02/04/2012

HOSANNA ! Béni soit Celui qui vient au nom du Seigneur…


Dimanche des Rameaux

Chers amis, bonjour !
  
Nous célébrons aujourd’hui le dimanche des Rameaux qui symbolise l’entrée messianique du Seigneur à Jérusalem. C’est aussi le début de la semaine sainte qui nous conduira vers la grande fête de Pâques. A cette occasion, la liturgie nous propose les textes suivants :
Première Lecture - Isaïe 50, 4-7
Psaume 21 (22), 2, 8-9, 17-20, 22b-24
Deuxième Lecture - Philippiens 2, 6-11
Evangile : Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ selon Saint Marc : Mc 15, 1-39

Je voudrais partager ici avec vous  une MÉDITATION POUR LA FÊTE DES RAMEAUX écrite par le RP Michel CLÉMENCIN, prêtre de Saint-Priest dans le diocèse de LYON, pour nous donner un cadre de réflexion sur l’ensemble des textes de la liturgie de ce jour, particulièrement sur l'Évangile de la Passion du Christ (voir en fin de page).


• Première Lecture - Isaïe 50, 4-7
Dieu mon SEIGNEUR m'a donné le langage d'un homme
qui se laisse instruire,
pour que je sache à mon tour
réconforter celui qui n'en peut plus.
La Parole me réveille chaque matin,
chaque matin elle me réveille
pour que j'écoute comme celui qui se laisse instruire.
5 Le SEIGNEUR Dieu m'a ouvert l'oreille
et moi, je ne me suis pas révolté,
je ne me suis pas dérobé.
6 J'ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient,
et mes joues à ceux qui m'arrachaient la barbe.
Je n'ai pas protégé mon visage des outrages et des crachats.
7 Le SEIGNEUR Dieu vient à mon secours :
c'est pourquoi je ne suis pas atteint par les outrages,
c'est pourquoi j'ai rendu mon visage dur comme pierre :
je sais que je ne serai pas confondu.

On ne peut s’empêcher de souligner la force prophétique de cet extrait du «Troisième chant du Serviteur de Yahvé» dans lequel justement le Serviteur parle, exprime ce qu’il ressent au plus profond de lui, c’est-à-dire une assurance qui nourrit le fondement et la solidité de sa foi. Et cela se manifeste par une attitude, une posture du Serviteur face à son SEIGNEUR : l’écoute.

Bien entendu, Isaïe ne faisait aucune référence à Jésus Christ puisque ces fameux quatre « chants du Serviteur » sont écrits environ six cents ans avant la naissance du Christ, durant l’exil à Babylone. Ils font partie du Livre de la Consolation et décrivent avec force l’image du parfait disciple de Yahvé, ce Serviteur qui est à l’écoute de la Parole du SEIGNEUR et s’en inspire pour prêcher la véritable foi et ne se défausse pas face aux difficultés. Ce Serviteur souffre pour expier ses fautes et celles de son peuple et, en cela, il est glorifié par Dieu. Nous retrouvons ici la thématique de l’extrait de l’Évangile de Jean du cinquième dimanche de Carême qui relate l’annonce de la glorification de Jésus par sa mort.

Mais revenons sur ce Serviteur. Qui est-il ? Et quelle est sa mission ? C’est Isaïe lui-même, prophète de Yahvé qui est à l’écoute de ce dernier, se nourrit de sa parole et la met à la disposition de son peuple. En exil à Babylone, ce peuple est pris de désespoir, il risque de céder au découragement avec tout ce que cela peut induire comme comportements déviants : idolâtrie, luxure, etc. L’appel du prophète est une sorte de provocation, de mise en éveil pour appeler le peuple à donner du sens à leur exil. Et le sens vient de Dieu, ce Dieu que le Serviteur « écoute », ce Dieu par lequel «il se laisse instruire» et lui a «ouvert l’oreille». Écouter, c’est faire confiance et s’abandonner tel un enfant dans les bras du SEIGNEUR. Mais cette confiance est réciproque : Dieu parle à son Serviteur qui l’écoute, il lui donne mission d’annoncer sa Parole ; en retour le Serviteur entend cet appel et accepte d’accomplir sa mission.
L’exemple du jeune Samuel est éloquent. En effet, cet enfant qui entend l’appel du SEIGNEUR pour la toute première fois ne le discerne pas ; il pense que c’est Saul qui l’appelle. Mais au troisième appel, il répond: «Parle, car ton serviteur écoute» (1 S 3, 10). Et dans toute l’histoire du peuple d’Israël, les prophètes crieront: «Écoute, Israël», une interpellation qui signifie : « Israël, fais confiance à ton Dieu ». Car le Seigneur rend ferme et courageux, il affermit celui qui met en pratique sa parole et qui, nécessaire dérange les habitudes et les petits arrangements entre gens de peu de foi. Alors, celui qui annonce la Parole de Dieu est persécuté, humilié, ridiculisé. Mais qu’importe : « c'est pourquoi je ne suis pas atteint par les outrages, c'est pourquoi j'ai rendu mon visage dur comme pierre : je sais que je ne serai pas confondu »… Quand on lit la Passion du Christ, on est frappé par la similitude entre ce Serviteur et le Christ : il écoute son Père, il lui fait entière confiance et, même au plus fort de la persécution, il est sûr de la victoire finale.
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• Psaume 21 (22), 2, 8-9, 17-20, 22b-24
2 Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?
8 Tous ceux qui me voient me bafouent,
ils ricanent et hochent la tête :
9 « Il comptait sur le SEIGNEUR : qu'il le délivre !
Qu'il le sauve, puisqu'il est son ami ! »

17 Oui, des chiens me cernent,
une bande de vauriens m'entoure ;
ils me percent les mains et les pieds,
18 je peux compter tous mes os.

19 Ils partagent entre eux mes habits
et tirent au sort mon vêtement.
20 Mais toi, SEIGNEUR, ne sois pas loin :
ô ma force, viens vite à mon aide !

22 Mais tu m'as répondu !
23 Et je proclame ton nom devant mes frères,
je te loue en pleine assemblée.
24 Vous qui le craignez, louez le SEIGNEUR.

Ce psaume peut surprendre par la similitude de certains versets avec des paroles qui sortiront d’une autre bouche, celle du Christ sur la croix: «Mon, mon Dieu, pourquoi m’avoir abandonné ?». Mais en réalité, il faut le lire en entier pour en saisir tout le sens. Il s’agit d’un psaume qui exprime les souffrances du psalmiste, mais également une déclamation de l’espoir du juste qu’il est. Espoir en son Dieu en qui lui, le ver qui ne se reconnaît plus comme un homme, «honte du genre humain, rebut de son peuple», bafoué par tous ceux qui le voient, ricanent et hochent de la tête… lui qui a placé en son Dieu a mis toute sa confiance. Plainte d’un persécuté, certes, mais qui se termine par une action de grâce pour la délivrance attendue et vécue.
 C’est comme une description avant date de la passion du Christ: «… ils me percent les mains et les pieds…», «…ils partagent entre eux mes habits et tirent au sort mes vêtements». Cependant, à l’instar du Serviteur fidèle décrit par Isaïe, le psalmiste rend grâce à son Dieu parce l’avènement du règne de Dieu est toujours consécutif aux épreuves subies. C’est qui justifie sa joie d’être écouté de Dieu parce qu’il l’a écouté, de l’avoir trouvé parce qu’il l’a cherché: «C’est toi ma louange dans la grande assemblée ; j’accomplirai mes vœux devant ceux qui le craignent. Ils loueront le SEIGNEUR, ceux qui le cherchent : que vive leur cœur à jamais !».
Ce psaume est donc un cri d’espoir de tout un peuple aux pires moments de son exil à Babylone. Ce peuple qui, en dépit de ses errements et des ses reniements, revient à son Dieu de miséricorde qui ne l’a jamais abandonné. Ceux qui craignent Dieu et qui espèrent ne seront pas déçus.

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• Deuxième Lecture - Philippiens 2, 6-11
6 Le Christ Jésus, lui qui était dans la condition de Dieu,
n'a pas jugé bon de revendiquer
son droit d'être traité à l'égal de Dieu.

7 Mais au contraire, il se dépouilla lui-même
en prenant la condition de serviteur,
devenant semblable aux hommes.

8 Reconnu comme un homme à son comportement,
il s'est abaissé lui-même en devenant obéissant
jusqu'à mourir et à mourir sur une croix.

9 C'est pourquoi Dieu l'a élevé au-dessus de tout.
Il lui a conféré le Nom
qui surpasse tous les noms

10 afin qu'au nom de Jésus,
aux cieux, sur terre et dans l'abîme,
tout être vivant tombe à genoux.

11 Et que toute langue proclame :
« Jésus-Christ est le Seigneur »
pour la gloire de Dieu le Père.


Dans l’extrait de l’épître aux Philippiens ci-dessus, l’apôtre Paul synthétise parfaitement cette condition du Serviteur souffrant dans ce qu’on pourrait appeler « une hymne à la grandeur messianique de Jésus le Christ ». Cette déclamation vient en conclusion de l’exhortation de l’apôtre à la persuasion dans l’Amour, de communion dans l’Esprit, de tendresse compatissante… des mêmes sentiments qui furent dans le Christ (2, 1-5). Mais la puissance de cette exhortation est le signe des divisions intestines qui menaçaient la paix de la communauté ecclésiale de Philippes. Les expressions qu’utilise Paul sont fortes et demeurent dans la droite ligne de sa doctrine du Mystère du Christ : préexistence divine, abaissement de l’Incarnation, abaissement ultérieur de la passion et de la mort, glorification céleste, adoration de l’univers et titre nouveau de « Christ ». En effet, Jésus le Christ s’est librement dépouillé non pas de sa nature divine, mais de la gloire qu’elle lui valait de droit et qui lui était consubstantielle dans sa préexistence. Il aurait pu s’en servir pour « sur-passer » les pires moments de son existence humaine… il ne l’a pas fait, choisissant plutôt de s’en priver pour ne la recevoir que du Père comme le prix de son sacrifice. Tel est d’ailleurs le sens de l’Évangile du cinquième dimanche de Carême (Jn 12, 20-33) : « Alors, du ciel vint une voix qui disait : “Je l’ai glorifié et je le glorifierai encore ».
Oui, ce Serviteur souffrant, nous le trouvons dans la personne de Jésus Christ, vrai homme et homme comme les autres, partageant toutes les faiblesses de la condition humaine, excepté le péché. Mais un homme qui adopte le chemin de la soumission et de l’humilité obéissante. Voilà pourquoi Paul lui donne le Nom de SEIGNEUR avec tout le caractère divin qui lui est attaché.

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• Évangile : Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ selon Saint Marc : Mc 15, 1-39
1 : Dès le matin, les chefs des prêtres convoquèrent les anciens et les scribes, et tout le grand conseil. Puis ils enchaînèrent Jésus et l'emmenèrent pour le livrer à Pilate.
2 Celui-ci l'interrogea :
« Es-tu le roi des Juifs ? » Jésus répond : « C'est toi qui le dis. »
3 Les chefs des prêtres multiplièrent contre lui les accusations.
4 Pilate lui demandait à nouveau : «Tu ne réponds rien?
Vois toutes les accusations qu'ils portent contre toi. »
5 Mais Jésus ne répondit plus rien, si bien que Pilate s'en étonnait.
6 A chaque fête de Pâque, il relâchait un prisonnier, celui que la foule demandait.
7 Or, il y avait en prison un dénommé Barabbas,
arrêté avec des émeutiers pour avoir tué un homme lors de l'émeute.
La foule monta donc, et se mit à demander à Pilate la grâce qu'il accordait d'habitude.
9 Pilate leur répondit : "Voulez-vous que je vous relâche le roi des Juifs?»
10 (Il se rendait bien compte
que c'était par jalousie que les chefs des prêtres l'avaient livré.)
11 Ces derniers excitèrent la foule à demander plutôt la grâce de Barabbas.
12 Et comme Pilate reprenait :
« Que ferai-je donc de celui que vous appelez le roi des Juifs? »
13 ils crièrent de nouveau : «Crucifie-le!»
14 Pilate leur disait :
«Qu'a-t-il donc fait de mal?» Mais ils crièrent encore plus fort :
"Crucifie-le!»
15 Pilate, voulant contenter la foule, relâcha Barabbas.
Et après avoir fait flageller Jésus, il le livra pour qu'il soit crucifié. |
16 Les soldats l'emmenèrent à l'intérieur du Prétoire,
c'est-à-dire dans le palais du gouverneur.
Ils appellent toute la garde,
17 ils lui mettent un manteau rouge, et lui posent sur la tête une couronne d'épines qu'ils ont tressée.
18 Puis ils se mirent à lui faire des révérences :
« Salut, roi des Juifs. »
19 Ils lui frappaient la tête avec un roseau, crachaient sur lui,
et s'agenouillaient pour lui rendre hommage.
20 Quand ils se furent bien moqués de lui,
ils lui ôtèrent le manteau rouge, et lui remirent ses vêtements.
Puis ils l'emmenèrent pour le crucifier,
21 et ils réquisitionnent, pour porter la croix,
un passant, Simon de Cyrène, le père d'Alexandre et de Rufus, qui revenait des champs.
22 Et ils amènent Jésus à l'endroit appelé Golgotha, c'est-à-dire Lieu du Crâne ou Calvaire.
23 Ils lui offraient du vin aromatisé de myrrhe ; mais il n'en prit pas.
24 Alors ils le crucifient, puis se partagent ses vêtements, en tirant au sort pour savoir la part de chacun.
25 Il était neuf heures lorsqu'on le crucifia.
26 L'inscription indiquant le motif de sa condamnation portait ces mots :
«Le roi des Juifs».
27 Avec lui on crucifie deux bandits, l'un à sa droite, l'autre à sa gauche.
29 Les passants l'injuriaient en hochant la tête :
« Hé! toi qui détruis le Temple et le rebâtis en trois jours,
30 sauve-toi toi-même, descends de la croix! »
31 De même, les chefs des prêtres se moquaient de lui avec les scribes, en disant entre eux :
« Il en a sauvé d'autres, et il ne peut pas se sauver lui-même!
32 Que le Messie, le roi d'Israël, descende maintenant de la croix ;
alors nous verrons et nous croirons. »
Même ceux qui étaient crucifiés avec lui l'insultaient.
33 Quand arriva l'heure de midi, il y eut des ténèbres sur toute la terre jusque vers trois heures.
34 Et à trois heures, Jésus cria d'une voix forte :
«Eloï, Eloï, lama sabactani ?» ce qui veut dire :
«Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?»
35 Quelques-uns de ceux qui étaient là disaient en l'entendant :
« Voilà qu'il appelle le prophète Elie! »
36 L'un d'eux courut tremper une éponge dans une boisson vinaigrée, il la mit au bout d'un roseau, et il lui donnait à boire, en disant :
«Attendez! Nous verrons bien si Elie vient le descendre de là! »
37 Mais Jésus, poussant un grand cri, expira.
38 Le rideau du Temple se déchira en deux, depuis le haut jusqu'en bas.
39 Le centurion qui était là en face de Jésus, voyant comment il avait expiré, s'écria :
«Vraiment, cet homme était le Fils de Dieu!»



« La foule enthousiaste qui acclame Jésus avec des palmes est la même qui le condamnera quelques jours plus tard. Une foule est toujours versatile et se laisse facilement influencer par ceux qui crient le plus fort. Le récit de la Passion montre les manipulations et l’arbitraire qui conduiront le Christ à la mort.
Pourquoi faut-il que Dieu, par Jésus crucifié, passe par cette épreuve de la douleur, avant que la Résurrection ne signe le pouvoir de la vie sur la mort, le pouvoir de la paix sur toute violence ? Est-ce pour nous apprendre à gérer nos libertés devenues folles ? La Passion expose les conséquences mortelles de choix égoïstes, orgueilleux, pervers et cruels, et en même temps, elle révèle l’attitude droite, digne, courageuse de Celui qui choisit d’aimer jusqu’au bout.
Ce récit nous interroge sur nos complicités, petites ou grandes, dans le mal qui atteint le monde. Primo Levy écrivait: «Les monstres seuls ne sont pas dangereux. Ceux qui sont dangereux, ce sont les gens ordinaires». Il pensait à tous les gens « ordinaires » qui avaient contribué à arrêter des innocents et les convoyer en camp de concentration. Des gens qui par faiblesse, peur ou manque de jugement, se faisaient les complices d’un système diabolique.
Dieu n’intervient pas dans le concret de l’Histoire, mais il intervient en nous, constamment, par son Esprit Saint ; cet Esprit de Vie est capable d’ouvrir nos yeux, nos mains, nos cœurs pour que l’amour triomphe de la barbarie, et cela avant qu’elle ne se déchaîne. Nous sommes donc des veilleurs, engagés à prévenir le pire et soucieux de préparer le meilleur !
Non seulement il nous faut combattre le mal qui défigure l’humanité, mais il nous faut bannir la complaisance ou la complicité passive qui disqualifie notre statut d’hommes et de femmes partenaires de Dieu. Ce n’est pas d’abord nous qui prions Dieu de nous délivrer des violences du monde, c’est Lui qui nous prie instamment de bâtir un monde pacifié, solidaire et fraternel.»

RP Michel CLÉMENCIN





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