibles du Messie. Car ils sont en retard sur les événements qui se (se sont déroulés) et qui continuent d’irradier le monde sous leurs yeux. Les Juifs attendent des signes d’un pouvoir politique qui les libère de la domination romaine. Or l’Évangile annoncé par les Apôtres est une autre sagesse : celle-ci procède d’un langage nouveau, le langage de la croix du Christ, véritable signe de la puissance de Dieu.
Paul proclame que l’Évangile du Christ fait appel non pas à la pure intelligence ni à la sagesse ordinaire mais à la folie de l’amour et du cœur. Isaïe l’avait déjà prophétisé en son temps : «Yahvé a dit : Parce que ce peuple ne m’approche qu’en paroles, qu’il ne me glorifie que des lèvres, tandis que son cœur reste loin de moi, et que sa religion envers moi n’est que commandements humains, leçons apprises ! Eh bien ! Je vais continuer à lui prodiguer mes prodigieux prodiges. La sagesse de ses sages tournera court, l’intelligence de ses intelligences s’éclipsera», tel est l’oracle du Seigneur Dieu contre le culte hypocrite.
Oui, Juifs et Grecs font comme s’il ne s’était rien passé d’extraordinaire, ils semblent ignorer ou tout au moins minimiser le fait majeur qui s’est produit à Jérusalem : la mort et la résurrection du Christ. Devant l’Aréopage, Paul était profondément choqué de lire sur certains monuments d’Athènes l’inscription : AU DIEU INCONNU. La connaissance de Dieu, telle est la mission qu’il s’assigne : «Ce que vous adorez sans le connaître, je viens, moi, vous l’annoncer» (Ac 17, 23). Car dans la propagande du judaïsme hellénistique, les païens ne connaissent pas Dieu puisqu’ils adorent des idoles et dédient leurs autels « aux dieux inconnus ». Paul donne un contenu inédit à leurs dédicaces en leur annonçant la Bonne Nouvelle du Christ ressuscité. Ce Christ qui, dans l’annonce de sa glorification par sa mort (il y avait des Grecs dans la foule) : «J’attirerai tous les hommes à moi» (Jn 12, 32). Élevé sur la croix, Jésus apparaîtra comme le Sauveur du monde. Telle est la réponse qu’il fait aux Grecs pieux qui cherchent à le voir. Et, par la même occasion, il exhorte les Juifs à croire en lui avant qu’il soit trop tard. Mais hélas ! Même après sa mort, il s’en trouve toujours qui doutent. Alors résonnent encore les paroles du prophète Isaïe, rappelés par Jésus en personne : «Il a rendu leurs yeux aveugles, il a endurci leurs cœurs ; pour que leurs yeux ne voient pas, que leur cœur ne comprenne pas, qu’ils ne se convertissent pas et que je ne les guérisse pas» (Jn 12, 40). Il n’est pas anodin que Jésus prononce ces paroles avant le dernier repas qu’il partagera avec ses disciples… avant sa passion : «Qui croit en moi, ce n’est pas en moi qu’il croit mais en celui qui m’a envoyé, et qui me voit, voit celui qui m’a envoyé.» (Jn 12, 44)
Le Christ nous a ouvert de nouveaux horizons, il nous invite à partager sa folie, celle de la puissance de la croix. Avec sa résurrection, le monde et l’homme ne sont plus couchés, ils sont redressés, debout pour aller annoncer les fameuses Dix Paroles (Décalogue) synthétisées désormais en Une seule Parole, à savoir son Évangile d’AMOUR. Ce secret-là, il a été révélé aux petits, aux faibles, aux humbles de cœur, aux captifs, aux affligés… ce secret-là, c’est celui de la délivrance du péché, de la joie et de l’espérance. C’est le sens profond de  la mission pour laquelle il rend grâce à son Père : «Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d'avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l'avoir révélé aux tout-petits» (Mt 11, 25).
____________________________________________________

Évangile de Jésus christ selon saint Jean (2, 13-25)

Comme la Pâque des Juifs approchait,
Jésus monta à Jérusalem.
14 Il trouva installés dans le Temple
les marchands de bœufs, de brebis et de colombes,
et les changeurs.
15 Il fit un fouet avec des cordes,
et les chassa tous du Temple ainsi que leurs brebis et leurs bœufs,
il jeta par terre la monnaie des changeurs,
renversa leurs comptoirs,
16 et dit aux marchands de colombes :
« Enlevez cela d'ici.
Ne faites pas de la maison de mon Père
une maison de trafic. »
17 Ses disciples se rappelèrent cette parole de l'Ecriture :
L'amour de ta maison fera mon tourment.
18 Les Juifs l'interpellèrent :
« Quel signe peux-tu nous donner
pour justifier ce que tu fais là ? »
19 Jésus leur répondit :
« Détruisez ce Temple,
et en trois jours je le relèverai ! »
20 Les Juifs lui répliquèrent :
« Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce Temple,
et toi, en trois jours tu le relèverais ! »
21 Mais le Temple dont il parlait, c'était son corps.
22 Aussi, quand il ressuscita d'entre les morts,
ses disciples se rappelèrent qu'il avait dit cela ;
ils crurent aux prophéties de l'Ecriture
et à la parole que Jésus avait dite.
23 Pendant qu'il était à Jérusalem pour la fête de la Pâque,
beaucoup crurent en lui,
à la vue des signes qu'il accomplissait.
24 Mais Jésus n'avait pas confiance en eux,
parce qu'il les connaissait tous
25 et n'avait besoin d'aucun témoignage sur l'homme :
il connaissait par lui-même ce qu'il y a dans l'homme.
Ce merveilleux texte de la prophétie du Temple relevé en trois jours nous fait entrer dans le style johannique dont les mots ont toujours un double sens qui donne à Jésus l’occasion de développer sa pensée. Ainsi, derrière des mots simples en apparence, il nous est demandé de rechercher un autre sens caché, surnaturel. Et les exemples sont nombreux : Temple, servitude, renaissance, pain vivant, eau vive, partir, réveiller, élever, laver, se manifester, etc.
Jean situe cette scène après le premier miracle de Jésus, la transformation de l’eau en vin aux noces de Cana. Autrement dit, relativement tôt dans son ministère. On parle de purification car le Temple de Jérusalem, c’est bien le lieu où réside le SEIGNEUR. Le geste de purification du Temple par Jésus en chassant les marchands n’est pas qu’un signe d’autorité par lequel il proclame sa filiation directe à Dieu («Otez cela d’ici. Ne faites plus de la maison de mon Père une maison de commerce »). D’ailleurs, les Juifs ne tardent pas à le lui faire savoir : «Quel signe nous montres-tu pour agir ainsi ?». Et la réponse de Jésus n’en est pas moins cinglante : «Détruisez ce sanctuaire : en trois jours je le relèverai». Mais ils ne comprennent pas encore le véritable sens de son propos. Jésus annonce l’actualité des temps messianiques qui sont ceux de la purification et de la sacralisation de toutes choses en pays d’Israël. Le Messie de Dieu rappelle ainsi la prophétie d’Ézéchiel et celle de Zacharie. En effet, nous savons que Ezéchiel est un prêtre ; le Temple est donc sa préoccupation majeure, qu’il s’agisse du Temple de Jérusalem souillé par des rites impurs que du Temple futur qu’il décrit si minutieusement les plans de reconstruction (Ez 40 à 44), ce Temple où il voit, en même temps que les péchés de Jérusalem, revenir Dieu dans sa grandeur: «… Et il me dit : As-tu vu, fils d’homme ? N’est-ce pas assez pour la maison de Juda de se livrer aux pratiques abominables auxquelles ils se livrent ici ?» (Ez 8, 17). Mais aussi la prophétie de Zacharie : «En ce jour, il y aura sur les clochettes des chevaux : “Sainte propriété de Yahvé“, et dans le Temple de Yahvé les marmites seront comme les coupes d’aspersion devant l’autel. Et toute marmite, à Jérusalem et en Juda, deviendra une sainte propriété de Yahvé Sabaot ; tous ceux qui veulent offrir un sacrifice viendront en prendre et s’en serviront pour cuisine ; et il n’y aura plus de marchands dans le Temple de Yahvé Sabaot, en ce jour-là » (Za, 14, 20-21).
Mais l’autre temple dont parle Jésus n’est autre que son propre corps qui sera brutalisé par le pouvoir politique romain et l’incompréhension du peuple juif. Oui, Yahvé qui, par la voix de son Ange, avait arrêté la main d’Abraham alors qu’il allait sacrifier son propre fils en obéissant à l’ordre de son Dieu, Yahvé laissera la main barbare des bourreaux romains transpercer d’une lance le corps de son Fils… pour le magnifier davantage par sa spectaculaire résurrection le troisième jour après sa mort et sa mise au tombeau.
Sacrilège donc pour les membres du sanhédrin que d’entendre Jésus se présenter à eux comme le Fils de Dieu. Et le faux témoignage contre lui se résumera dans ces mots : «Cet homme a dit : Je puis détruire le Temple de Dieu et le rebâtir en trois jours» (Mt 26, 61). Ce que tout le monde n’a pas compris, c’est que Jésus annonce ainsi la destruction du Temple et du culte juif qu’il symbolise… un monde ancien auquel il substitue un Temple nouveau, son propre corps ressuscité après trois jours et, ultérieurement, l’Eglise vivante qui le manifeste et le perpétue.

Aucun commentaire: