02/05/2012

"Dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu"


Dimanche 29 avril, 4ème dimanche de Pâques

Chers amis, bonjour !

Les textes de la liturgie de ce 4ème dimanche de Pâques sont unis par une idée transverse : Christ est la pierre angulaire méprisée par les maçons, pierre sur laquelle Dieu a fondé son œuvre. Christ, son fils bien-aimé est au cœur de ce projet de salut et de réconciliation avec tous les hommes : par lui et dans son amour, nous sommes appelés fils de Dieu, brebis d’un troupeau dont il connaît chacune. En dehors du Christ donc, point de salut.


• Première Lecture - Actes des Apôtres 4, 8 - 12
Convoqué devant le grand conseil d'Israël,
8 Pierre, rempli de l’ESPRIT-SAINT, déclara :
« Chefs du peuple et anciens,
9 nous sommes interrogés aujourd'hui
pour avoir fait du bien à un infirme,
et on nous demande comment cet homme a été sauvé.
10 Sachez-le donc, vous tous,
ainsi que tout le peuple d'Israël :
c'est grâce au nom de Jésus le Nazaréen,
crucifié par vous,
ressuscité par DIEU,
c'est grâce à lui que cet homme
se trouve là devant vous, guéri.
11 Ce Jésus, il est la pierre
que vous aviez rejetée, vous les bâtisseurs,
et il est devenu la pierre d'angle.
12 En dehors de lui, il n'y a pas de salut.
Et son nom, donné aux hommes,
est le seul
qui puisse nous sauver. »

D
ans l’Évangile du dimanche dernier (le deuxième de Pâques), Jean indiquait à l’attention de la postérité : « Il y a encore beaucoup d'autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ceux-là y ont été mis afin que vous croyiez que Jésus est le Messie, le Fils de DIEU, et afin que, par votre foi, vous ayez la vie en son nom » (Jn 20, 30-31). Pourtant les disciples qui ont été « aux premières loges » de la vie de Jésus au jour le jour, eux qui ont été témoins oculaires de tous les miracles qu’ils faisait et de toutes les paroles qu’il proférait… ce sont eux qui sont anxieux, déboussolés et presque abattus… et qui guettent une lueur de réconfort. Eux qui sont montés à Jérusalem pour se joindre à tous les autres pèlerins pour fêter la Pâque se retrouvent à vivre un vrai cauchemar. C’est le début des temps d’épreuves en l’absence physique de Jésus. Le psaume 121 (120) qu’ils connaissent parfaitement pour l’avoir chanté lors des montées vers Jérusalem, ils se le chantent dans leur fort intérieur : « Je lève les yeux vers les monts : d’où viendra mon secours ? Le secours me vient de YAHVÉ qui a fait ciel et terre » (vv 1-2). Mais eux qui, à l’instar de tous les autres pèlerins, sont montés vers Jérusalem par des routes pénibles ont reçu de Jésus la promesse de cheminer avec lui vers la Jérusalem céleste.

Puis le temps a passé et les apôtres, au premier rang desquels Pierre, se mettent à prêcher la Bonne Nouvelle. Ils en ont reçu mission de la bouche de Jésus lui-même. Ils n’ont plus peur de rien car, comme le souligne Luc (qui a écrit les « Actes des Apôtres »), ils sont tous habités par la force et la sagesse de l’ESPRIT-SAINT. Pierre se retrouve finalement dans les mêmes situations que Jésus de son vivant. Combien de fois ce dernier n’a-t-il pas scandalisé les pharisiens et autres intégristes de guérir des malades et chasser les démons en plein sabbat ? C’est ce qui leur vaut d’être convoqué par le Sanhédrin, c’est-à-dire la plus haute juridiction juive. Et il ne se dégonfle pas, comme s’il s’était « shooté à l’ESPRIT-SAINT » : plus rien ne lui fait peur, et ses amis et lui attribuent systématiquement à Jésus les mérites des guérisons qu’ils opèrent.
C’est là un véritable bouleversement que les apôtres initient : ce Jésus, disent-ils, que vous les Juifs avez condamné et mis à mort à tort, ce Jésus-là est ressuscité et c’est à l’invocation de son Nom que nous guérissons les malades et chassons les esprits mauvais. Bien des événements ont eu lieu qui n’ont pas été relatés dans les Actes des Apôtres. Mais ceux qui ont été portés à notre connaissance l’ont été parce qu’ils sont la manifestation de la gloire du Nom de Jésus.

Souvenons-nous : cet infirme dont il est question ici, c’est celui  qui était boiteux depuis le ventre de sa mère. Le chapitre suivant nous apprendra qu’il avait maintenant plus de quarante ans, c’est-à-dire quarante années de mise à l’épreuve ; il était souvent debout à l’entrée de la Porte Belle du Temple lorsque Jésus y prêchait. Aujourd’hui, il est guéri par la seule puissance de son Nom, maintenant qu’il a été glorifié par son Père. Cet infirme que la loi juive condamnait à rester à la porte du Temple est délivré de son handicap à l’invocation du Nom de Jésus. Désormais, il peut entrer librement dans le Temple tenant par la main les apôtres.

C’est là le signe fondamental donné aux hommes de ce monde, croyants et non-croyants : dorénavant, toute guérison sur la terre est liée à la gloire de DIEU dans le ciel. Quand Jésus était avec les apôtres, ceux-ci étaient simples témoins de ses miracles car ils ne pouvaient « voir », « constater » ou « vérifier » la gloire de Jésus dans le ciel. Mais ces temps nouveaux que Jésus le ressuscité a inaugurés ne peuvent porter du fruit sans la repentance et la conversion. C’est pourquoi les apôtres en font leur leitmotiv, la condition sine qua non pour toute personne pour naître à l’ESPRIT-SAINT de DIEU. Isaïe parlait déjà « des temps de rafraîchissement », prophétisant ainsi la puissance transformatrice de l’Esprit («des eaux jailliront dans le désert, et des rivières dans le lieu stérile» Is  35, 6 et sq) annoncée pour les « rachetés du SEIGNEUR », les « élus de DIEU », ceux qui vers lui ont décidé de tourner leur vie en commençant par se détourner de leurs méchancetés.

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• Psaume 117 (118), 1.4. 8-9. 22-23. 28-29
1 Rendez grâce au SEIGNEUR : il est bon !
ÉTERNEL est son amour !
4 Qu'ils le disent, ceux qui craignent le SEIGNEUR :
ÉTERNEL est son amour !

8 Mieux vaut s'appuyer sur le SEIGNEUR
que de compter sur les hommes ;
9 mieux vaut s'appuyer sur le SEIGNEUR
que de compter sur les puissants !

22 La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs
est devenue la pierre d'angle ;
23 c'est là l'œuvre du SEIGNEUR,
la merveille devant nos yeux.

28 Tu es mon DIEU, je te rends grâce,
mon DIEU, je t'exalte !
29 Rendez grâce au SEIGNEUR : il est bon !

I
l est beau ce psaume dont le message construit tout en  inclusion résonne comme un dialogue entre l’annonce du psalmiste et les répons de l’assemblée : ÉTERNEL est son amour, ÉTERNEL est son amour… En réalité, ce chant clôt de grand Hallel qui commence avec le psaume 113. Les versets 1 à 4 constituent l’invitatoire qui précède cet hymne d’action de grâces clamé par le peuple d’Israël dans le cadre de la Liturgie des Tentes. « Rendez grâce au SEIGNEUR car ÉTERNEL est son amour » : c’est ainsi que commence et se termine ce cantique de l’inauguration du règne millénaire. Le peuple d’Israël chante la vérité de l’ÉTERNEL et sa bonté qui demeurent à jamais. Tout Israël avec la maison d’Aaron et ceux qui craignent l’ÉTERNEL.
Le SEIGNEUR qui est venu délivrer les hommes de l’emprise du péché et briser les chaînes du Mal est la pierre angulaire de la construction d’un monde nouveau. Comme en Jérémie 33.11, il est la porte, la pierre, le Messie… il est DIEU lui-même.
Cette pierre rejetée par las bâtisseurs est le cœur de la restauration du peuple de la Nouvelle Alliance, celle annoncée par Isaïe (28, 16) : « C’est pourquoi ainsi parle le SEIGNEUR YAHVÉ : “Voici que je pose à Sion une pierre témoin, angulaire, précieuse, fondamentale. Celui qui croit ne bronchera pas. Et je prendrai le droit comme mesure et la justice comme niveau ». « Ne bronchera pas » au sens de « ne rougira pas », et c’est le nom même de ce que sera la pierre de fondation de la nouvelle Jérusalem que le prophète chante dans un cri de victoire (Is 26, 1 sq) : « Ce jour-là, on chantera ce cantique sur la terre de Juda : “Nous avons une ville forte, il a mis pour nous protéger rempart et avant-mur…“.  Bien plus tard, Zacharie prophétisera avec une égale stupéfaction : « Puis l’ange de DIEU fit cette déclaration à Josué : “Ainsi parle YAHVÉ Sabaot. Si tu marches dans mes voies et gardes mes observances, tu gouverneras ma maison, tu garderas mes parvis et je te donnerai accès parmi ceux qui se tiennent ici. Car voici la pierre que je place devant Josué : sur cette unique pierre, il y a sept yeux ; voici que je vais graver moi-même son inscription, oracle de YAHVÉ Sabaot “» (Za 9, 6-9a).
Le SEIGNEUR est un DIEU fidèle et sa droite fait des prouesses en faveur de son peuple est de quiconque suit es commandements. Le SEIGNEUR est la porte et le chemin de justice qui mène au Temple, à la vie et au salut : « Donne le salut, YAHVÉ, donne ! Donne la victoire, YAHVÉ, donne ! Béni soit au nom de YAHVÉ celui qui vient ! » (Ps 118, 25-27). Ces paroles seront scandées par la foule le jour des Rameaux et, aujourd’hui, nous les chantons dans le Sanctus à l’occasion de chaque célébration eucharistique. Pierre de faîte de ce temple vivant que sera son Église, pierre roulée du tombeau pour que se manifeste la vie dans tous son éclat (« Voici le jour que fit le SEIGNEUR, pour nous allégresse et joie ! »)
Paul reprendra cette même thématique du Christ triomphant et suprême qui nous offre gratuitement son salut dans une réconciliation éternelle ; et ce d’autant que désormais « nous sommes (…) son ouvrage, créés dans le Christ Jésus en vue des bonnes œuvres que DIEU a préparées d’avance pour que nous les pratiquions » (Ep 2, 10) : « Ainsi donc, vous n’êtes plus des étrangers ni des hôtes ; vous êtes concitoyens des saints, vous êtes de la maison de DIEU. Car la construction que vous êtes a pour fondations les apôtres et prophètes, et pour pierre d’angle le Christ Jésus lui-même. En lui, toute construction s’ajuste et grandit en un temple saint, dans le SEIGNEUR ; en lui, vous aussi, vous êtes intégrés à la construction pour devenir une demeure de DIEU, dans l’Esprit » (Ep 2, 19-22).
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Il est intéressant de noter que le psaume 118 (117) — une hymne d’action de grâces des pèlerins marchant vers Jérusalem — que la liturgie nous donne de méditer est suivi immédiatement du psaume 119 (118) qui est une éloge à la loi divine. Dans ce long psaume alphabétique, les 8 vers de chaque strophe commencent par l’une des 22 lettres de l’alphabet hébreu et contiennent chacun l’un des termes qui désigne la Loi : voie, témoignage, précepte, commandement, volonté, promesse, parole, jugement, voie. Autant de mots qui signifient la richesse de l’enseignement révélé tel que l’ont reçu et transmis les prophètes, tel que jésus lui-même lui a donné chair et l’a dépassé et accompli. Dans la promesse qu’il nous fait de partager avec lui, à son retour, sa gloire dans son royaume auprès de son Père, les apôtres — mais les prophètes l’avaient déjà compris — nous rappellent et nous exhortent à la conversion permanente pour l’observance du commandement de Dieu, du plus grand commandement qu’il nous ait laissé : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ». Car la fidélité aux commandements est déjà la joie et la récompense du juste. Ce n’est donc pas sans raison si le psalmiste chantait : « Exultate, justi, in Domino » (« Justes ! Réjouissez-vous dans le SEIGNEUR »).

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• Deuxième Lecture - 1 Jean 3, 1 - 2
Mes bien-aimés,
1 voyez comme il est grand, l'amour dont le Père nous a comblés :
il a voulu que nous soyons appelés enfants de DIEU,
- et nous le sommes -.
Voilà pourquoi le monde ne peut pas nous connaître :
puisqu'il n'a pas découvert DIEU.
2 Bien-aimés,
dès maintenant, nous sommes enfants de DIEU,
mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement.
Nous le savons : lorsque le Fils de DIEU paraîtra,
nous serons semblables à lui
parce que nous le verrons tel qu'il est.

Ê
tre appelés « enfants de DIEU ». L’apôtre Jean a présentes à l‘esprit la longue séquence du dernier repas au cours de la quelle Jésus dit, entre autres, sa « Prière d’adieu » ainsi que sa « prière sacerdotale ». Il faut bien comprendre que pour Jean, tout est lié (et même conditionné) à la « connaissance de DIEU ». Nous l’avons lu dimanche dernier : « À ceci nous savons que nous Le connaissons : si nous gardons ses commandements. Celui qui dit : “Je Le connais“ et ne garde pas ses commandements est un menteur, et la vérité n’est pas en lui » (Jn 2, 3-4). Par le respect et la pratique de ses commandements, le chrétien, élevé au rang de fils de DIEU, demeure en DIEU et DIEU demeure en lui. Par le baptême, il naît en DIEU par la force de son Esprit. Ainsi né de DIEU, il est désormais de DIEU, au sens où il le connaît et vit en (et par) sa présence. Cette union avec DIEU est manifestée par la foi et l’amour fraternel. Car si le monde ne peut connaître les fils de DIEU, il reconnaît la présence de DIEU au milieu des hommes par l’amour et la charité entre frères.

Être de DIEU, de la vérité, être enfants de DIEU, cela signifie que le chrétien vit sous l’influence créatrice de DIEU qui demeure en lui. Les enfants de DIEU s’opposent aux enfants du Diable, ceux qui sont sous l’influence pernicieuse de Satan. Si donc nous sommes des enfants de DIEU, alors il nous faut vivre en enfants de DIEU. Et les enseignements des apôtres tournent tous autour de cette idée de conversion à DIEU afin que nous soyons, non seulement purs, mais aussi prêts « pour que s’il venait à paraître, nous ayons pleine assurance, et non point la honte de nous trouver loin de lui à son Avènement » (1 Jn 3, 28). Loin de lui à cause du péché, car le péché nous éloigne de DIEU.

Enfants de DIEU, nous le sommes grâce à l’Esprit : « Il n’y a donc plus maintenant de condamnation pour ceux qui sont dans le Christ. Car la loi de l’Esprit qui donne la vie dans le Christ Jésus t’affranchi de la loi du péché et de la mort » (Rm 8, 1) ; ou encore : « en effet, tous ceux qu’anime l’Esprit de DIEU sont fils de DIEU. Aussi bien n’avez-vous pas reçu un esprit d’esclaves pour retomber dans la crainte ; vous avez reçu un esprit de fils adoptifs qui nous fait nous écrier : Abba ! Père ! » (8, 14-15). Le Saint esprit n’est pas seulement un « maître intérieur », il est le principe d’une vie proprement divine. Une vie nourrie de l’ESPRIT-SAINT qui nous donnera de voir le Christ ressuscité dans une vision qui ne sera pas seulement sensible, mais spirituelle et intérieure, avec les yeux de la foi. Parce que nous aurons été dignes d’être appelés « enfants de DIEU » par l’observance de son commandement d’amour, nous verrons ce que le monde ne pourra voir, ce par (et pour) quoi le monde ne pourra nous connaître parce qu’il n’aura pas connu DIEU lui-même. « Si le monde vous hait, sachez qu’il m’a haï avant vous. Si vous étiez du monde, le monde aimerait son bien ; mais parce que vous n’êtes pas du monde, puisque mon choix vous a tirés du monde, le monde vous hait » (Jn 15, 18-19) … « Dans le monde vous aurez à souffrir. Mais gardez courage ! J’ai vaincu le monde » (Jn 16, 33). Autrement dit, ceux qui connaissent « celui qui est dès le commencement » et parce qu’en eux demeure la Parole de DIEU, ils auront la force de vaincre « le Mauvais », comme le Christ lui-même l’a vaincu par sa résurrection.

Le monde, c’est la cour d’influence du Mauvais, c’est-à-dire le Diable tentateur qui se nourrit et attise dans les cœurs des hommes « la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la richesse » (Jn 16, 16). Par le baptême et la pratique de ses commandements, DIEU nous revêt de sa lumière, de sa justice et de son amour ; il nous garde ainsi des atteintes du Mauvais en nous préservant du péché.

Mais actuellement, il y a dans le monde, d’un côté ceux qui ont déjà cru en DIEU et qui attendent sa venue dans la gloire, de l’autre ceux qui ont refusé et continuent de refuser de croire en dépit des œuvres de l’Esprit dans le monde. A ces derniers, il nous est demandé de révéler la présence de DIEU par l’amour fraternel en paroles et en actes.

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• Évangile - Jean 10, 11 - 18
Jésus disait aux Juifs :
11 « Je suis le bon pasteur (le vrai berger).
Le vrai berger donne sa vie pour ses brebis.
12 Le berger mercenaire, lui, n'est pas le pasteur,
car les brebis ne lui appartiennent pas :
s'il voit venir le loup,
il abandonne les brebis et s'enfuit ;
le loup s'en empare et les disperse.
13 Ce berger n'est qu'un mercenaire,
et les brebis ne comptent pas vraiment pour lui.
14 Moi, je suis le bon pasteur;
je connais mes brebis,
et mes brebis me connaissent,
15 comme le Père me connaît,
et que je connais le Père ;
et je donne ma vie pour mes brebis.
16 J'ai encore d'autres brebis,
qui ne sont pas de cette bergerie :
celles-là aussi, il faut que je les conduise.
Elles écouteront ma voix :
il y aura un seul troupeau
et un seul pasteur.
17 Le Père m'aime
parce que je donne ma vie,
pour la reprendre ensuite.
18 Personne n'a pu me l'enlever :
je la donne de moi-même.
J'ai le pouvoir de la donner,
et le pouvoir de la reprendre :
voilà le commandement que j'ai reçu de mon Père. »
 

D
ans des contrées où l’eau est souvent rare et donc précieuse, l’agriculture et le pastoralisme sont des activités fondamentales économiquement et socialement. Le rapport à la terre est particulier, cette terre que l’on ensemence pour espérer des récoltes suffisantes et dont les prés sont des espaces de nourriture pour le bétail. Et ce n’est pas par hasard si dans l’histoire du peuple hébreu les deux fonctions de semeur et de berger (pasteur) ont servi à représenter la posture de YAHVÉ par rapport à son peuple, ainsi que celle de ses « intermédiaires » (prophètes, sages, etc.) face à ce même peuple.

L’image du pasteur est particulièrement forte parce qu’elle regroupe des qualités de détermination, d’attention, d’abnégation et de courage, mais aussi d’affection. La relation du pasteur à ses brebis est une relation de connaissance collective et individuelle : le pasteur connaît ses brebis et les appelle chacune par son nom. Non pas une connaissance au sens d’une démarche purement intellectuelle, mais une véritable expérience de proximité qui s’épanouit nécessairement en amour. Le berger dont il est question ici n’est pas celui qui va sacrifier ses agneaux mais celui qui va les sauvegarder (c’est-à-dire les garder sains et saufs). Jean l’écris dans le Prologue de son Évangile (1, 3) comme le prophète Osée l’avait déjà précisé : « Ah ! Votre amour est comme la nuée du matin, comme la rosée qui tôt se dissipe. (…) Car c’est l’amour que je veux, non les sacrifices, la connaissance de DIEU, non les holocaustes » (Os 6, 6).

Envoyé de DIEU, Jésus est donc lui-même pasteur de son peuple. Un pasteur fidèle, engagé et pugnace à défendre l’intégralité de son troupeau. Dans sa “Prière sacerdotale“, Jésus dira à son Père : « Quand j’étais avec eux, je gardais en ton nom ceux que tu m’as donnés. J’ai veillé sur eux et aucun d’eux ne s’est perdu. » (Jn 17, 12) … « Et pour eux je me consacre moi-même, afin qu’ils soient eux aussi consacrés en vérité » (id v. 19), autrement dit il s’offre lui-même en sacrifice pour les siens, ses brebis, car dira-t-il, « c’est que je donne mas vie, pour la reprendre. On ne me l’ôte pas ; je la donne de moi-même. J’ai pouvoir de la donner et pouvoir de la reprendre ; tel est l’ordre que j’ai reçu de mon Père ». Rappelons-nous également le texte d’Ézéchiel sur les pasteurs d’Israël : « Je susciterai pour le mettre à leur tête un pasteur qui les fera paître, mon serviteur David : c’est lui qui les fera paître et sera pour eux un pasteur. » (Ez 34, 23). David à cette époque, le Messie dans les temps de la Nouvelle Alliance.

Jésus, ce nouveau Pasteur aime tellement ses brebis qu’il les veut à ses côtés dans la gloire à venir : « … Je veux que là où je suis, ils soient aussi avec moi, pour qu’ils contemplent la gloire que tu m’as donnée, parce que tu m’as aimé avant la création du monde. » (id v. 24). Chaque pasteur que YAHVÉ avait suscité au milieu de son peuple à travers son histoire avait donc une fonction pré-messianique en sa qualité d’inter-locuteur et de traducteur du message de Dieu pour ses frères, d’éveilleur de conscience, d’«avertisseur» et de lieutenant au sens de vigile et de protecteur des siens. Et l’on comprend mieux a posteriori les avertissements répétés des prophètes à travers les oracles messianiques, car parlant du roi de l’avenir, Jérémie par exemple écrivait déjà : « Malheur aux pasteurs qui laissent périr et se disperser le troupeau de mon pâturage — oracle de YAHVÉ ! C’est pourquoi, ainsi parle YAHVÉ, le DIEU d’Israël, sur les pasteurs qui ont à paître mon peuple. Vous avez laissé s’égailler et s’égarer mes brebis et ne vous en êtes pas occupés. Eh bien ! Moi je vais m’occuper de vous, pour vos méfaits — oracles de YAHVÉ ! Mais je rassemblerai moi-même le reste de mes brebis de tous les pays où je les aurai dispersées et je les ramènerai dans leurs prairies : elles seront fécondes et multiplieront. » (Jr 23, 1-3). Zacharie redira cette mise en garde à l’endroit des mauvais pasteurs : « Malheur au mauvais pasteur qui délaisse le troupeau ! » (Za 11, 17). Toutes ces prophéties étaient directement liées à la situation du peuple juif, disséminé, éparpillé, séparé à la suite d’invasions, de conflits, d’oppositions diverses. Des hommes seront choisis par YAHVÉ pour les rassembler. Mais celui qui viendra rassembler au-delà du seul peuple d’Israël, c’est Jésus, le Messie de DIEU qui viendra, pour sauver tous les hommes, donner sa vie en sacrifice pour la rémission de leurs péchés : « J'ai encore d'autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur » (v 17). Jésus ne ramène pas toutes les brebis au bercail juif ; il les agrège à l’humanité entière,  cet immense troupeau qu’il « mène » à la vie éternelle.

L’unité du peuple des rachetés est l’autre exigence de la mission de Jésus. Un seul SEIGNEUR, une seule foi, un seul baptême, un seul DIEU et Père… Ce magnifique refrain que nous chantons pour magnifier la puissance de l’ESPRIT-SAINT de DIEU à l’œuvre dans le monde traduit cette exigence d’unité. De même, ce troupeau rassemblé le sera dans le cadre d’une seule et même famille : l’Église du Christ. Paul écrira : « Car c’est lui qui est notre paix, lui qui des deux n’a fait qu’un peuple, détruisant la barrière qui les séparait, supprimant en sa chair la haine. Cette Loi des préceptes avec ses ordonnances, pour créer en sa personne les deux en un seul Homme Nouveau, faire la paix et les réconcilier avec DIEU, tous deux en un seul Corps, par la croix » (Ep 2, 14-16). Le Christ est celui qui est venu lever toutes les barrières qui séparaient les hommes entre eux pour les rassembler à l’intérieur d’un seul enclos : ainsi, par exemple, il lèvera la clôture qui séparait le parvis des Juifs de celui des Gentils, dans le Temple de Jérusalem. Nous avons dit plus haut que Jésus venait prendre en son sein toute l’humanité.
En effet, la Loi mosaïque, qui faisait du peuple juif un peuple privilégié, les séparait des païens. Jésus l’a abolie en l’accomplissant une fois pour toutes par sa croix. Et l’Homme Nouveau dont parle Paul est bien l’archétype de cette humanité nouvelle que DIEU a recréée en la personne de son Fils ressuscité d’entre les morts. Christ, le Nouvel Adam, DIEU l’a créé « unique » car en lui disparaissent toutes les divisions des hommes. Et ce Corps unique, c’est le Corps individuel et physique du Christ sacrifié sur la croix pour le salut de toute l’humanité ; mais c’est aussi ce Corps mystique où s’agrègent tous les membres enfin réconciliés par la force de l’ESPRIT-SAINT. Membres de ce Corps, nous aussi sommes morts et ressuscités avec lui, participant ainsi à la puissance de la vie qu’il donne en abondance avec son ESPRIT-SAINT. C’est ce même ESPRIT qui désormais nous irrigue et nous abreuve de ses multiples dons tel une source intarissable d’AMOUR. C’est le Christ qui donne la vie, c’est lui qui a pouvoir de la reprendre (« C’est moi qui fait mourir et qui fais vivre » - Dt 32-39). La sienne, il l’a offerte en sacrifice suprême sur la mort en croix pour le salut de tous les hommes. Mais par sa résurrection, Dieu l’a installé à jamais dans la vie afin que quiconque se convertit à lui l’ait en abondance. Et comme Pasteur de son peuple, l’enclos dans lequel il ramène les brebis égarées, le parcage dans lequel il les fait paître avec de l’herbe fraîche, c’est depuis toujours son projet de salut.

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